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1er de juin de 2021 Twitter Faceboock

Etat d’urgence permanent
Loi antiterroriste. Une nouvelle offensive liberticide commence à l’Assemblée nationale
Belkacem Bellaroussi

L’érosion continue des libertés individuelles au nom de la lutte contre le terrorisme connaît aujourd’hui une nouvelle accélération. L’Assemblée Nationale examine à partir du 1er juin le texte faisant entrer dans le droit commun des mesures d’exception de l’état d’urgence.

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Crédit Photo : AFP

Ce pourrait être la 36ème loi antiterroriste adoptée par le parlement depuis 1986. Ce mardi 1er juin commençait l’examen à l’Assemblée du projet de loi relatif à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement. Composé de 19 articles, il vise à renforcer et à entériner des mesures qui étaient dans la loi renseignement de 2015 et de la loi sécurité intérieure et de lutte contre le terrorisme (SILT) de 2017, qui arrive à terme en juillet.

Adoptée en 2017 sous le premier gouvernement Philippe, la loi SILT tendait à pallier la levée de l’état d’urgence décidé en 2015 suite aux attentats du 13 novembre en inscrivant ses principes majeurs dans le droit commun jusqu’au 31 juillet 2021. Avec cette possible inscription dans le droit commun de nouvelles mesures de l’état d’urgence, la France met un pied de plus dans un régime d’exception permanent, qui avait commencé en 2015 avec l’état d’urgence et qui s’est ancré peu à peu avec l’intégration dans le droit commun de nombreuses prérogatives de celui-ci dans le cadre de la loi « anti-terrorisme » d’octobre 2017.

Une attaque contre les libertés individuelles et démocratiques

La loi SILT de 2017 permettait ainsi l’installation de périmètres de sécurité hors état d’urgence dans un lieu ou pour un événement « exposé à des risques d’actes de terrorisme en raison de sa nature et de l’ampleur de la fréquentation » où les fouilles de sacs, d’individus et de véhicules seraient autorisées. Suite à l’adoption de la loi, ces prérogatives policières ont donné lieu à une utilisation tout à fait détournée par la suite. Par exemple, son utilisation lors de manifestations pour arrêter des militants que l’on suspectait de participer à des actions violentes a donné lieu à la multiplication de gardes à vue de militants pacifiques, comme l’avait souligné Amnesty International dans son rapport sur le droit de manifester->https://www.amnesty.fr/liberte-d-expression/actualites/droit-de-manifester-en-france]. Le nombre de manifestations interdites a lui aussi décuplé depuis l’adoption de cette loi, et encore plus depuis l’état d’urgence sanitaire prononcé en 2020.

Une autre des dispositions de ce nouveau projet de loi, reprise de la loi SILT de 2017, est la possibilité de contraindre une personne à ne pas sortir d’un périmètre donné pendant trois mois renouvelable, avec obligation de pointage. Ces mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (Micas) peuvent être prises sans procès, par simple suspicion ou « comportements [constituant] une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre public ». Là encore, depuis 2017, elles ont aussi été utilisée de façon totalement détournée. Ainsi, comme le note la mission parlementaire ayant suivi le recours au Micas, seulement un tiers des personnes visées ont fait l’objet d’une condamnation pour terrorisme. Le nouveau projet de loi viendra durcir encore ces mesures préventives..

Ce qui se passe sur Internet sera aussi désormais scruté. Ainsi parmi les mesures examinées, on retrouve celle qui pérennise l’usage des « boîtes noires », chargées de détecter les menaces terroristes à l’aide de données de connexion des utilisateurs, en étendant par ailleurs leur usage. En effet, Gérald Darmanin a précisé sur France Inter que les adresses universelles sur le réseau (URL) des sites internet seraient désormais collectées et traitées par les algorithmes des boites noires pour traquer la moindre connexion d’utilisateurs d’Internet. Le gouvernement souhaite donc désormais accéder à toutes ces données pouvant faire état de la privée de chacun dans les moindres détails au nom de la lutte contre le terrorisme.

Enfin, parmi ces mesures, on retrouve la possibilité pour le gouvernement de fermer des lieux de culte et des locaux par simple suspicion, encore une fois, de lien avec le terrorisme.

Ces mesures constituent donc une atteinte grave aux libertés individuelles et démocratiques. Au regard des pouvoirs accrus qu’elles donnent à la préfecture et du ministère de l’Intérieur, elles veulent dire une chose très claire : désormais, c’est la police qui fait la loi.

Instrumentaliser le terrorisme à des fins sécuritaires

Pour l’avocat Vincetn Brengarth interrogé par le journal Le Monde, « la persistance de la menace terroriste montre que les outils administratifs ne permettent pas le risque zéro ». Pourtant, dénonce-t-il, c’est au nom de cette politique de prévention que l’on « institutionnalise une pratique du droit dans laquelle le soupçon finit par remplacer les exigences probatoires. Être suspecté est déjà une forme de culpabilité, y compris devant le juge des libertés de la détention chargé d’autoriser les perquisitions administratives ».

Ce projet de loi s’inscrit donc dans le projet sécuritaire et islamophobe en marche depuis le début du mandat de Macron, dans l’optique de renforcer l’arsenal répressif de l’État en vue des prochaines explosions et des prochains affrontements sur le terrain de la lutte des classes, après le mouvement des Gilets Jaunes, la grève contre la réforme des retraites et le mouvement contre les violences policières. Il s’inscrit dans la droite lignée de la Loi Séparatisme, loi ouvertement islamophobe, et de la Loi Sécurité Globale, qui vise à renforcer l’arsenal policier ainsi que l’impunité policière. Par toutes ces réformes, le gouvernement se prépare au combat et assure ses arrières de manière à pouvoir faire passer toutes ses réformes antisociales futures.

L’opposition parlementaire de gauche au gouvernement Macron a fait montre de son inconséquence, pour ne pas dire sa complicité dans ces derniers mois pour lutter contre l’offensive islamophobe et sécuritaire au Parlement. Le groupe communiste aura en effet participé au durcissement des lois Séparatisme et Sécurité Globale en s’abstenant et en votant pour certaines des mesures. Du côté du PS, c’est au même spectacle que nous avons pu assister.
La France Insoumise de son côté, après avoir voté 40% des textes proposés dans la loi Séparatisme, aura finalement voté contre ce texte de loi.

Dans ce contexte, il est impératif de dénoncer et de combattre dans la rue toutes ces lois antisociales, racistes et liberticides, et que l’ensemble des organisations politiques et syndicales s’attellent à organiser la riposte contre cette nouvelle « loi des suspects ».

 
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