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22 de septembre de 2022 Twitter Faceboock

Antilles
Pénuries d’eau, infrastructures détruites : après « Fiona », la réalité du manque de moyens en Guadeloupe
JA Kinto

Le passage de la tempête Fiona en Guadeloupe a fait d’important dégâts matériels qui ont touché habitations et infrastructures publics. Une situation qui met en lumière le manque criant de moyens et l’administration coloniale dont souffre le peuple guadeloupéen.

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Crédits photo : AFP

Le week-end dernier la Guadeloupe s’est réveillée meurtrie par le passage de la tempête Fiona. La tempête a touché l’ile vendredi dans la soirée apportant pluies diluviennes, vents et orages. Le bilan est d’un mort ainsi que de nombreux dégâts sur les infrastructures de l’ile notamment sur les canalisations de la Basse-Terre (routes, distribution d’eau, électricité). Si l’électricité a été rétablie sur la majeure partie de l’ile, ce n’est pas encore le cas pour la distribution d’eau. Près de 60 000 personnes ainsi que des services publics essentiels sont privés d’eau comme c’est le cas du centre hospitalier de Basse-Terre (distribution qui en temps normal est déjà très perturbée). Les écoles qui avaient fermées dans l’après-midi vendredi 16 sont restées en grand parties fermées pour les élèves ce lundi 19 septembre. Fiona a continué son passage en direction de Porto Rico causant la mort de deux personnes, puis en direction de la République Dominicaine où deux autres personnes sont mortes.

Le gouvernement français a annoncé que l’état de catastrophe naturelle sera reconnu à la fin de cette semaine et le ministre délégué aux outre-mer Jean-François Carenco s’est rendu en Guadeloupe ce mercredi pour afficher « publiquement l’affection de la Nation au moment où la Guadeloupe souffre »… En réalité derrière cet effet d’annonce seulement une partie de la population pourra bénéficier d’indemnités moyennant des démarches administratives à rallonges. L’autre partie ne pourra en bénéficier car, faute de moyens, de nombreuses habitations précaires ne sont pas assurées. Et derrière la sortie hypocrite du ministre, les moyens annoncés pour faire face au passage de la tempête apparaissent bien ridicules puisque seulement un avion et une machine pour rendre potable l’eau des rivières ont été annoncés.

Cet évènement n’est pas un cas isolé et aurait pu être anticipé. Cet épisode rappelle, par exemple, le passage du cyclone Irma qui avait durement frappé Saint-Martin en 2017. Le cyclone avait fait plus d’une dizaine de morts, des dégâts matériels très importants et avait conduit à de larges déplacements de population. L’intensification des phénomènes cycloniques n’est pas une fatalité mais une des conséquences du réchauffement climatique. Le 6e rapport du GIEC d’octobre 2001 possède un chapitre entier consacré aux « petites iles », parmi lesquels celles de la caraïbe. Le rapport alerte sur l’aggravation des phénomènes cycloniques, sur les risques de submersion-inondations, sur l’érosion côtière ou encore la dégradation des écosystèmes marins et les conséquences que cela pourra avoir sur les populations. Conséquences allant du déplacement massif des habitants, des inondations récurrentes ou encore l’impact sur les différents secteurs d’activité et économiques. Ces effets sont déjà bien réels avec par exemple les inondations récurrentes ayant lieux ces derniers mois sur les zones de Pointe-à-pitre et Jarry, posant ainsi la question de la capacité pour la population d’habiter ces lieux sur le long terme.

Henriette, une habitante de Vieux-Habitants, a vu sa maison sinistrée dû à une mauvaise sécurisation des berges fragilisées depuis le cyclone Maryline en 1995. Malgré ses relances à la mairie, au conseil départemental, à la région, à l’agglomération et l’Etat rien n’a été fait. Elle s’est exprimée sur Guadeloupe La Première : « J’ai interpellé le président de la région, ça fait trois ans […] j’ai interpellé le conseil départemental je n’ai pas eu de réponses on m’envoi de balle [en balle] […], ce n’est pas la compétence de personne […] ». Un constat d’abandon partagé lundi après-midi par Elsa une habitante de Capesterre qui déplore le manque de réactivité de la municipalité et le fait que les habitants soient livrés à eux-mêmes : « Je me suis retrouvé à aider les voisins à déblayer le village artisanal de Capesterre, la municipalité n’avait pas l’air déterminée à faire quoi que ce soit avant ce matin ».

Ces conséquences de la tempête révèlent une nouvelle fois le manque de moyens criant et l’état des services publics en Guadeloupe. Elles viennent s’ajouter à la misère sociale et à la crise écologique qui touchent de plein fouet l’île. Des pénuries d’eau à la vie chère, en passant par un chômage de masse qui s’élève à près du double du taux de chômage en métropole (18%) ; du problème des sargasses (algues invasives) aux conséquences de l’utilisation du chlordécone sur les populations locales, les classes populaires en Guadeloupe font les frais d’une véritable gestion coloniale de la part de l’État français. À l’automne dernier des révoltes avaient éclatées sur l’ile sous fond de dénonciation de la gestion répressive de la crise sanitaire ainsi que contre la répression du leader syndical Elie Domota et plus généralement pour dénoncer les conditions de vie. La mise en place de nombreux barrages avait paralysé l’ile pendant plusieurs semaines. La réponse immédiate du gouvernement français avait été d’envoyer le RAID et le GIGN pour réprimer les révoltes.

Cette situation profonde et le manque de moyens pour faire face à la tempête Fiona n’a bien entendu rien de « naturelle », mais est le fruit de la domination impérialiste et coloniale qu’exerce l’État français sur la Guadeloupe comme sur tous les territoires dit « d’outre-mer », qui constituent toujours aujourd’hui les miettes de l’empire colonial français.

 
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