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La Izquierda Diario
18 de janvier de 2021 Twitter Faceboock

Pénurie de doses, failles logistiques
Vaccination des plus de 75 ans : une première journée catastrophique, prenons nos affaires en mains !
Adèle Chotsky

Depuis ce lundi, le gouvernement appelle les plus de 75 ans à aller se faire vacciner pour accélérer sa campagne de vaccination. Mais l’organisation ne suit pas et les failles logistiques se multiplient, laissant des milliers de personnes âgées inquiètes pour leur santé dans le désarroi et révélant l’incapacité totale du gouvernement à mettre en place cette vaccination pourtant fondamentale pour ralentir la progression de l’épidémie. Un résultat du manque de moyens fruit des plans d’austérité successif mais aussi de l’incapacité de la haute administration d’Etat à répondre aux défis d’une campagne vaccinale certes inédites mais vitale pour la résolution de la crise.

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File d’attente devant un centre de vaccination à Paris le 15 janvier 2021
Crédit photo : AFP - MARTIN BUREAU

Après avoir essuyé une pluie de critiques pour le démarrage poussif de sa campagne de vaccination contre le Covid-19, le gouvernement Macron change de stratégie. Officiellement la campagne s’accélère, et le ministre de la santé Olivier Véran se félicite que près de 100 000 personnes aient été vaccinées au 10 janvier. Il faut faire du chiffre, et vite, pour rattraper ceux des autres pays notamment européens à côté desquels la vaccination à la française fait pâle figure.

Le vaccin est donc élargi aux plus de 75 ans. En appelant ces derniers à venir se faire vacciner (ce qui représente 6 millions de personnes) le gouvernement ouvre une boîte de pandore : il suscite une ruée sur les prises de rendez-vous qu’il se révèle incapable de gérer. En tout, ce sont 9 millions de personnes en France qui peuvent désormais se faire vacciner (Ehpad, personnels soignants, plus de 75 ans).

Problèmes logistiques et désarroi des personnes âgées

Plus de 800 centres vaccinaux vont commencer à vacciner le grand public ce lundi. Les réservations ouvertes vendredi dans la limite d’un mois de rendez-vous ont été très vite saturées, car les plus de 75 ans se pressent sur les inscriptions à la vaccination. À raison, car inquiets pour leur santé, en faisant partie des plus à risque face au coronavirus et dans un contexte de possible rebond de l’épidémie dû à l’apparition de variants.

L’ouverture des réservations a débuté vendredi matin via trois plateformes en ligne et un numéro vert (un de plus !) annoncés à la dernière minute.

La plateforme Doctolib notamment, est surchargée et rencontre désormais des problèmes lorsque l’on veut prendre un rendez-vous. Plusieurs centres sont saturés et certaines personnes n’ont pas pu obtenir de dates pour les semaines à venir par manque total de visibilité des centres sur les doses de vaccins disponibles.
Car pendant que le gouvernement ouvre les vannes de la vaccination, la production de celui-ci n’est pas à la hauteur. Le vaccin Pfizer est livré au compte-goutte au nombre de 500 000 doses par semaines sans que les autorités sachent quels jours et en quelle quantité exactement.

Ne pouvant pas respecter la cadence, le laboratoire a annoncé diviser temporairement de quasi par deux ses livraisons dans l’attente d’une mise à niveau de son usine en Belgique. Les laboratoires pharmaceutiques ont en tête ce dont toute grosse entreprise capitaliste se préoccupe : comment réaliser un maximum de profit par temps de crise sanitaire. La concurrence entre les labos a été au cœur de la première phase de la « course au vaccin ». Pour les capitalistes, la santé est un marché comme les autres et la pénurie de doses est également synonyme de flambée des prix et de la possibilité de négocier plus cher les prochaines commandes.

Mais il y a un autre problème : non seulement les doses de vaccins pourraient venir à manquer, mais en plus, en France, des stocks dorment dans les congélateurs à cause de problèmes logistiques. Avec une ouverture élargie de la vaccination en catastrophe, le circuit d’approvisionnement n’a pas pu être correctement mis en place dans les temps.

Il faut dire que la complexité du stockage du vaccin Pfizer complique les choses, puisque celui-ci doit être conservé dans des super-congélateurs à moins 70 degrés. Le schéma logistique qui a été mis en place paraît cependant d’une complexité rare : les doses de vaccins passent à la fois via 6 répartiteurs nationaux équipés de ces super-congélateurs puis 400 centres pharmaceutiques, et via une centaine d’hôpitaux. Les problèmes se multiplient, avec des retards de la part des transporteurs, de trop nombreux centres à approvisionner et un mauvais fonctionnement qui n’est pas sans rappeler la catastrophe des masques coincés dans les entrepôts de Santé publique France au printemps dernier.

Les doses ne sont pas non plus livrées par département en assez grande quantité, ce dont même les élus de droite – pourtant premiers sur la liste des fossoyeurs de l’hôpital public – se sont émus. Le maire LR de Neuchâtel a ainsi dénoncé dans la presse une organisation ne leur ayant permis de recevoir que 32 doses par jour, pour une ville de 5 000 habitants dont plus de 1 000 âgés de plus de 70 ans

Pendant ce temps, les personnes âgées qui tentent de prendre rendez-vous pataugent seules. Certaines n’ont pas internet ou sont isolées et donc dans l’impossibilité d’utiliser les plateformes en ligne. D’autres essaient de joindre les centres débordés par téléphones, sans succès. À Montpellier, par exemple, certaines témoignent avoir essayé d’appeler en vain les sept centres de vaccination que compte la ville et son agglomération, dépitées qu’on leur demande de se faire vacciner sans même pouvoir prendre rendez-vous.

C’est une véritable détresse dans laquelle la désorganisation de la stratégie vaccinale du gouvernement plonge ces personnes de plus de 75 ans, celles-là même qui risquent beaucoup face à un rebond de l’épidémie qui pourrait venir de ses variants plus contagieux. Pour ces personnes, le nombre de semaines voir de mois avant d’obtenir un créneau de vaccination est une véritable question de vie ou de mort.

Pour rattraper son retard, le gouvernement lance en catastrophe une campagne de vaccination grand public et s’imagine qu’il suffit de proclamer « allez-y, prenez des rendez-vous allez-vous faire vacciner »… alors même que les doses ne suivent pas et que la logistique s’enraye. Tout comme pour les tests, cette façon d’ouvrir les vannes sans planification et sans réelle organisation de la vaccination débouche sur une situation chaotique, où le cynisme le dispute à l’incompétence.

Pour une véritable stratégie de vaccination

Pour généraliser rapidement la vaccination, comme le proclame en l’air le gouvernement, il faudrait mobiliser tous les moyens humains et matériels possibles.
Le processus logistique est certes complexe, notamment à cause des conditions de conservation du vaccin Pfizer, mais l’état d’impréparation dans lequel l’État fait face depuis des mois à la crise sanitaire est manifeste. Le gouvernement n’est pas plus à la hauteur qu’il l’a été pour les masques, les tests, ou le traçage des cas : il est nécessaire de prendre nos affaires en main pour mettre en place une véritable stratégie face à l’épidémie de coronavirus, car il en va de la santé de toutes et tous.

Des centres de vaccination efficaces ne pourront pas exister sans les compétences et les connaissances de ceux qui sont vraiment sur le terrain, c’est-à-dire les soignants : ce sont eux et elles qui doivent être au cœur d’une campagne de vaccination de grande envergure. Face à des gouvernements successifs qui n’ont eu de cesse de rogner sur les budgets et de supprimer les postes à l’hôpital, exigeons de véritables embauches et des moyens.

Alors que le gouvernement fait primer la logique du chiffre sur la réelle vaccination des personnes les plus vulnérables, l’auto-organisation de la population en lien avec les travailleurs de la santé permettrait d’organiser un large réseau pour contacter et recenser les personnes âgées souhaitant se faire vacciner, pour ne pas les laisser livrées à elles-mêmes face à la prise de rendez-vous.

Enfin, il est nécessaire de réquisitionner et mettre sous contrôle des travailleurs les laboratoires pharmaceutiques, d’en finir avec le monopole des brevets qu’ils gardent jusqu’ici jalousement pour sécuriser leurs profits. Les capitalistes et les gouvernements à leur service mettent notre santé en danger en pleine pandémie mondiale : ce n’est que par la base, démocratiquement, qu’il est possible de sortir de cette crise.

 
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