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6 de octobre de 2016 Twitter Faceboock

Des conditions de travail et d’étude aux droits démocratiques, le Mirail doit entrer en résistance
Toulouse le Mirail. Fin de la grève en Psycho. Et maintenant ?

Ce mercredi 5 octobre, l’Assemblée Générale de l’UFR de psychologie a, au vu des concessions de la présidence, voté la reprise des cours à partir de lundi prochain. Une victoire objective, bien que défensive, qui rappelle avec force que la grève est le meilleur moyen d’obtenir satisfaction. Mais les attaques contre les travailleurs et le problème des manques de moyens dans l’ESR régional, surtout avec le processus dorénavant en cours de "fusion" des établissements toulousains, Mirail inclus, vont continuer de plus belle, dans un climat général marqué de plus en plus par le tout sécuritaire. Au sortir de cette victoire partielle, une question simple se pose donc clairement : et maintenant, que fait-on ?

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Marina Garrisi & Julian Vadis

Une première victoire pour arracher les autres ! Pour des Universités ouvertes à tou-tes et de qualité !

 

Si toutes les revendications n’ont pas été prises en compte, l’Assemblée Générale de l’UFR de psychologie a tranché : lundi, la reprise des cours sera effective, les revendications les plus urgentes ont été satisfaites. Concernant les revendications financières, les dotations demandées ont été accordées. La création de 3 postes de BIATSS, un en scolarité, un poste en remplacement à l’accueil pérennisé à terme en poste scolarité, et un second poste d’accueil lorsque cette pérennisation du premier sera effective. Par ailleurs, le CA s’est engagé à accorder un nouveau poste d’enseignant-chercheur, et de négocier en ce sens avec le ministère. Comme cela a été rappelé par la tribune de l’assemblée, tous les problèmes ne sont pas résolus avec ces propositions, dont il faudra veiller à ce qu’elles soient concrètement appliquées. Mais après 17 jours de grève, les personnels enseignants et administratifs, soutenus largement par les étudiants de l’UFR depuis le début, jugeant ces propositions acceptables après plus de deux heures de débats, ont donc voté la reprise du travail.

C’est bien une première victoire depuis un moment sur l’université, une victoire qui doit servir d’exemple, mais surtout, comme nous l’écrivions hier, qui devrait servir de point d’appui pour dénoncer le manque de moyens qui touche bien plus largement que l’UFR de Psychologie du Mirail.

La destruction méthodique de l’Enseignement Supérieur qui s’abat sur nos Universités n’est en effet pas nouvelle, cela fait des années qu’elle a commencé. L’histoire remonte à très loin : dès l’après 68 avec la réforme Edgar Faure. Un retour en arrière sera instructif. Si l’Université est à ce moment-là « contrainte » d’ouvrir ses portes à des couches toujours plus larges d’étudiants (les effectifs étudiants triplent dans la seule décennie 1960/70, pour continuer d’augmenter de manière exponentielle ensuite et franchir le cap du million d’étudiants fin des années 80), pour assurer la formation d’une main d’œuvre toujours plus spécialisée et qualifiée sur un marché du travail qui s’est « technologisé », l’Etat n’a pas l’intention de déployer les moyens nécessaires pour faire de cette nouvelle Université un lieu de savoir de qualité. Depuis la loi Edgar Faure de 68, la responsabilité financière de l’Etat dans le budget de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche est sans cesse revue à la baisse, contraignant les Universités à rechercher des financements auprès des collectivités locales.

Depuis la Loi LRU de 2007 Sarko, que le PS, ici comme ailleurs dans la continuité totale des politiques de la droite réactionnaire, a directement prolongé avec la loi Fioraso de 2013, cette tendance de fond s’est considérablement renforcée. Nos Universités, aux déficits croissants et pour certaines proche de la banqueroute depuis le passage à « l’autonomie de gestion » au cœur de la loi LRU, qui gravait dans le marbre le désengagement financier de l’État, sont ainsi contraintes de plus en plus à quémander leurs fonds auprès… du « tissu économique et local », en d’autres mots auprès des entreprises de la région et de leurs patrons, à qui du même coup cette loi a permis de siéger toujours plus nombreux dans nos Conseils d’Administration et - main dans la main avec des présidences transformées en managers de l’excellence élitiste et de la misère croissante pour le plus grand nombre - co-« gérer » nos Universités comme ils gèrent leurs entreprises.

Rien d’étonnant à ce que la recherche des économies se fasse sur le dos des travailleurs de la fac, et aux dépens de l’accès démocratique à l’Université comme le tout dernier accord ignoble, que l’UNEF a signé soit dit en passant, sur la sélection en Master le rappelle. Les nouveaux bâtiments du campus du Mirail sont l’arbre qui cachent une vaste forêt de ruines et d’attaques… qui se traduisent en ce moment, à quelques hilomètres de là, par un vaste plan de suppressions de postes à l’université Paul Sabatier en ce moment, raison pour laquelle plusieurs de ses composantes sont actuellement en grève en ce moment, sont programmées.

Mais, dans le droit fil de la loi Fioraso, ce qui est maintenant à l’ordre du jour sur Toulouse, c’est le passage à une nouvelle échelle de cette politique d’ensemble, au travers de la « fusion » des universités et établissements de l’enseignement supérieur locaux, entamée lors du dernier conseil d’administration de la COMUE. Cette politique de destruction pure et simple des universités publiques, dont l’objectif principal est d’optimiser la rentabilité des campus, se payera sans aucun doute de compressions nouvelles de la masse salariale, c’est-à-dire d’une précarisation, pourtant déjà massive, encore plus avancée, des conditions de travail, d’études, etc.

Bref : la grève de l’UFR de psychologie a gagné sur quelques symptômes terminaux d’un problème bien plus vaste, qui lui, ne va faire que s’aggraver, et contraindre personnels et étudiants à une « lutte pour la vie » toujours plus âpre. Hollande a beau jeu, dans ce contexte, de revendiquer fièrement son enveloppe « historique » de 850 millions pour le budget de l’ESR, qui sont une misère et un simple effet face à des tendances lourdes au manque de moyens auxquelles sa présidence a activement contribué...

Au Mirail, c’est en ce sens par exemple que les étudiants de l’UFR de Lettres Philosophie Musique Arts&Com du Mirail, se sont réunis à plusieurs reprises depuis deux semaines, et sont déterminés à continuer : pour témoigner de leur soutien à la lutte de l’UFR de psycho d’abord ; dénoncer la casse de nos Universités et revendiquer un Enseignement Supérieur qui soit de qualité et réellement accessible à toutes et tous, ensuite ; mais aussi, enfin, à partir de toutes ces questions qui ne sont jamais purement locales et "techniques", pour questionner le projet global de société porté par les gouvernements qui se succèdent et qui s’incarnent dans ce genre de politiques.

Il n’y a pas de fric pour les facs ni les emplois, par contre il y en a pour la police et pour le « tout sécuritaire »

 

Et sur ce plan, l’Etat et leur gouvernements ont fait un choix de société limpide ce sont la « sécurité » et la répression leurs thèmes de prédilection. C’était un choix assumé pour Sarko en campagne en 2007, mais c’est un choix encore plus massif pour Hollande et Valls qui, au nom de la « lutte contre le terrorisme », ont instauré un état d’urgence permanent justifiant une répression toujours plus violente, au quotidien, dans la rue mais aussi dans les entreprises privées, et de façon croissante dans le public, mais aussi, plus sournoisement, une mise au pas idéologique du corps enseignant, dans le primaire et le secondaire, qui gagnera les universités si on laisse cette logique s’installer sans répondre.

Cette répression et cette tentative de mise au pas, aujourd’hui, n’épargne personne, et peut s’abattre sur chacun de nous à la moindre occasion : le cas d’Anthony, étudiant en Lettres du Mirail qui risque de la prison avec sursis pour avoir simplement manifesté contre la Loi Travail en mai en est un exemple de plus. Mais c’est en vertu de cette même politique que les syndicalistes de GoodYear risquent de la prison pour avoir cherché à défendre leurs emplois, ou encore que les gendarmes qui ont tué Adama Traoré cet été ne sont même pas inquiétés. C’est ce genre de choix politique qui brandit l’état d’urgence pour faire taire toute contestation, et qui « justifie » les descentes en masse dans les banlieues, la violence d’une police au racisme toujours plus décomplexé couvert en dernière instance par les déclarations islamophobes des figures politiques de droite comme de « gauche »., dont nous devons prendre collectivement la mesure, car c’est elle qui donne le ton, en ce moment, de tout le reste.

Et les personnels des universités commencent à bien le voir. Ces derniers jours, une bronca s’est ainsi élevée dans le milieu universitaire contre ces violences policières, l’acharnement contre les populations racisées, mais aussi contre les militants. Suite aux prises de positions de Guillaume Vadot, doctorant à la Sorbonne et militant au NPA, suit à son agression par la police de Saint Denis le 22 septembre, ce sont plus de 300 universitaires, professeurs et maîtres de conférence dont plusieurs du Mirail, qui ont signé une tribune dans Libération ce mercredi 5 octobre contre les violences policières. Par-delà cette agression particulière, la tribune dénonce la banalité de la violence policière dans les banlieues ou les quartiers populaires, l’instrumentalisation de la lutte contre le terrorisme, la généralisation des atteintes à nos libertés et droits démocratiques.

Ce jeudi 6 octobre en soirée,un premier grand meeting va se tenir, dans le même esprit, organisé par les étudiants de la Sorbonne Paris 1, réunissant Assa Traoré, Mickaël Wamen, Amal Bentounsi, Guillaume Vadot et la CGT infoCom, qui incarnent les différents visages de cette répression, des personnes racisées assassinées aux travailleurs syndicalistes réprimés, en passant la jeunesse étudiante. Cet événement politique n’est évidemment pas destiné à resté « parisien » : nous devons nous aussi, à Toulouse et au Mirail en particulier, nous en inspirer pour construire un large front de lutte et de défense de nos droits démocratique, droits qui sont, on l’aura compris, attaqués pour les mêmes causes et avec la même vigueur ne le sont nos conditions de travail et d’études.

Faisons du Mirail le cœur d’un vaste front de lutte et de défense des droits démocratiques !

A l’occasion de l’assemblée générale de ce jeudi, une dynamique de résistance et de convergence plus large, des étudiants et des travailleurs de l’université, sur l’ensemble de ces questions pourrait être lancée ; comme cela a été le cas en partie printemps lorsque la lutte contre la loi travail se payait de gazages, matraquages, tirs de flashballs, et arrestations arbitraires, aujourd’hui poursuivis, comme pour Anthony, par la répression judiciaire, avec des dizaines et des dizaines et de procès et de condamnations en France ; et comme, pour celles et ceux, personnels et étudiants, qui étaient au Mirail à l’automne 2014 et qui s’en souviennent sûrement, cela avait été le cas suite à l’assassinat de Rémi Fraisse à Sivens, il y a presque deux ans, s’exprimant dans dans d’imposantes AG communes qui dénonçaient déjà cette politique indissociablement austéritaire et autoritaire.

La convergence sur ces questions économiques, sociales et démocratiques de différents secteurs, des étudiants au personnel de la fac, et du secteur universitaire toulousain en général, en passant par les travailleurs du privé en lutte sur la ville comme les Latécoère (qui seront présents en délégation demain en AG), a, en résumé, beaucoup de motifs et de points d’appui concrets pour elle en ce moment. Le Mirail doit s’en saisir !

 
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