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8 de février de 2021 Twitter Faceboock

Birmanie. Un appel à la grève générale face au coup d’Etat militaire
Sara Yuki

Ce week-end, près de 100 000 Birmans sont sortis dans la rue pour contester le coup d’Etat orchestré par l’armée. Personnels de santé, ouvriers du textile et avocats ont cessé le travail, lançant un mouvement de grève générale inédit dans le pays. Ce sont les plus importantes manifestations dans le pays depuis 2007 et la “révolution de Safran”.

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Crédits photo : AFP

Le premier février, les militaires birmans se sont emparés de l’Hôtel de ville de la capitale et ont renversé la dirigeante Aung San Suu Kyi. Ils contestent les résultats des législatives qui ont eu lieu en novembre 2020. Pour mettre en place de nouvelles élections “libres et équitables” et examiner les scrutins des précédentes élections, un état d’urgence est décrété pour an. En réalité, c’est la possible perte de pouvoir de l’armée qui a entraîné ce coup d’Etat. En effet, ces nouvelles élections ont été gagnées par la Ligue Nationale pour la Démocratie dont le président Win Myint a émis l’idée de réformer la constitution. Le quart des sièges réservé à l’armée, et jamais soumis au vote, aurait été remis en question.

La population du Myanmar risque de voir des conséquences brutales sur ses libertés. Déjà, la semaine qui a suivi le coup d’Etat, l’accès à internet a été drastiquement réduit et l’accès aux réseaux sociaux tels que Twitter, Instagram ou Facebook (le principal outil de communication) est devenu presque interdit. Telenor, un des principaux opérateurs de télécommunication du pays a affirmé que les autorités avaient ordonné le blocage de Twitter et Instagram. Cependant de nombreux habitants ont eu recours à des VPN (logiciel permettant de modifier sa localité et échapper à certaines restrictions) et ont pu non seulement transmettre des informations à l’étranger mais surtout échanger entre eux pour organiser les différents rassemblements qu’a connu le pays ces derniers jours.

En effet, depuis samedi dernier, de nombreux rassemblements massifs ont eu lieu à travers le pays. “Le mouvement de désobéissance civile” lancé sur Facebook comptait quelque 150 000 abonnés le 3 février, soit trois jours après le coup d’Etat. Sur la page on pouvait lire “Honte à l’armée” et “les militaires sont des voleurs”.

Le mouvement de désobéissance civile a gagné l’ensemble de la Birmanie, ou le Myanmar, de son nouveau nom, avec d’immenses manifestations d’ampleur inédite depuis 2007 et la “révolution de Safran” au cours desquelles des dizaines de manifestants avaient été tués par des militaires. Ce sont des dizaines de milliers de Birmans qui sont sortis dans la rue ce week-end pour contester le coup d’Etat.

A Rangoun, la capitale économique du pays, ce sont des personnels médicaux de l’hôpital général qui se sont réunis en signe de protestation, levant trois doigts à l’image des manifestants à Hong Kong et en Thaïlande. Les médecins et les professionnels de santé font partie des premières lignes de la contestation. Portant des rubans rouges, ils refusent de travailler, sauf urgence médicale. Du côté des étudiants, on a pu voir près de 3 000 manifestants, selon AFP, défiler près des universités avec des masques, des foulards et des bracelets rouges, couleur du parti de d’Aung San Suu Kyi.

Les personnels médicaux ne sont pas les seuls à cesser le travail, ils sont rejoints par des avocats et des fonctionnaires de plusieurs ministères de la capitale Naypyidaw. La population entière sort le soir dans la rue pour taper sur des casseroles dans le but “d’éloigner les démons”, à comprendre les militaires. Mais surtout, ce week-end est marqué par l’arrivée dans le mouvement des ouvriers d’usine, de secteurs textile et des transports composés en partie de travailleurs jeunes et précaires et de moines, ce qui est une première depuis 14 ans. Dans ce pays à 90% bouddhiste, le soutien des manifestants par les moines est révélateur de l’ampleur du mouvement. Par ailleurs, de nombreuses familles ont affiché des autocollants rouges à leurs fenêtres en soutien au parti de l’ex dirigeante, destituée par le coup d’Etat, et du général Min Aung Hlaing.

C’est donc un réel mouvement de grève générale qui se met en place et qui s’étend dans toutes les grandes villes du pays. À Rangoun, ce sont 100 000 personnes qui se sont rassemblées devant l’hôtel de ville, où un très grand dispositif policier anti-émeute a été mis en place. À Kawthaung, la ville la plus au sud du pays, les manifestants scandent « respectez notre vote ! A bas la dictature ! ». Des agents de l’AFP rapportent une forte répression avec l’utilisation de canons à eau. Du côté de la ville frontière avec la Thaïlande, Myawaddy, des heurts ont eu lieu dimanche, la police a tiré sur les manifestants avec des balles en caoutchouc.

Si les manifestations sont généralement peu réprimées, l’armée multiplie les arrestations comme pour Win Htein, un proche d’Aung San Suu Kyi qui a déjà passé une vingtaine d’années en prison de 1989 à 2010. Par ailleurs, les policiers, protégés par des boucliers anti-émeutes, placent des fils barbelés pour bloquer les routes et des canons à eau pour repousser les manifestants.

La population peut s’attendre à un durcissement de la répression dans les prochains jours. À l’international, de nombreux pays se positionnent contre ce coup d’Etat comme les Etats Unis, eux-mêmes responsables de l’appui à de nombreux coups d’Etats. Ce n’est pas non plus du côté du parti d’Aung San Suu Kyi, qui cherche depuis longtemps à conclure des accords avec des pactes avec l’armée et qui est complice du génocide des Rohingyas, que la solution viendra, d’autant qu’il est resté passif depuis le premier février. Seule une mobilisation dans la rue des travailleurs et de la jeunesse pourra constituer une riposte à la junte qui se met en place.

 
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