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3 de juin de 2022 Twitter Faceboock

Université
Sorbonne. La Présidence obligée de reculer sur le contrôle du contenu des tracts syndicaux
Le Poing Levé Paris 1
Ariane Anemoyannis

Ce vendredi, le Conseil d’administration de Paris 1 Panthéon-Sorbonne se prononçait sur la révision du règlement intérieur de l’université. L’occasion pour la présidence d’y introduire un pouvoir de contrôle du contenu politique des tracts syndicaux. Une manœuvre finalement avortée sous la pression des élus étudiants et du personnel mais qui témoigne d’une offensive généralisée contre les libertés politiques à la fac.

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Ce vendredi 3 juin avait lieu une séance plénière du Conseil d’administration de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. À l’ordre du jour figurait notamment l’adoption de nouveaux statuts pour l’université ainsi qu’un nouveau règlement intérieur. Dans le projet de ce dernier, plusieurs articles y étaient modifiés sur diverses sujets dont la lutte contre les discriminations, l’utilisation de l’enseigne de l’université, ou encore la fin des CHSCT au profit d’un « Comité social d’administration ».

Si les rédacteurs dudit projet présentaient la démarche comme une simple formalité afin d’améliorer quelques formulations du règlement intérieur précédent, certains amendements proposés n’avaient pourtant pas un contenu aussi anodin mais constituait une véritable attaque concernant les libertés politiques et syndicales énoncées au chapitre 2.

La volonté de contrôler le contenu des tracts et du matériel syndical

En particulier, les conditions de diffusion de tracts par les associations étudiantes étaient largement modifiées par le projet de règlement intérieur. En effet, l’article 18 2) du projet stipulait que « la distribution de tracts en lien avec la vie universitaire est libre dans l’enceinte de l’Université ». Un ajout loin d’être purement formel dès lors qu’il visait à subordonner le principe de liberté de diffusion au fait que le contenu de ces derniers soit « en lien avec la vie universitaire ».

Une manière de restreindre drastiquement les sujets que les associations sont autorisées à traiter dès lors que cela ne permet pas d’inclure un certain nombre de problématiques qui ne sont pas exclusivement estudiantines. Ainsi, le contenu climatique, féministe, antiraciste ou les tracts portant sur des mouvements sociaux en dehors de l’enceinte de l’université sortent de facto du cadre imposé par le projet de règlement intérieur. Autrement dit, sous l’empire de ce règlement intérieur, la dénonciation des lois sécurité globale et séparatisme, la lutte contre les violences policières ou les féminicides, ou encore la solidarité avec le peuple ukrainien sous les bombes auraient pu être interdit.

Interpellé par Le Poing Levé sur cette question, la présidence s’est défendue de toute motivation liberticide en expliquant que les associations pourraient toutefois distribuer des tracts si jamais un projet de loi sur l’université était en discussion au parlement, ou se mobiliser pour organiser des activités de solidarité alimentaire par exemple. De quoi illustrer parfaitement l’offensive politique que représente cet ajout a priori anodin, où il reviendrait à la direction de l’université d’arbitrer ce qui est en lien avec la vie universitaire ou non.

Grâce aux interventions de plusieurs élus étudiants et du personnel, la présidente a fini par accepter de retirer du projet de règlement intérieur cet amendement liberticide. Une bonne nouvelle qui ne doit cependant pas laisser penser que la défense de nos droits et libertés syndicales et politiques est derrière nous. En effet, au-delà de cette formulation particulièrement problématique, c’est à une offensive d’ensemble que doivent se préparer les organisations de Paris 1.

Le renouvellement du règlement intérieur pour préparer un prochain quinquennat d’attaques sociales

Les modifications du règlement intérieur ne sont pas étrangères au contexte politique qui s’est aussi exprimé dans les universités ces derniers mois. En effet, les jeunes ont fait partie des secteurs les plus mobilisés face aux offensives sécuritaires et liberticides du gouvernement et ont manifesté massivement pour l’urgence climatique ou les droits des femmes et personnes LGBTI+. Encore plus récemment, c’est à Paris 1 qu’ont eu lieu de grandes Assemblées générales étudiantes pour protester contre le second tour entre Macron et Le Pen et surtout contre ce qu’il incarnait comme perspectives d’avenir pour les nouvelles générations.

De quoi inquiéter sérieusement la présidence de l’université, qui a expliqué qu’il fallait éviter que « l’université se transforme en forum exclusivement politique », d’où les préoccupations sur le contenu des tracts mais aussi le droit de réunion. En effet, le règlement intérieur précise que « toute réunion dans les locaux de l’Université nécessite une autorisation du Président » (article 15). Déjà présente dans le règlement actuel, cette stipulation donne un pouvoir important à la direction qui peut empêcher toute réunion, que celle-ci soit d’ailleurs interne aux membres des organisations ou ouverte au public.

Plus largement, c’est la possibilité même de faire de la politique à l’université qui est remise en question dans la continuité des attaques de ces derniers mois. S’appuyant sur le Covid-19, de nombreuses directions d’université ont en effet généralisé un régime d’autorisation préalable à toute activité syndicale dans l’enceinte de l’université, allant jusqu’à interdire à la dernière minute des réunions politiques. Le projet de règlement intérieur – dont l’amendement sur le contenu des tracts a été enlevé avant adoption – s’inscrit dans cette continuité, tout comme la charte qu’a prévu de faire voter la présidence de Paris 1. Celle-ci conditionne par exemple la reconnaissance d’une association à l’approbation par la présidence de son activité sur internet et les réseaux sociaux, et vise à permettre sa suspension si elle contrevient à la « moralité » et l’ordre public.

Ainsi, outre l’abandon de l’amendement sur la distribution de tract, c’est à une véritable offensive politique et liberticide que devront s’affronter les organisations étudiantes, à Paris 1 et ailleurs, dans un contexte où Macron a prévu de s’attaquer à la jeunesse et au monde du travail pour les cinq années qui viennent. En effet, de la capacité des organisations à faire de la politique au sein de l’université dépendra notamment les possibilités du mouvement étudiant à jouer un rôle dans la bataille contre le nouveau gouvernement.

 
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