En ce jour de grève nationale la mobilisation est très suivie à la SNCF, où l’ensemble des syndicats appellent à la grève reconductible. A la gare de triage du Bourget, les aiguilleurs sont en grève depuis le 21 novembre, d’abord pour des augmentations de salaire, avant de lier ce combat à la bataille des retraites depuis le 19 janvier. Ce matin, ils étaient rassemblés en AG pour discuter des suites du mouvement et de comment gagner sur leurs revendications, aux côtés de leur collègues du fret ferroviaire, du nettoyage des gares, et des aiguilleurs du secteur de Paris Nord venus en soutien.
En grève depuis le 21 novembre, les aiguilleurs du Bourget veulent durcir le mouvement
A l’AG, Anasse Kazib, gréviste au Bourget et délégué syndical Sud Rail, a commencé par rappeler que la SNCF a fait 2,4 milliards de bénéfices en 2022 et refuse les revendications pourtant minimales des salariés du Bourget. Face à l’inflation, les travailleurs de la SNCF sont particulièrement touchés, beaucoup d’entre eux étant mal payés, avec un traitement de base en dessous du SMIC. Dans le même temps, la direction commence à vouloir réprimer les grévistes, menaçant un des participants de la réunion avec la direction de la sanctionner.
Face à cette situation, l’AG de ce matin a ainsi discuté du besoin de durcir le mouvement et de s’adresser non pas au directeur local mais à la direction de la SNCF. Pour ce faire, plusieurs grévistes ont souligné le besoin de se lier à des aiguilleurs d’autres sites, une méthode qui avait payée lors de la grève victorieuse du Bourget en 2017. Or plusieurs sites du secteur de Paris Nord se sont justement mis en grève pour leurs salaires et conditions de travail, à l’image du site de Commande Centralisée du Réseau
Un des représentants de cette unité venue à l’AG a insisté sur les différences de statut et de salaires qui font que les salariés ne sont pas tous prêts à se battre pour le même motif, la question de réforme des retraites paraissant lointaine pour ses collègues les plus jeunes. Pour étendre la mobilisation, les grévistes ont donc convenu du besoin élargir les revendications, afin de profiter au mieux du mouvement de grève nationale contre la réforme des retraites, qui était évidemment omniprésent dans les discussions.
Lier les grèves locales pour les salaires à la bataille contre la réforme des retraites
Laura Varlet, cheminote au Bourget, a rappelé que leur grève locale a lieu dans un contexte où des millions de travailleurs sont en grève, et où le pays pourrait être mis à l’arrêt dans les prochains jours. Or, à de nombreux endroits, les travailleurs lient la question des retraites à des revendications locales, à l’image des personnels de ménage de Onet qui ont fait grève le 31 janvier, alors qu’il s’agit d’un secteur très précaire.
Associer ces deux combats est un enjeu décisif, alors que le patronat et le gouvernement craignent que le mouvement actuel devienne explosif si la colère contre l’inflation se mêle à celle contre le projet de réforme des retraites. En ce sens, les grévistes ont souligné que si la direction du Bourget a cherché à prendre rendez-vous avec les grévistes à quelques jours du 7 mars, c’est qu’elle est fébrile dans un contexte de grèves qui surviennent partout dans le pays.
Aussi, alors que beaucoup à la SNCF craignent de partir seuls dans un mouvement dur, à l’image des « grèves par procuration » des dernières années, Laura Varlet a insisté sur l’importance de lutter à la fois contre les salaires et contre la réforme des retraites, ce qui pourrait pousser les plus précaires et les secteurs du privé à reconduire la grève eux aussi, aux côtés des cheminots. Elle a ainsi évoqué l’initiative du Réseau pour la grève générale qui a lancé une pétition en direction de l’intersyndicale pour qu’elle prenne en charge cette question.
Comme l’a exprimé Anasse Kazib ensuite, les résultats des négociations salariales dans les entreprises et des luttes pour les salaires dépendront de l’issue du mouvement actuel contre les retraites. D’où l’enjeu de lier les deux combats au plus vite.
La grève est reconduite jusqu’à vendredi, avant un rassemblement avec d’autres sites en lutte
Afin de s’inscrire dans le mouvement contre les retraites et durcir leur lutte pour les salaires, les aiguilleurs ont finalement voté la reconduction de la grève jusqu’à vendredi, pour au moins 4 jours complets donc. Un enjeu sur laquelle sont revenues différentes interventions. Toujours dans le but d’étendre le mouvement, les aiguilleurs du Bourget ont aussi décidé de se rassembler vendredi 10 avec leurs collègues de la Commande Centralisée du Réseau qui ont prévu une « journée noire » à ce moment-là, et réfléchissent à une action commune avec différents sites.
De manière générale, l’importance de se coordonner est beaucoup revenue, certains aiguilleurs évoquant par exemple la nécessité de former un collectif national des aiguilleurs, sur le modèle des contrôleurs en décembre dernier. Comme le montrent les grévistes du Bourget, pour gagner face à Macron il est essentiel de lier le combat pour les salaires à celui des retraites et de durcir la stratégie, en généralisant la grève reconductible !
Juste après l’AG du Bourget, une Assemblée générale s’est tenue à Paris Nord, où la reconduction de la grève a également été votée. De même, à Toulouse, les cheminots ont tenu leur plus importante AG depuis le 19 janvier et voté la reconduction. Des exemples qui montrent la voie : pour gagner face à Macron, il faut construire la grève reconductible ! Un mot d’ordre qu’il faut exiger que l’intersyndicale reprenne. |
