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3 de février de 2023 Twitter Faceboock

Billet
Dussopt à l’usine, Darmanin fils d’une femme de ménage : la macronie, un gouvernement ouvrier ?
Gaëtan Gracia, CGT Ateliers de Haute-Garonne

La réforme des retraites a réveillé une colère sur la pénibilité et la souffrance au travail. En réponse, plusieurs ministres mettent en avant leur origine ouvrière, leur connaissance de « l’effort » ou leurs job d’été en 3x8. Jusqu’à l’indécence pour ceux qui passent vraiment leur vie au travail.

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Crédits photo : Le Dauphiné Libéré

Depuis le 10 janvier et les annonces du gouvernement, le rejet de la réforme est de plus en plus largement partagé. Mais au-delà de cette réforme, il s’exprime un mal-être plus général quant à la pénibilité et à la souffrance au travail, dont on a vu les premiers signes depuis le Covid.

Face au risque que cette attaque sur nos retraites soit le déclencheur d’une colère plus large, le gouvernement tente de prévenir l’incendie par des éléments de langage. Sa dernière trouvaille ? Présenter ses ministres comme des quasi-prolétaires !

Dussopt a fait les 3x8 ? Véran s’est « brisé les reins » ? A quand Macron ex-mineur de fond ?

Plus c’est gros, plus ça passe. Ces deniers jours, plusieurs membres de la macronie ont tenté de se construire une image de ministre issu de la classe ouvrière, évoquant leurs expériences passées ou leurs parents.

Olivier Dussopt, ministre du travail, répète partout qu’il a travaillé en 3x8. En réalité, celui-ci a déjà réalisé des jobs d’été lorsqu’il était jeune, et comme le précise le militant CGT de l’usine en question : « ça ne lui a pas cassé les poignets ». Face aux militants ouvriers qui lui ont ris au nez, plusieurs médias se sont d’ailleurs empressés de mobiliser leur section de « fact checking » pour valider le propos du ministre. France Info par exemple a choisi d’axer sa « desintox », non pas contre Olivier Dussopt qui déguise son job d’été en passé d’ouvrier, mais contre Anasse Kazib, militant ouvrier, qui demandait « à quel moment il a travaillé en usine ? ». La question était pourtant légitime face à un ministre qui n’a travaillé que quelques semaines dans sa vie mais prétend connaître la pénibilité.

Gérald Darmanin a lui aussi évoqué le passé ouvrier du ministre du travail : « Olivier Dussopt demande aux français de faire un effort. Son parcours construit sa légitimité a le dire, il sait de quoi il parle.[…] Il connaît la valeur de l’effort. » Si des ministres n’ayant jamais travaillé connaissent la « valeur de l’effort », c’est probablement la valeur de l’effort des autres. C’est d’ailleurs une qualité bourgeoise que de connaître la « valeur de l’effort » de ceux qui les enrichissent par leur travail.

Gérald Darmanin persiste et signe : « Je pourrais prendre aussi le cas de ma maman femme de ménage : elle part en retraite en juillet prochain, à plus de 67 ans ». Loin de nous faire considérer Darmanin comme un frère de classe, le propos a au contraire de quoi choquer. Il n’y a qu’un ministre bourgeois pour oser pavaner sur le fait que sa mère doive faire des ménages jusqu’à « plus de 67 ans ». Tout travailleur qui aurait la vie de ce ministre essaierait de faire en sorte que sa mère ne se casse pas le dos jusqu’à 67 ans. Rappelons qu’un ministre touche 10.490€ bruts mensuels, hors véhicule et logement de fonction. Mais pour Darmanin, la condition de sa mère est au contraire un faire-valoir et une protection contre « toute leçon de morale ».

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Comme si ça ne suffisait pas, on a vu dans un même registre le porte-parole du gouvernement Olivier Véran expliquer dans une interview s’être « brisé les reins » lorsqu’il était aide-soignant. Les aides soignantes payées une misère et qui n’ont pas de moyens pour lever des malades apprécieront. Si Véran a souffert du métier quand il avait la vingtaine, qu’il s’imagine ce que c’est de lever des malades à plus de 60 ans. C’est pourtant la vie qu’il promet à ces travailleuses.

En essayant ainsi de casser l’image d’un gouvernement déconnecté des classes populaires, ce choix d’argumentaire pourrait au contraire alimenter la colère. Les travailleurs de première et deuxième ligne, ceux qui font tourner la société, sont depuis des années effacés des sphères politiques et médiatiques pendant que des politiciens professionnels et des bourgeois prétendent comprendre nos vies, presque les partager et nous représenter, tout en nous confisquant le droit de nous représenter nous mêmes.

Au rejet de la réforme, à la colère sur les salaires, pourrait se mêler une haine du gouvernement, déjà forte aujourd’hui. Un cocktail explosif.

 
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