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La Izquierda Diario
21 de avril de 2021 Twitter Faceboock

DES INNOCENTS EN PRISON, DES COUPABLES EN UNIFORMES
Viry-Châtillon : des PV tronqués et deux jeunes innocents en prison pendant 18 mois et 4 ans
Erell Bleuen

Une enquête de Médiapart concernant le procès Viry-Châtillon révèle que les policiers en charge des interrogatoires ont falsifiés les procès verbaux, poussant des jeunes garçons innocents en prison.

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Le procès de Viry-Châtillon continue de faire parler de lui. Pour rappel, le 8 octobre 2016, deux voitures de police avaient été attaquées par une vingtaine de jeunes dans le quartier de la Grande-Borne, qui avaient tiré des cocktails molotovs sur les véhicules, brûlant grièvement deux policiers. Le verdict de cette affaire, rendu par la cour d’assises le week-end dernier, a acquitté huit des 13 jeunes étant sur le banc des accusés, et en a condamné cinq à des peines allant de 6 à 18 ans de prison, reconnus coupables de « tentative de meurtre sur personnes dépositaires de l’autorité publique ». Le rendu du procès a fait vivement réagir le syndicat Alliance, qui a dénoncé le « laxisme » judiciaire et appelé à des rassemblements devant plusieurs commissariats ce mardi 20 avril, pour s’opposer aux acquittements prononcés par la justice.

Seulement, une enquête de Médiapart, qui a pu avoir accès aux enregistrements des auditions de deux prévenus, révèle le véritable scandale de cette affaire. Les policiers ont en effet tronqués les procès-verbaux afin d’en éluder les éléments pouvant prouver l’innocence de Foued* et Dylan*, qui ont été envoyé en prison sans avoir commis aucun crime. Le premier y est resté plus de quatre ans, le second 18 mois. L’enquête révèle les nombreux éléments manquants aux PV, comme les justifications d’innocence, les mises hors de cause par d’autres prévenus, mais également les méthodes d’interrogatoires des policiers, qui vont des pressions aux injures parfois racistes. Elle atteste tristement d’une méthode répandue dans la police, à savoir la falsification pour faire passer un innocent pour un coupable, qui témoigne à elle seule de l’impunité dans laquelle agisse les policiers.

Foued a été acquitté après avoir fait quatre ans de prison, sans aucune preuve contre lui. Pourtant, durant ces 10 heures d’interrogatoire, il a clamé «  à plus de cents reprises » son innocence et a été disculpé par un autre prévenu dans une autre audition. Mais les policiers, qui le pousse à avouer à de multiples reprises, en le qualifiant de « pauvre gars », en le giflant, ne mentionnent par la suite aucun de ses éléments dans leurs comptes-rendus. Ce qui ressort du procès-verbal, ce sont des doutes qui Foued a émis, le troisième jour de sa garde à vue, doutes qui lui ont été glissés à l’oreille par son avocat commis d’office. Celui-ci le convainc qu’il a pu faire un « black out » et qu’il aurait pu participer sans sans souvenir, faisant qu’il finit par répondre à une question en disant « je ne m’en souviens pas une seconde si je l’ai faite ou pas ». Cette phrase, qui sera retenue, suffira pour le faire incarcérer pendant plus de quatre ans. Yaël Scemama, son avocate, raconte : « Il s’agit tout simplement de procès-verbaux tronqués. Ne sont gardées que quelques réponses qui, sans explication, peuvent être interprétées comme des éléments à charge. Alors que Foued répète plus de cent fois qu’il n’a pas participé aux violences, qu’il ne connaît pas les auteurs, il ressort du PV dressé qu’il ne se rappelle pas y avoir participé !  » Foued a accepté de témoigner pour Médiapart, expliquant qu’il a eu « le malheur d’être de la cité de Grigny-La Grande Borne », et que lors de son interrogatoire, les policiers « ne cherchaient pas les coupables mais des coupables ».

Le deuxième interrogatoire auquel Médiapart a pu avoir accès, c’est celui de Dylan, qui a eu le malheur de se trouver dans le quartier lors de l’attaque. Il sera incarcéré pendant 18 mois, alors même que pendant l’interrogatoire, l’un des policiers déclarait à son collègue : « Je reste convaincu que, lui, il n’a pas participé ». Mais pourtant, Dylan se verra proposer un « marché » par les policiers, pour lequel ils expliquent à Dylan qu’il doit « prouver sa bonne foi » en confirmant les accusations de policiers. Son téléphone sera borné, mais on lui répondra que cela « joue en sa défaveur », il plaidera son innocence à multiples reprises, et on lui rétorquera que «  parfois, c’est le coup du sort. On est au mauvais endroit au mauvais moment, ça arrive à tout le monde ». Tous ces éléments n’apparaissant pas sur le procès-verbal, il est accusé d’avoir été au minimum informé de l’attaque, et soupçonné d’y avoir participé.

Si l’enquête de Médiapart révèle les faux édifiants réalisés par les policiers dans le cadre de l’affaire Viry-Châtillon, elle met en lumière une pratique récurrente au sein de la police, qui pousse consciemment des innocents en prison. Car si les deux garçons ont ici été acquittés, de nombreux innocents doivent actuellement croupir en cellule parce que la police avait besoin de coupables. Cela rappelle notamment le cas de Michel Zecler, dont l’interpellation violente, si elle n’avait pas été filmée, l’aurait peut-être emmenée en prison. Alors qu’actuellement le gouvernement Macron opère un énième tournant sécuritaire, cherchant à renforcer les effectifs de police, mais aussi leurs prérogatives et par ça, leur impunité, il est nécessaire de continuer à se battre pour que la vérité soit rétablie sur toutes ces affaires judiciaires, où les innocents sont emprisonnés, et les coupables conservent leurs uniformes.

 
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