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15 de juin de 2022 Twitter Faceboock

"Il était réputé pour être très lourd, c’était de notoriété publique"
Tentative de viol : une troisième femme témoigne contre Abad, toujours protégé par Macron et Borne
Lisa Mage

Une nouvelle tentative de viol, de nombreux témoignages de la drague lourde jusqu’au harcèlement sexuel. C’est ce que dévoile Mediapart, détruisant encore un peu plus la défense de Damien Abad, toujours ministre et candidat aux législatives grâce au soutien sans faille de Macron et de Borne.

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Crédits photo : Ludovic MARIN/AFP

Mediapart publiait hier une nouvelle enquête concernant les violences sexuelles commises par l’actuel ministre des Solidarités, déjà accusé de viol ou de tentative de viol par deux femmes dont le journal en ligne a déjà recueilli et publié les témoignages. Ces accusations paraissent dans le contexte de l’entre-deux tours, où la macronie est déjà mise à mal par la perspective quasi-certaine d’une majorité relative. S’ajoute à cela une nouvelle accusation à l’encontre de Damien Abad, qualifié au second tour des élections dans l’Ain, ce dernier a par ailleurs précisé] : « Ça ne me déstabilisera pas, je continuerai à faire campagne. »

L’enquête révélée par Mediapart dévoile le témoignage d’une élue centriste qui dénonce une tentative de viol en 2010 : « Aujourd’hui, je ne peux plus me taire. Si je parle, c’est pour que ça s’arrête, qu’il ne recommence plus ». Cette dernière explique que cela fait « plus de 10 ans » et qu’elle tente « d’oublier tout ça ». Mais, quand elle a vu que deux autres femmes accusaient Abad de viols, dans la même période ou elle a, elle-même, été agressée, elle dit s’être sentie coupable et a donc décidé de dénoncer son agresseur.

Une nouvelle accusation de violences sexuelles à l’encontre du ministre des Solidarités

En 2009, la jeune femme est à la tête d’une fédération départementale des Jeunes Centristes, dont Damien Abad est le directeur national. Il vient d’être élu député européen. L’ascendant psychologique et l’autorité morale qu’il avait sur elle sont donc indéniables. Et Damien Abad en use pleinement.

Cette élue décrit, tout d’abord, dans le mouvement, un climat « malsain » et sexiste ou les femmes n’étaient réduites qu’à des « atouts de communication ». 

Elle décrit un Damien Abad très problématique  : « au début, ça restait correct. Ça a vrillé lorsqu’il est devenu député européen. Il est tombé dans un sentiment de toute-puissance et d’impunité permanente ». Il lui aurait, par la suite, proposé des « visites nocturnes en tête-à-tête » au Parlement européen. 

L’élue centriste affirme aussi que, à maintes reprises, pour lui dire bonjour Abad lui faisait la bise et en profitait pour toucher sa poitrine et, lorsque cette dernière lui demandait d’arrêter, il se « réfugiait derrière son handicap ». « Il souriait, il disait que ce n’était pas de sa faute, il montrait ses mains. Parfois, il disait : “Je suis désolé, c’est parce que tu as des gros seins aussi, c’est compliqué” », affirme-t-elle.

La femme dénonce des faits d‘attouchements et de harcèlement sexuel. Damien Abad lui aurait, entre autres choses dit, durant une soirée où il était alcoolisé : « je veux te baiser » et il aurait, par la suite insisté pour qu’elle le « rejoigne dans sa chambre ». Brigitte Fouré, actuelle maire d’Amiens, était présente à cette soirée, elle témoigne de ce « comportement indécent ». De plus, cette dernière explique que, de par la position de Damien Abad, à savoir directeur des Jeunes Centriste, le repousser était difficile. Un mode opératoire qui ressemble trait pour trait aux témoignages des deux autres victimes.

De plus, la plaignante dénonce un autre fait datant de 2010, où Damien Abad l’aurait invité chez lui pour une soirée. Soirée durant laquelle, elle dénonce l’absolue impunité par laquelle ce jeune politicard se sentait déjà protégé. Une voisine serait venue se plaindre du bruit et se serait vue rétorquer : « qu’elle n’avait qu’à aller voir Hervé Morin [alors ministre de la Défense de Sarkozy et président des Centristes] et que lui, de toute manière, était protégé par son immunité parlementaire ». 

Autre élément similaire avec l’un des témoignages déjà connus, lors de cette soirée Abad lui aurait « offert un verre », au fond duquel elle aurait vu « quelque chose ». « Je ne savais pas ce que c’était, j’étais méfiante étant donné son comportement passé ». Après être allée « recracher » sa gorgée aux toilettes, le député l’attendait devant la porte ! Elle raconte que tout s’est passé « très vite », qu’il l’aurait « poussé dans une pièce en face ». « On aurait cru qu’il était dans un film hard ». L’élu centriste précise ainsi que Abad lui aurait dit des « insanités » : « tu vas la sentir passer, elle est énorme » ou encore « vas-y suce-moi » avant de pousser sa tête vers son entre-jambe. 

La jeune femme explique avoir été surprise par la force de Abad : « Ma tête était coincée sous son bras et contre son torse, je ne pouvais pas me défaire, j’avais peur, j’étais sidérée. Je me suis débattue, je l’ai frappé dans le ventre », assure-t-elle.

Ce témoignage choquant est complété par des témoignages de nombreuses femmes qui évoquent de la drague très lourde, des SMS et des invitations à venir le voir tard le soir très appuyés (déjà relevés dans les précédents témoignages), à l’image d’une femme élue Miss Pays de l’Ain qui a dû refuser les avances téléphoniques de Damien Abad pendant 5 ans d’échanges par SMS.

Les différentes accusations mettent en lumière un mode opératoire commun et le sentiment de domination qu’avait Abad vis-à-vis de tout le monde, mais particulièrement des femmes. Une position de force qu’il aurait utilisée pour agresser et violer des femmes. 

« Tout le monde au sein du parti était au courant »

L’élue centriste précise s’être confiée, plus ou moins en détail, à beaucoup de personnes dont des cadres du parti. Mediapart a recueilli le témoignage de quatre élus et d’un militant auquel elle se serait confiée entre 2017 et 2020. Elle se rappelle aussi avoir été mise en garde contre le comportement de l’actuel ministre des Solidarités, et ce, particulièrement quand il avait bu. Ce comportement était donc connu par les militants et cadres du parti qui s’en amusaient, elle assure avoir été moquée par ces derniers : « Quand certains me voyaient, ils mimaient les mains en avant, et ça les amusait. Certains frottaient leurs mains sur mon bras en rigolant ».

De la même manière, un ancien assistant du groupe à Strasbourg témoigne : « Se défendre avec son handicap, moi, ça, ça ne passe pas ! Damien Abad dit des choses, moi j’ai été témoin du contraire, j’ai assisté à son comportement qui était plus que limite à l’égard des collaboratrices ». Il précise même : « Les assistant·es en parlaient souvent, tout le monde au sein du parti était au courant ».

Un gouvernement de l’impunité

Le 22 mai, au lendemain des révélations de Mediapart, la première ministre, Élisabeth Borne, déclarait : « Je peux vous assurer que s’il y a de nouveaux éléments, si la justice est à nouveau saisie, nous tirerons toutes les conséquences de cette décision. » « Sur tous ces sujets de harcèlement et d’agression sexuelle, il ne peut y avoir aucune impunité », avait-elle insisté.

Matignon a répondu à Mediapart mardi soir, après la publication de ce dernier article : « La première ministre ne peut pas se prononcer sur les témoignages anonymes que vous rapportez, mais elle invite ces femmes à porter plainte pour que la justice puisse faire son travail. Elle le fait en tant que première ministre, mais aussi en tant que femme. La justice est là pour recueillir leur parole, la police, les magistrats sont aujourd’hui totalement à l’écoute et c’est eux qui pourront permettre à la vérité d’être établie. »

Une déclaration on ne peut plus hypocrite quand on sait que pour 100 viols et tentatives de viols, il n’y a qu’une seule condamnation selon, mais qui est révélatrice de la réaction de la macronie, à savoir protéger des hommes accusés de viol à tout prix, que ce soit Abad ou Darmanin.

Mais aussi une manière commode d’enterrer les affaires et de se dédouaner totalement. Comme le racontait une victime de Damien Abad dans un témoignage précédent : « le fait de classer sans suite une affaire dédouane totalement l’accusé, comme s’il n’avait rien fait ». Cela dans les cas où la plainte n’est pas directement retournée contre les victimes, accusées, comme le sous-entend Damien Abad, de tentative de déstabilisation politique.

Un déni de plus en plus difficile à rendre crédible. Macron, l’hyper-Président qui contrôle tout, ne serait même pas au courant des rumeurs qui parcourent l’Assemblée Nationale. Des rumeurs qui avaient déjà cours au Parlement Européen à l’époque où Damien Abad y était élu. Une ancienne collaboratrice de Franck Riester (ancien LR qui a rejoint Macron, ministre sans interruption depuis 2018 et ministre délégué dans le gouvernement de Borne), déclare ainsi à Mediapart : « J’ai déjeuné avec Damien Abad, d’autres députés et collaborateurs parlementaires. On m’a dit : “Fais attention, il va t’ajouter sur Facebook et t’envoyer des messages déplacés.” Il était réputé pour être très lourd, c’était de notoriété publique ». Réputation pas usurpée, puisque plusieurs députés LR se souviennent avoir entendu un Damien Abad, alors chef de groupe LR à l’Assemblée s’adresser, ivre, en plein dîner, en ces termes à une collaboratrice : « Je voudrais te baiser », « je veux voir ta chatte ».

Mais Macron et Borne continuent de jouer l’étonnement et de soutenir sans faille le ministre.

C’est un soutien sans faille qui s’exprime de la part de la macronie envers un homme, accusé, aujourd’hui, par trois femmes différentes de violences sexuelles. Un gouvernement qui montre une fois de plus l’impunité totale dont jouissent les bourgeois, mais aussi son caractère profondément sexiste et patriarcale. Et ce, en dépit de la « grande cause du quinquennat Macron », à savoir l’égalité homme femme.

Construisons la lutte contre un système patriarcale et oppressif !

Tous les témoignages expriment une prise de parole encouragée par le mouvement #MeToo et l’accroissement du sentiment de solidarité entre les femmes qu’a créé ce mouvement. De nombreuses femmes témoignent aussi face à la défense scandaleuse invoquée par Damien Abad, Borne et Macron.

Dans la continuité du mouvement #MeToo, il faut continuer à défendre la parole des femmes dénonçant des violences sexistes et sexuelles, mais aussi lutter contre l’impunité totale dont leurs auteurs jouissent. Et ce, particulièrement lorsque, comme Abad, ces hommes possèdent des pouvoirs dans les plus hautes sphères de l’État.

Ces violences sexistes sont, comme le rappellent les plaignantes, systémiques et touchent tous les secteurs de la société. Chaque jour où des Damien Abad peuvent continuer à rester en poste, et à disposer de tous les leviers de pouvoir pour se défendre est une incitation au renoncement, et au silence pour les victimes. Macron et Borne sont les premiers complices de ce crachat envers les victimes d’agressions sexistes et sexuelles.

Nous ne pouvons faire confiance ni à la police, ni au gouvernement pour règlement lutter pour notre émancipation. La lutte féministe doit donc se construire en rapport avec le monde ouvrier pour lutter réellement contre un système oppressif et patriarcale, mais aussi contre tous les défenseurs de l’impunité, à commencer par le gouvernement !

 
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