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La Izquierda Diario
8 de juillet de 2021 Twitter Faceboock

La transphobie tue
Transphobie en direct sur Quotidien, le CSA cautionne
Gabriella Manouchki

Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, saisi suite à l’intervention polémique de la psychanalyste Elisabeth Roudinesco sur le plateau de Quotidien en mars dernier, vient de rendre sa décision quant aux propos transphobes qu’elle a tenu à l’antenne : ils « s’inscrivaient dans le cadre d’un débat d’intérêt général sur la transidentité ». Une illustration supplémentaire de la transphobie structurelle.

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Le 10 mars dernier, la psychanalyste et historienne Elisabeth Roudinesco était l’invitée de Yann Barthès dans l’émission Quotidien pour faire la promotion de son livre, intitulé Soi-même comme un roi, essai sur les dérives identitaires. Si le titre de son ouvrage laisse présager une analyse réactionnaire de la question de l’identité, cela s’est confirmé lorsqu’elle a expliqué à l’antenne : « Il n’y a pas un troisième sexe. Il y a une bisexualité. Il y a un genre. Le transgenre a été inventé à partir de personnes qui avaient des problèmes avec l’identité. Ce qu’on a appelé le transexualisme. Il ne faut pas les discriminer. Ça existe. Mais je trouve qu’il y a un peu une épidémie de transgenres. Il y en a beaucoup trop ». Suite à une vague de dénonciation de ces propos transphobes sur les réseaux sociaux, le CSA a été saisi pour se prononcer sur leur caractère discriminatoire ou non, pouvant engager le cas échéant la responsabilité de la chaîne de télévision TMC.

Près de quatre mois plus tard, ce mercredi 7 juillet, le CSA a rendu sa décision : il a « observé que ces propos s’inscrivaient dans le cadre d’un débat d’intérêt général sur la transidentité, notamment des mineurs […] S’ils ont pu être considérés comme inappropriés par certains téléspectateurs, il n’apparaît pas, au vu de l’ensemble des échanges, que leur auteure ait entendu encourager à des comportements discriminatoires envers les personnes transgenres ».

Pourtant, il est évident que parler d’une « épidémie de transgenres » et estimer qu’il y a « beaucoup trop » de personnes trans relève d’un discours oppressif et discriminant à l’encontre de ces dernières. Plus largement, ces deux expressions qui ont choqué sur les réseaux sociaux prennent place dans des considérations profondément réactionnaires, qui s’inscrivent dans le courant gender critical qui se développe à l’international, notamment aux États-Unis et au Royaume-Uni, autour de l’idée que le genre comme le sexe, réduits à une question biologique, ne peuvent être que binaires et que, par conséquent, les personnes qui s’identifient comme trans seraient malades, voire dangereuses pour la société. La mobilisation du concept de « transexualisme » par Roudinesco n’est à ce titre pas anodine : il renvoie à une conception pathologisante de la transidentité, admise dans le monde académique jusque dans les années 1990 et fermement combattue par les mouvements féministe et LGBT. Revendiquer un tel concept est profondément réactionnaire, alors même que la transidentité n’a été retirée de la classification des troubles mentaux de l’OMS qu’en 2019. Dans le contexte français, le développement de tels courants, y compris à gauche comme c’est le cas pour Roudinesco qui a milité au PCF puis au PS, se fait nécessairement en alliance avec l’extrême-droite qui partage ce genre de conceptions, comme le montrent régulièrement les publications de Valeurs Actuelles.

La transphobie tue, comme le montrent les cas tragiques des suicides de Douna et de Fouad. Le fait que des propos transphobes puissent être tenus en toute impunité sur des chaînes télé à large audience est rendu possible par une surenchère réactionnaire du gouvernement, qui a ouvert la voie au développement de thèses profondément patriarcales mais aussi racistes, comme celles portées par Roudinesco qui, sans surprise, milite aussi contre le port du voile en France. Cela illustre une nouvelle fois la nécessité pour l’ensemble de notre camp social de condamner fermement les actes et discours transphobes, sexistes et racistes aussi longtemps qu’ils surviendront, sur les plateaux télé comme dans nos propres luttes.

Lire aussi les articles de notre dossier RP Dimanche sur le mouvement LGBT.

 
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