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12 de septembre de 2022 Twitter Faceboock

Histoire du mouvement ouvrier
49 ans du coût d’État au Chili : les enseignements de l’expérience des Cordons industriels
Gabriel Muñoz

Ce dimanche marquait le 49ème anniversaire du coup d’État militaire de 1973 qui a signé le triomphe de la contre-révolution contre la poussée révolutionnaire au Chili. Retour sur l’expérience d’auto-organisation des Cordons Industriels.

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Cet article constitue une traduction de l’article de Gabriel Munoz pour La Izquierda Diario Chili.

Les années 1960 et 1970 ont été des décennies révolutionnaires dans divers pays du monde, dans lesquelles la France, le Vietnam, Cuba et le Chili ont été à l’avant-garde avec entre leurs mains la possibilité de secouer l’ordre capitaliste d’après-guerre. À cette époque, le militantisme révolutionnaire était une activité courante, considéré comme nécessaire à la transformation politique radicale de la société vers le socialisme.

Nous nous revendiquons de ces générations qui ont lutté à cette période. Cependant, il est nécessaire de tirer les bilans stratégiques de la défaite pour forger un parti révolutionnaire avec une stratégie pour gagner. A ce titre, l’exemple des Cordons industriels, organisme d’auto-organisation des travailleurs apparu pendant la poussée révolutionnaire chilienne, montre la voie pour surmonter la domination de la bourgeoisie. Il est donc nécessaire de souligner les apports et les limites de cette expérience.

Organismes d’auto-organisation territoriale de la classe ouvrière

Dans le cadre du processus chilien, les cordons industriels ont proliféré en réponse à la grève patronale d’octobre 1972 et aux tentatives de coup d’État des capitalistes et de l’impérialisme américain. Il s’agissait d’organismes territoriaux de coordination ouvrière et populaire. Chaque cordon était constitué d’un ensemble d’entreprises qui se coordonnaient autour de luttes communes dans une zone.

Avant le coup d’État, 31 cordons se formèrent, dont 8 dans la région métropolitaine. Ce sont les militants ouvriers du PS (parti socialiste du Chili) et du MIR (Mouvement de la gauche révolutionnaire) qui organisaient ainsi une partie importante de la classe ouvrière industrielle en l’espace d’un an. Les travailleurs étaient alors engagés dans une lutte contre la propriété privée, fondement du système capitaliste.

Face à la grève patronale d’octobre 72, ils répondent par exemple en étendant le contrôle ouvrier à des dizaines d’entreprises de la région métropolitaine et en résistant concrètement aux pénuries provoquées par le lock-out patronal et la grève des camionneurs. Ils se mobilisent ensuite contre la tentative de coup d’État de juin 1973 en prenant le contrôle d’entreprises dans toutes les villes industrielles, en cherchant à répondre aux pénuries et en se liant, de manière embryonnaire, aux secteurs populaires.

Il s’agit alors d’une forme unique de lutte ouvrière en Amérique latine, qui présente des similitudes avec les soviets des travailleurs russes en 1905 et 1917 ou les conseils ouvriers en Europe dans les années 1920 et 1930. Ces derniers étaient cependant plus avancés car ils ne visaient pas seulement le contrôle des centres de production ou de services, mais dominaient également la ville et étaient armés.

Les cordons industriels et les réactions du monde politique traditionnel

Les cordons industriels ont posé les bases d’un socialisme fondé sur la force de la classe ouvrière et exigé que le gouvernement de Salvador Allende avance, sans compromis, dans l’élargissant du domaine de la propriété sociale. En réponse, l’Union Populaire (UP) les a d’abord rejetés. Le parti principal, le Parti communiste, a désigné les cordons comme étant en « contradiction » avec la CUT (principale centrale syndicale), pointant du doigt les travailleurs en lutte comme responsables de troubles qui nuiraient à un gouvernement « populaire ». Pour le Parti communiste chilien, la « voie chilienne vers le socialisme » était une voie pacifique et de collaboration de classe, qui reposait sur l’idée qu’il était possible d’arriver au socialisme en réformant l’État bourgeois.

Bien qu’il se revendiquait du socialisme, le programme de l’UP portait une stratégie qui allait dans le sens contraire et désarmait la classe ouvrière pour affronter la réaction des bourgeois et de l’impérialisme. Le gouvernement de l’Union populaire était basé sur le respect et l’utilisation des institutions de l’État chilien (institution au service des groupes monopolistes, des propriétaires terriens et de l’impérialisme américain) et sur un projet national-étatique (donc capitaliste) de développement du pays. En ce sens, l’UP défendait une plus grande participation de l’État dans l’économie, le renforcement du secteur public, une nationalisation du cuivre négociée avec les entreprises américaines (négociation qui a toujours été rejetée par les sociétés minières transnationales) et la création d’une zone de propriété sociale basée sur le contrôle par l’État des entreprises monopolistiques, principalement industrielles.

Face à ce projet, les Cordons ont été la réponse de la classe ouvrière aux lock-outs et aux pénuries, inscrits dans une opération de sabotage du patronat pour affaiblir les secteurs populaires et le gouvernement de l’UP. Sans aucun doute, cette réponse, basée sur la lutte des classes et l’auto-organisation, était le moyen de faire face aux attaques de la droite. Mais le gouvernement d’Allende a préféré répondre par la formation d’un cabinet civico-militaire qui à donner encore plus d’espace à la droite.

Pendant que cette dernière préparait la contre-révolution, organisé par les généraux des forces armées, les Cordons industriels montraient la voie à suivre pour un réel affrontement. Cependant, conservant une confiance totale dans le gouvernement de l’UP qu’ils estimaient être le leur, ils se sont limités à exiger le renforcement de la « voie vers le socialisme », avec l’illusion réformiste profonde qu’il était possible de faire la révolution au travers des institutions de l’État, celles-là même qui ont finalement permis de préparer le coup d’État.

Les Cordons industriels étaient la véritable terreur des patrons du pays, de la Démocratie chrétienne (DC) et de la droite. C’est d’ailleurs contre eux que la répression militaire la plus dure a été dirigée, même avant le coup d’État du 11 septembre. Or, Salvador Allende, loin de renforcer les cordons, a vu en eux une force de déstabilisation de son gouvernement et a cherché à les démanteler et à les désarmer avec la loi sur le contrôle des armes ou la loi sur la restitution des entreprises à leurs patrons, ainsi que la politique d’arrêt de l’application du programme de l’Unité populaire.

Les réponses en juillet 1973 et la « semaine décisive »

En réponse au Tanquetazo, la première tentative de coup d’État du 29 juin 1973, toutes les industries ont été reprises et des barricades et des blocages ont été érigés en divers points stratégiques de la capitale du pays dans les régions de Cerrillos-Maipú, Vicuña Mackenna, San Joaquín et Santa Rosa. Vingt autres ont été prises en charge à Macul, en coordination avec des étudiants de l’université du Chili et de l’école pédagogique.

Le même jour, tous les Cordons et organisations populaires qui avaient surgi à ce moment-là se rassemblaient à La Moneda, sous les slogans de « fermer le Parlement national », « les travailleurs au pouvoir » et « créer un pouvoir populaire ». Mais le président Allende a alors appelé à la confiance dans les forces armées et au calme. Au cours du mois de juin, le cordon de Cerrillos Maipú a coordonné la saisie de terres avec des paysans et la population, tandis que la CUT appelait à affronter le coup d’État en soutenant les occupations d’usines et les blocages de routes.

La semaine entre le 29 juin et le 5 juillet a été appelée « la semaine décisive » par la presse ouvrière, car c’est à ce moment que la plus grande activité révolutionnaire de la classe ouvrière chilienne s’est déployée. 500 usines et fermes ont été occupées suite aux appels des cordons et de la CUT à résister au coup d’État. Dans les régions, les cordons se sont multipliées, préparant l’auto-défense contre le coup d’État, concoctant des bombes et rassemblant les quelques armes à feu disponibles. Des brigades et des comités de vigilance ont également été mis en place.

À Valparaíso, les syndicats de travailleurs, en coordination avec les communautés des alentours, ont même créé un comité militaire en contact avec les soldats qui avaient entendu parler d’une autre tentative de coup d’État pour la première semaine de juillet. Suite à ces événements, une réunion de la coordination métropolitaine des cordons se tenait le 24 juillet. Les cordons O’higgins, Vicuña Mackenna, Mapocho, Cordillera, San Joaquín, Recoleta, Cerrillos-Maipú étaient présents. Lors de cette réunion, le président du Cordon Vicuña Mackenna, le travailleur Armando Cruces, affirme : « nous luttons pour la conquête du pouvoir ».

Cette réunion répondait alors directement à une déclaration de Luis Figueroa, président de la CUT, qui soutenait la restitution des entreprises. Au cours de la dernière semaine de juillet, les travailleurs de Cerrillos Maipú et Vicuña Mackenna se sont mobilisés contre cette restitution des entreprises occupées lors de la tentative de coup d’État, en érigeant des barricades sur les routes d’accès ouest et sud de Santiago. Les rassemblements de Vicuña Mackenna ont alors mobilisé plus de 7 000 travailleurs dans 350 entreprises.

Cordons et commandos communaux

L’histoire des Cordons industriels est marquée par la rivalité avec les Commandos communaux. Selon Liborio Justo, « les cordons ne voulaient pas s’assimiler aux Commandos communaux se soumettre à eux ou se dissoudre en eux, comme le souhaitaient tous les partis politiques de gauche, y compris le MIR. Les Cordons voulaient agir en tant que « pouvoir ouvrier », en tant qu’organisme du prolétariat « pour la conquête du pouvoir » et non en tant que « pouvoir populaire », visant à résoudre les problèmes locaux, comme le concevaient les Commandos communaux, en lien avec leur soutien au gouvernement réformiste de l’UP ».

A l’époque, le Comité de coordination des Commandos communaux souligne qu’il défend le gouvernement « dans la mesure où il représente les intérêts des travailleurs ». Ce cadre, fondé principalement par le MIR, autour du concept de « pouvoir populaire », tente d’unir tous les fronts actifs de la classe ouvrière et des secteurs populaires, mais sa faiblesse résidait dans le fait qu’il ne place pas la classe ouvrière et le contrôle ouvrier de l’économie au centre, ce qui les rend moins efficaces dans la résistance contre le coup d’État et la crise de l’Union populaire.

Allende après la tentative de coup d’État de juin

Au lendemain du Tanquetazo, Allende déclare que « ce gouvernement n’est pas socialiste, il est transitoire » et cherche à calmer les putschistes et les grands patrons, modérant son discours et déclarant ouvertement : « nous travaillons pour éviter la dictature du prolétariat ». C’était tout à fait vrai puisqu’il va alors se consacrer à réprimer l’avant-garde ouvrière des Cordons.

Avec son gouvernement, il avait déjà fait adopter la loi sur le contrôle des armements en janvier 1973 et le plan Prats-Millas, pour la restitution des entreprises occupées, était présenté en mars. A l’occasion de la tentative de coup d’État de juin 1973, il s’appuie sur les forces armées pour contrôler la situation. Allende installe également un cabinet civico-militaire pour tenter d’empêcher d’être renversé.

Cependant, l’affrontement entre les classes devient de plus en plus aigu dans le pays. Patricio Aylwin, le futur président démocrate-chrétien, déclare : « les bonnes intentions du président de la République sont dépassées ». Le 7 juillet, la Démocratie chrétienne donne un ultimatum de 48 heures au gouvernement : il doit liquider l’espace de propriété sociale, sous peine d’être jugé inconstitutionnel. Dans une interview, le représentant des Cordons industriels Armando Cruces rejette alors la tentative de pacte entre le gouvernement et la DC comme une « trahison » : « la classe ouvrière est freinée, ils veulent l’emmener sur le terrain réformiste ».

Dans ce contexte tendu, les organisations du mouvement ouvrier ont des stratégies différentes. Le PC cherche à freiner les cordons et à les soumettre au gouvernement, le PS insiste sur le fait que l’armée et le peuple ne font qu’un, le MIR propose de développer le pouvoir populaire mais pas les Cordons industriels et exige que le gouvernement soit « un gouvernement de travailleurs ». En d’autres termes, l’initiative est laissée entre les mains d’un gouvernement dont la stratégie et les politiques ouvraient déjà un espace pour la réaction, lui donnant les outils pour frapper et démoraliser la classe ouvrière.

Ces propositions ont participé à désarmer les travailleurs du Cordon ouvrier, qui insistaient pour affronter par les armes le coup d’État qu’ils identifiaient déjà comme « fasciste ». La gauche croyait que le pouvoir ouvrier ne pouvait émerger qu’après la conquête du pouvoir bourgeois et non avant sa chute ou pendant sa désintégration. Ils ont vu dans l’UP une étape vers le socialisme alors que la coalition gouvernementale prenait des mesures pour contourner le pouvoir des Cordons et ouvrait la voie à un autre coup d’État en septembre. Tout le monde prétendait alors que la guerre civile « était encore une farce » alors qu’elle avait déjà commencé, pas encore sur un terrain physique, mais d’un point de vue politique et de mobilisation des forces.

Le coup d’État n’est pas arrivé d’un coup : les raids avant le coup d’État final

Fin août, des soldats du régiment de Tacna, s’appuyant sur la loi sur le contrôle des armes promulguée par Allende, font une descente à Indugas et Cobre Cerrillos dans le cordon Cerrillo-Maipú. 60 entreprises sont violemment perquisitionnées, tuant des travailleurs et mettant à l’épreuve le contingent militaire contre la population civile. Les généraux Sepúlveda, Pickering et le commandant en chef Prats démissionnent. Le coup final était imminent.

Pinochet fait alors partie des forces qui ont réprimé le coup d’État de juin. En réalité, les généraux putschistes ont déclaré par la suite que la décision de renverser Allende avait été prise dès le mois de mars mais qu’il était nécessaire de suivre une stratégie d’« adoucissement » promue par le gouvernement lui-même afin que le peuple accepte ses nouveaux bourreaux. Le problème que le mouvement ouvrier regroupé dans les cordons n’a pas réussi à résoudre est celui de la grève générale et de l’insurrection, qui, comme nous l’avons vu, impliquait la rupture avec le gouvernement de l’UP, qu’ils considéraient comme le leur.

Bien qu’en juillet, l’avant-garde ouvrière ait réussi à mobiliser toutes ses forces, elle n’était pas encore un pouvoir entier car elle avait accepté son désarmement, mais aussi parce que Allende et Prats ont étouffé le soulèvement contre le coup d’État. Par la suite, les récits et les entretiens confirment que tous les travailleurs de base ont cherché à répondre d’une manière ou d’une autre au coup d’État du 11 septembre. Ils sont allés travailler même s’ils étaient au courant du coup d’État à Valparaíso et ont demandé des armes pour affronter les putschistes. Cependant, ils n’avaient pas les moyens de se défendre. Des barricades ont été érigées à Maipú, un groupe de travailleurs du textile de Sumar et Indumet à Cordón San Joaquín a réussi à s’armer et il y a eu quelques escarmouches à Santa Rosa, mais ce qui prédominait c’était l’isolement et les appels à battre en retraite des partis de gauche. C’était l’étape finale d’un coup d’État qui avait commencé en juin.

Sans aucun doute, les cordons étaient la chose la plus avancée que la classe ouvrière pouvait faire sans une direction révolutionnaire qui chercherait à briser les illusions des travailleurs dans le gouvernement qui a préparé le terrain pour le coup d’État.

La victoire était-elle possible ?

Après octobre 1972, la droite tente de remporter les élections parlementaires de mars 73, en pariant sur l’obtention des 2/3 du Parlement pour défaire Allende de ses fonctions par la voie constitutionnelle. Cependant, elle n’atteint son objectif. C’est pourquoi elle met en place une autre stratégie : descendre dans la rue pour préparer une nouvelle offensive. Le 29 juin, après la tentative de coup d’État, une discussion sur les armes et la manière de faire face à la réaction a lieu dans les Cordons.

De façon contradictoire, les militaires, avec Prats à leur tête, se sont renforcés en tant qu’« arbitres » en arrêtant la tentative de coup d’État en juin. Or, bien que ce mouvement ait été mené en extériorité es principaux agents qui préparaient le coup d’État final, il a servi de « test » aux forces militaires. Les rachats d’entreprises et la mobilisation ont alors refait surface, comme en octobre, mais de manière vertigineuse et accélérée, mettant la droite davantage sur la défensive.

Cependant, au moment où les cordons auraient pu passer à l’offensive, leur conciliation avec le gouvernement civico-millitaire a renforcé la droite. En décidant de ne pas armer les travailleurs et en armant les putschistes, c’est la droite et la DC, main dans la main avec les militaires putschistes, qui sont passés à l’offensive. A partir du mois de juillet, les raids sur les entreprises deviennent quotidiens, mobilisant les troupes contre les ouvriers et les paysans grâce à la loi sur le contrôle des armes. A la mi-juillet, l’armée réussit à attaquer un grand nombre d’entreprises par les armes et la répression. C’est là qu’a eu lieu la défaite de l’avant-garde des travailleurs. En août également, la torture des marins anti-coup d’État qui tentaient de planifier une défense contre les putschistes commence, sans soutien de la gauche, en proie à une confiance aveugle dans l’institution militaire de l’État chilien.

Une fois consommée la défaite de l’avant-garde ouvrière et des marins anti-coup d’État, la nouvelle offensive du coup d’État est arrivée, initiant fin juillet la dernière grande grève patronale : avec les syndicats, les chauffeurs routiers, les corporations professionnelles et les partis de droite et la DC, qui soutenaient en même temps un appel à l’intervention des militaires contre un gouvernement « anticonstitutionnel ».

On ne peut pas dire que les Cordons ont été les « soviets » de la « révolution chilienne » qui a surgi entre octobre 1972 et septembre 1973, puisqu’ils n’ont pas réussi à se constituer en organismes d’auto-organisation des masses dans toutes les régions du pays. Les Cordons peuvent être considérés comme l’embryon d’un semi-pouvoir au sens que donnait Trotsky à ce terme, lorsqu’il expliquait que tout pouvoir qui n’est pas armé est un semi-pouvoir.
Les cordons avaient d’énormes limites. La principale, outre le problème de l’absence d’un pouvoir armé, est qu’ils étaient pensés comme des espaces d’organisation de l’avant-garde ouvrière mais pas de larges secteurs des masses. Si les cordons ont rempli la fonction d’une alliance avec ces secteurs pour faire face aux pénuries, ils n’ont pas réussi à se placer à la tête d’autres secteurs populaires, tels que les paysans ou les peuples originaires, et un énorme fossé a été maintenu entre l’avant-garde (les travailleurs conscients) et les masses malgré le fait que les cordons remplissaient les fonctions d’une alliance entre l’avant-garde ouvrière et les masses.

Ce problème et celui de l’armement auraient pu être abordés en accélérant les rythmes d’un congrès national des cordons dans la perspective de prendre le pouvoir et de préparer l’affrontement contre le coup d’État et donc l’insurrection. Faute d’une telle politique, les Cordons ne se sont pas transformés en une stratégie de pouvoir alternatif au « pouvoir populaire », piloté par le MIR en contrepoint du développement des Cordons, qui s’est avéré stérile, ou au réformisme, qui dirigeait l’appareil d’État et visait une transition « pacifique » vers le socialisme. Cette dernière s’est terminée par le résultat tragique que nous connaissons déjà.

S’ils s’étaient inscrits dans une stratégie révolutionnaire alternative aux autres courants de la gauche, s’ils avaient été considérés comme des « embryons de pouvoir », la perspective de changer l’histoire aurait pu s’ouvrir. Pour cela, il manquait au Chili une stratégie révolutionnaire incarnée par un parti révolutionnaire, indépendant du gouvernement, cherchant à renforcer les Cordons industriels et leur extension nationale avec une politique indépendante de l’UP, et capable de montrer que la situation pouvait mener soit au triomphe de la révolution ouvrière et socialiste soit à la contre-révolution.

 
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