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La Izquierda Diario
9 de juin de 2021 Twitter Faceboock

Nous ne paierons pas leur crise !
Face au mépris de la direction, les salariés de Daher en grève pour l’augmentation des salaires
Violette Renée

Ce mardi, les salariés de Daher aéronautique à Toulouse se sont mis en grève pour demander une augmentation plus importante de salaire lors des NAO, initialement prévue à 0,6 %, et une amélioration des conditions de travail. 80 % des salariés ont répondu à l’appel de la mobilisation, qui s’est poursuivie jusqu’à ce mercredi.

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Source photo : Révolution Permanente

Daher, qui avait répondu à l’appel d’offre d’Airlog en 2018, a pris possession de ses entrepôts. Depuis, les salariés sont unanimes : leurs conditions de travail se sont dégradées années après années. Les nouveaux entrants n’ont plus le droit ni aux jours d’ancienneté ni à la prime de vacances, les deux ayant été relégués dans une clause de compensation. Présent ce matin, un gréviste travaillant sur le site de AirLog 1 est revenu pour nous sur la situation dans l’entreprise : « On est en grève aujourd’hui par rapport à nos conditions de travail et nos augmentations de salaires, qui sont ridicules en tout point »

A l’arrivée de la crise Covid, Daher a decidé de supprimer 643 postes et de renvoyer de 1700 intérimaires. Sur le site de Toulouse, 10 départs volontaires ont été orchestrés après un rabâchage constant et des mensonges - quant aux débouchés sur le marché de l’emploi et sur les formations - de la part de la direction, ce qu’un gréviste n’a pas manqué de dénoncer. Mais au niveau des intérimaires, la crise a été un véritable massacre : une élue CGT nous racontait qu’avant la crise, les intérimaires représentaient plus de 50% des travailleurs du site, contre à peine 2% aujourd’hui ! De plus, les salariés de Daher, qui ont été en première ligne de la crise Covid et n’ont pas cessé de travailler, se sont fait promettre une prime covid qui n’est finalement jamais arrivée.

L’augmentation salariale ridicule de 0,6% lors des Négociations Annuelles Obligatoires (NAO) - cette dernière avait été de zéro en 2020 sous couvert de crise sanitaire - ainsi que la prime de participation aux bénéfices qui s’élève au montant méprisant de 7 euros, ont été les deux gouttes d’eau qui ont fait déborder le vase. Les grévistes toulousains ont été d’ailleurs motivés par une mobilisation similaire sur le site Daher de Saint-Nazaire qui a été victorieuse, réussissant à obtenir une augmentation de salaire de 55 euros par mois. Cette bataille a non seulement servi d’exemple à Toulouse, mais également à Saint-Aignan, où les salariés se sont mis en grève le 2 juin dernier. A échelle plus large encore, après une période marquée par une première vague de licenciements et un arrêt partiel de l’activité, la situation dans le secteur aéronautique est désormais marquée par une stagnation et une baisse de salaires, qui se couple à une augmentation de cadences suite à la reprise. Un contexte qui ouvre le terrain à des luttes pour les salaires à l’image de celles qu’on voit chez Safran, Airbus, Dassault, et aujourd’hui chez Daher à Toulouse.

« On est pas des chiens » s’exclamait alors une gréviste présente sur le parking du site Airlog 1. Après l’écrémage salarial au sein de l’entreprise « on fait le boulot de 2 ou 3 salariés » explique un gréviste, « il nous demande d’être plus polyvalent, mais aussi une augmentation des cadences tout ça pour 10 euros alors qu’en plus l’entreprise a reçu beaucoup d’aides de l’État » raconte un autre.

Les aides de l’État versées à Daher ont en effet été très importantes. Daher a bénéficié de 170 millions d’euros de prêt garanti par l’État, de nombreuses subventions par les collectivités territoriales. L’entreprise a donc pu engendrer des bénéfices malgré la crise sanitaire, tout en licenciant et en faisant des gains de productivité pour faire payer les travailleurs et ne pas avoir à mettre la main à la poche ! Face à l’argument de difficultés financières ou du risque de faillite que brandit systématiquement le patronat pour faire passer ses attaques, les travailleurs devraient toujours revendiquer la possibilité de pouvoir regarder les comptes de leurs entreprises, les profits et les bénéfices engrangés lors des dernières années. Les salariés ne doivent pas adapter leur niveau de vie à la soif de rentabilité du patronat comme le prétendent certaines directions syndicales, qui déguisent les conséquences de la crise en fatalité pour les travailleurs.

Cette grève, appelée par la CGT le matin même, après les premiers résultats des NAO a rencontré un énorme écho parmi les salariés, témoignant de la colère existante parmi les travailleurs. Selon la CGT, la journée de grève du mardi 08 juin a rassemblé 110 salariés sur le piquet de grève sur les 200 salariés que regroupent de plusieurs sites Airlog 1, Airlog 2 et Cornlog, avec un taux de grève d’environ 80% des salariés ! Le deuxième jour de grève a rassemblé quelques 80 salariés pour un taux de grévistes similaire. La direction a d’ailleurs tenté de casser la grève en transférant des salariés d’autres sites pour qu’ils fassent la réception à la place des grévistes. Cette manœuvre de la direction montre qu’elle a peur, elle qui a déjà plié face à la grève des travailleurs de Saint-Nazaire. L’enjeu était gros pour le patronat, qui craint plus que tout une contagion des mouvements dans tout le secteur.

Kynou, un gréviste, est revenu pour nous en détails sur les conditions de travail : « « c’est du foutage de gueule depuis trop longtemps ! »

Finalement, comme on a pu observer dans de nombreux PSE ou APC dans le secteur, les syndicats CFDT et le CFTC ont promis la signature du NAO suite aux négociations avec la direction au siège de Paris, et ce contre l’avis des grévistes : « Ils ont pris leur décision sans avoir pris l’avis des salariés » dénonce un des grévistes.

Comme nous l’expliquions dans un article récent, après les suppressions d’emploi, les salariés du secteur aéronautique font face à une surcharge du travail, et certains sont même réembauchés avec des conditions inférieures . Cette dégradation profonde des conditions de travail, qui va à l’encontre de toutes les prévisions optimistes pour le secteur, ne tombe cependant pas de nul part. Elle est la conséquence directe de la compromission de certains syndicats qui ont accompagné les récents plans de licenciements, et qui ont donc laissé la voie libre à l’offensive patronale. Pour éviter que l’avenir des salariés soit à nouveau décidé par en haut, comme le dénoncent les grévistes de Daher, et vendu dans des cadres du « dialogue social », la grève doit appartenir aux grévistes !

Comme l’explique Gaëtan Gracia, syndicaliste dans l’entreprise sous-traitante de l’aéronautique les ateliers de la Haute-Garonne et militant à Révolution Permanente, « le moyen de se défendre de cela est de faire des assemblées générales pour que la grève appartienne aux grévistes. C’est-à-dire que tous les syndiqués de n’importe quel syndicat et les non syndiqués, tout le monde vient à ses assemblées pour décider ensemble de nos revendications, de comment on lutte et de comment on les impose ».

 
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