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9 de février de 2017 Twitter Faceboock

#1917. « L’ennemi principal est dans notre pays ! »
Internationalisme et « défaitisme révolutionnaire » face à la guerre selon Lénine (I)

Camille Münzer

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Si la Russie de début 1917 offrait les conditions objectives d’une révolution, comme nous le rappelions dans un article antérieur, il fallait que les masses elles-mêmes prennent en main leur destinée pour que la crise débouche sur la prise du pouvoir. L’année 1917 n’était pas écrite avant qu’elles n’y impriment leur propre marque, d’autant moins que trois années plus tôt, au début de la guerre, le ralliement des principales organisations politiques et syndicales de classe à la guerre et aux unions sacrées avait produit une profonde désorientation stratégique au sein du mouvement ouvrier et, plus largement, chez ces masses qui se verront entrainées dans un massacre sans nom piloté par leurs gouvernements respectifs.

Face au retour des nationalismes, protectionnismes et souverainismes de droite comme de gauche, nous devons non seulement faire de cette année de centenaire l’occasion de nous réapproprier l’histoire riche et complexe qui a permis aux prolétaires russes de faire basculer histoire, mais en particulier revenir sur le sens profond de l’internationalisme révolutionnaire qui a été un élément déterminant de ce processus. Nous revenons pour cette raison, dans cet article, sur la formulation polémique du « défaitisme révolutionnaire » par Lénine, au début de la guerre puis dans le cadre de discussions ouvertes aux conférences de Zimmerwald et Kienthal, qui fut l’une des importantes contributions de ce dernier non seulement à la stratégie bolchévique, mais par elle à la victoire d’octobre 1917.

I. Le caractère impérialiste de la guerre mondiale

Le mouvement ouvrier à la veille de la guerre

En France, le développement du mouvement ouvrier s’est opéré au cours d’une période annonciatrice de la guerre à venir. Les différents congrès syndicaux (1906 à Amiens, 1908 à Marseille, 1910 à Toulouse et 1912 au Havre) réaffirment les positions antimilitaristes et antipatriotiques du mouvement ouvrier, de même que la nécessité de la préparation des travailleurs à répondre à une déclaration de guerre par la grève générale révolutionnaire. Après l’incident d’Agadir en 1911, des manifestations pacifistes sont organisées par les syndicats à Paris, Berlin, Londres, Vienne, etc.

L’Internationale Socialiste depuis sa formation en 1889 a eu une position plus ambigüe que la CGT française au sujet des moyens de lutte contre la guerre. Une des principales raisons de ces hésitations serait peut-être le penchant qui se manifeste très tôt au sein de l’Internationale pour l’action parlementaire, la participation gouvernementale et le rejet de la violence révolutionnaire. La légalisation des partis socialistes et des syndicats, la mort d’Engels et les transformations du capitalisme mondial avaient changé la nature de l’Internationale recréée par Engels en faveur de son aile « révisionniste ». En juin 1899, le socialiste français Alexandre Millerand entre au gouvernement radical de Waldeck-Rousseau. Cette participation n’avait rien d’un accident. Au contraire, il s’agissait d’un tournant salué comme une victoire et justifié théoriquement par l’aile réformiste de l’Internationale. Selon elle, la lutte pour le socialisme se trouvait dans une étape intermédiaire qui nécessitait un gouvernement conjoint de la bourgeoisie et du prolétariat, où ce dernier planterait des « germes de socialisme » au sein de l’État, justifiant ainsi la participation des socialistes au gouvernement. De même, au sein de la social-démocratie allemande, le rejet de la violence comme tactique de lutte se faisait depuis plusieurs années au nom du rejet du « blanquisme », tactique privilégiant les moyens de lutte illégaux. Face à cette vision d’un système capitaliste « assagi », Rosa Luxembourg répondait que « la violence est et reste l’ultime moyen de la classe ouvrière, la loi suprême, tantôt latente, tantôt agissante, de la lutte des classes. Et si nous « révolutionnons » les cerveaux par notre activité parlementaire et par tout notre travail, nous le faisons pour que, en cas de besoin, la révolution descende des têtes dans les poings. » [1]

Ainsi, différentes motions sont rejetées successivement lors des congrès de l’Internationale qui défendent la grève générale comme principale tactique de lutte contre la guerre. C’est finalement lors du congrès extraordinaire de Bâle en 1912, convoqué en urgence suite à la guerre aux Balkans, que l’Internationale adopte une résolution qui s’oppose radicalement à la guerre. Le célèbre manifeste du congrès, intitulé « Guerre à la guerre », finit par une « sommation aux gouvernements » et un rappel de la « mission historique du prolétariat international » [2].

Du côté du mouvement socialiste français, le dernier congrès en période de paix a lieu en juillet 1914, au milieu des préparatifs pour la guerre. Ce congrès est censé formuler une prise de position devant un éventuel conflit international et le congrès adopte, à l’issue des débats où Jaurès mène la lutte pour la grève générale révolutionnaire, une motion qui affirme que « entre tous les moyens employés pour prévenir et empêcher la guerre […], le Congrès considère comme particulièrement efficace la grève générale ouvrière simultanée et internationalement organisée dans les pays intéressées » [3].

Nous voyons que, au fur et à mesure des congrès, les différentes organisations politiques et syndicales du mouvement ouvrier ont clarifié leurs positions vis à vis de la guerre qui se préparait. L’attentat de Sarajevo du 28 juin 1914 n’était, en dernière instance, qu’un signe de plus dans une succession d’évènements qui, depuis le début du siècle, annonçaient un conflit mondial. « Le temps de la réflexion n’a donc pas manqué » [4] dit Alfred Rosmer. Pourtant, du jour au lendemain, toutes les résolutions de congrès et toutes les motions vont devenir du papier mouillé. Le syndicalisme français, voulant faire oublier ses pêchés d’hier, son radicalisme et ses prétentions autogestionnaires, avait fini par faire entrer le « syndicalisme révolutionnaire » dans le cadre étroit de l’État bourgeois, se ralliant à la négociation et à la paix sociale. Il faisait partie désormais des institutions respectables de la République française. Les appels à la grève générale devenaient alors des appels à l’Union sacrée et la lutte contre le militarisme une croisade pour sauver la tradition démocratique et révolutionnaire de la France face à l’autocratie « germanique ». Pour faire marcher, main dans la main, ouvrier et patron, Léon Jouhaux, secrétaire de la CGT, fera des appels du pied au mouvement ouvrier pour que celui-ci « profite » de la guerre pour prendre des marchés à l’Allemagne et assurer l’emploi industriel en France. Le 3 août au parlement allemand, sur 111 députés sociaux-démocrates 15 seulement se sont prononcés contre le vote des crédits de guerre. On raconte que lorsque Lénine lut le numéro de Vorwärts [5] sur le vote au parlement allemand, il pensa qu’il s’agissait d’un faux fabriqué par l’état-major allemand pour semer la discorde au sein de l’Internationale. Pourtant, il ne s’agissait que de sa faillite.

On ne reviendra pas ici sur l’histoire des raisons profondes qui ont provoqué ce revirement [6], il s’agit plutôt de s’intéresser à comment Lénine va réagir à cette trahison politique du mouvement socialiste international.

Le caractère de la guerre mondiale

Il s’agit tout d’abord de comprendre les guerres dans leur contexte historique spécifique. Ainsi, pour Lénine, un conflit entre une nation opprimée et une nation impérialiste n’est pas de même nature, et n’a pas les mêmes implications pour les révolutionnaires, qu’un conflit entre deux puissances impérialistes. De la même manière, dans la période de 1789 jusqu’à 1871, les guerres de libération nationale, « à caractère progressif bourgeois », dont l’un des principaux objectifs était le renversement de l’absolutisme, national ou étranger, ont peu de chose à voir avec les conflits inter-impérialistes du XXème siècle.

C’est pour cela que Lénine prend le soin de parler parle de guerres « de ce genre » ou de guerres « de cette époque » dans sa brochure « Le socialisme et la guerre » de 1915 [7] qui prépare la conférence de Zimmerwald destinée à réunir les socialistes qui s’opposaient à la guerre. Il dit, dans le but de différencier le conflit européen des guerres passées : « si demain le Maroc déclarait la guerre à la France, l’Inde à l’Angleterre, la Perse ou la Chine à la Russie, etc., ce seraient des guerres justes”, défensives ”, quel que soit celui qui commence, et tout socialiste appellerait de ses vœux la victoire des Etats opprimés, dépendants, lésés dans leurs droits, sur les grandes” puissances oppressives, esclavagistes, spoliatrices. » [8]

Or la Première Guerre mondiale n’est pas, dans ce sens, une guerre « de ce genre », où les révolutionnaires pourraient prendre position pour un des deux camps, où une position de « défense de la patrie » serait justifiable. Mais plutôt une guerre inter-impérialiste qui s’apparente à un conflit entre des propriétaires d’esclaves pour la consolidation de l’esclavage. Selon sa théorie de l’impérialisme [9], une des caractéristiques de ce nouveau stade du capitalisme est, entre autres, le développement de monopoles suite à la concentration et la centralisation du capital.

Une des conséquences du capitalisme de monopoles est alors le partage économique du monde entre groupements capitalistes et le partage politique du monde entre grandes puissances. La formation de monopoles produit des énormes excédents de capitaux par rapport aux possibilités d’investissement dans le marché intérieur. L’exportation de capitaux devient centrale pour l’économie des pays les plus développés, d’où le partage du monde entre puissances économiques et grands trusts internationaux : « Le capitalisme, dit Lénine, se sent désormais à l’étroit dans les vieux Etats nationaux sans la formation desquels il n’aurait pu renverser le régime féodal. » [10] L’exportation du capital se fait dès lors vers les pays coloniaux ou semi-coloniaux et autant de « zones d’influence ». L’essor impérialiste de la fin du XIXème siècle et du début du XXème se fait parallèlement à un partage progressif des territoires d’investissement entre les puissances mondiales. Mais ce partage devient rapidement une lutte entre les Etats : lutte pour les colonies, pour les territoires économiques, passage d’une colonie des mains d’une puissance à une autre au cours de guerres coloniales, etc.

Au cours de cette transformation, le capitalisme lui-même change en quelque sorte de nature et, avec lui, le caractère politique de ses guerres. Autrefois progressiste et potentiellement libérateur, le capitalisme devient agonisant, et pourrissant. La guerre de 1914 est donc le produit de cette nouvelle étape dans laquelle est entré le capitalisme. En ce sens, il n’y a pas de retour en arrière possible, il ne peut pas y avoir de capitalisme sain ou pacifique, ni un avenir de paix entre les puissances. Mais, en même temps, la guerre offre les conditions objectives d’une révolte contre le capitalisme : « De libérateur des nations que fut le capitalisme dans la lutte contre le régime féodal, le capitalisme impérialiste est devenu le plus grand oppresseur des nations. Ancien facteur de progrès, le capitalisme est devenu réactionnaire ; il a développé les forces productives au point que l’humanité n’a plus qu’à passer au socialisme, ou bien à subir durant des années, et même des dizaines d’années, la lutte armée des grandes ” puissances pour le maintien artificiel du capitalisme à l’aide de colonies, de monopoles, de privilèges et d’oppressions nationales de toute nature. » [11]

Les « thèses » de Lénine au début de la guerre et la première expression du « défaitisme révolutionnaire »

Le début de la guerre brise l’appareil bolchévique. La plupart des dirigeants en exil sont isolés, quand ils n’ont pas rallié directement l’Union sacrée, voire, pour certains « défensistes », rejoint l’armée française. Lénine se rend à Berne au début du conflit et rédige le 6 septembre 1914 des « thèses » qui jetteront les premières bases d’une réponse politique à la situation. Ces « thèses » [12], rédigées dans l’urgence, s’adressaient tout d’abord aux dirigeants du parti bolchévique en Russie et peuvent se résumer à une dénonciation de la trahison de la majorité des chefs de la Deuxième Internationale et un appel à la lutte contre le patriotisme. Elles avaient pour but de donner une orientation politique au parti au milieu de la confusion générale du début des affrontements armés. Mais, surtout, on y trouve une première mention à ce que sera plus tard la doctrine du « défaitisme révolutionnaire » : « Du point de vue de la classe ouvrière et des masses laborieuses des peuples de Russie, le moindre mal serait la défaite de la monarchie tsariste et de ses armées qui oppriment la Pologne, l’Ukraine et nombre d’autres peuples de Russie, et qui attisent la haine nationale afin de renforcer le joug des Grands-Russes sur les autres nationalités et de consolider le pouvoir réactionnaire et barbare de la monarchie tsariste. » [13]

Comme le remarque Alfred Rosmer dans son étude sur le mouvement ouvrier pendant la Première Guerre mondiale [14], cette formulation est, au départ, très circonstanciée : une défaite du tsarisme serait un « moindre mal », puisqu’elle signifierait la fin du régime autocratique et l’oppression nationale sur les minorités ethniques. Néanmoins, ces thèses sont lues au-delà du cercle des militants sociaux-démocrates russes, puisqu’elles sont également transmises aux militants socialistes suisses et italiens qui s’en inspirent pour la résolution approuvée lors de la conférence italo-suisse de Lugano le 27 septembre 1914.

Le « défaitisme » de Lénine suscite à ce moment beaucoup de critiques au sein du mouvement d’opposition à la guerre et les milieux sociaux-démocrates, notamment chez ceux qui refusaient de voir dans la défaite de leur gouvernement un « moindre mal ». Il s’opposera sur ce point à Trotsky, qui pense que le mot d’ordre de « défaite deson propre gouvernement » est une concession au patriotisme, dans la mesure où il remplace la « lutte révolutionnaire contre la guerre et ses causes » pour la défense d’un « mal mineur ». Lénine répond à Trotsky [15] dans un article de juillet 1915, où il affirme que « la lutte révolutionnaire contre la guerre et ses causes » est une phrase creuse, puisque la seule lutte révolutionnaire contre son propre gouvernement en temps de guerre est, non seulement de souhaiter sa propre défaite, mais de faciliter cette défaite. De la même manière, Lénine répond aussi à Trotsky que désirer et œuvrer pour la défaite de son propre gouvernement ne veut pas dire pour autant souhaiter la victoire du gouvernement adverse (l’Allemagne contre la France, par exemple), puisqu’il s’agit d’une lutte de dimension internationale, où les prolétariats de tous les pays en guerre doivent désirer la défaite de leurs propres gouvernements. Hors de question alors pour les révolutionnaires de faire sauter des ponts ou de contribuer militairement à la victoire de l’armée ennemie. Mais au contraire encourager la fraternisation entre les soldats ennemis dans les tranchées ou déclencher des grèves dans les secteurs stratégiques de l’économie. Ainsi, toute tactique révolutionnaire de lutte antimilitariste n’a de sens et ne peut être efficace que si elle contribue à la défaite de son propre gouvernement et de sa propre bourgeoisie [16].

La « transformation de la guerre mondiale en guerre civile »

L’autre aspect fondamental du programme défendu par Lénine dans ses « thèses » du début du conflit c’est la transformation de la guerre mondiale en guerre civile. D’une certaine façon l’agitation pour la défaite de son propre gouvernement et les actions antimilitaristes qui s’inscrivent dans cette perspective sont déjà un début d’application de ce mot d’ordre. [17] Il s’agit tout simplement de la rupture de la légalité dans le conflit entre les classes que Engels résumait dans la phrase : « Tirez les premiers, messieurs les bourgeois ». Ce serait la bourgeoisie qui pousserait le prolétariat en uniforme à retourner les fusils contre ses officiers et ses gouvernements respectifs.

Cette position n’était en réalité qu’un rappel des positions de principe du mouvement socialiste d’avant la guerre. Appeler à la grève générale insurrectionnelle, voter contre les crédits de guerre, provoquer la fraternisation des soldats, etc., étaient autant de mesures à la portée des principales organisations socialistes européennes qui auraient précipité les événements et facilité la transformation de la guerre mondiale en une guerre vigile entre les classes. C’est dans cet esprit que Lénine ne cesse de revendiquer le manifeste de Bâle de 1912 de l’Internationale dans sa brochure « Le socialisme et la guerre ». Ici, il rappelle l’exemple de la Commune de 1871 et la révolution russe de 1905 comme des conflits internationaux (la guerre franco-prussienne et la guerre russo-japonaise) qui se sont transformés en guerres civiles, c’est-à-dire en révolutions qui ont renversé par la violence le pouvoir politique des classes dominantes.

La transformation de la guerre mondiale en guerre civile devait être par ailleurs facilitée par la crise économique et politique ouverte par la guerre. Le manifeste de Bâle appelait aussi les socialistes à exploiter cette situation en vue de l’agitation de masses pour « précipiter la chute de la domination capitaliste », c’est-à-dire de profiter des difficultés des différents gouvernements pour les renverser.

La guerre avait dégradé considérablement les conditions de vie et de travail des classes populaires européennes. En France, les ouvriers sont remplacés dans les usines par des femmes et des enfants qui, pour le socialiste Millerand, « n’ont pas de droits ». Il n’y a effectivement, plus de droits syndicaux : les réunions syndicales sont à peine tolérées, contre les acquis du mouvement ouvrier de 1848 les journées de travail peuvent maintenant aller jusqu’à douze heures consécutives et les patrons se concertent sur une baisse générale des salaires. L’Union sacrée avait provoqué une baisse considérable du nombre de grèves. Il faudra attendre l’année 1916 pour une reprise de la conflictualité au travail. Cependant, pour Lénine, la lutte de classes ne devait pas s’arrêter au seuil des intérêts « nationaux », ni devant aucune considération « patriotique », ni devant les enjeux de stratégie militaire. Ainsi, la lutte contre le gouvernement ne doit pas être suspendue à la possibilité de la défaite de son armée causée par l’agitation révolutionnaire, puisque déclencher des grèves dans des secteurs stratégiques de l’économie de guerre ou faire de l’agitation antimilitariste auraient facilité la défaite de son propre gouvernement. La défaite militaire de son propre gouvernement affaiblit l’Etat, aide à libérer le prolétariat de son influence idéologique et rend la transformation de la guerre en guerre civile plus facile. Pour le prolétariat, la défaite de son propre gouvernement est donc, en dernière instance, un mal infiniment moindre que la victoire de son propre gouvernement. L’Union sacrée devant l’ennemi extérieur est alors un mal infiniment supérieur à celui de la défaite de son propre gouvernement puisque celui-ci signifie la soumission politique du prolétariat, une trêve dans la lutte de classes ainsi que nous l’avons vu avec l’exemple français.

Chaque échec militaire de son propre gouvernement devait faciliter la tâche de la transformation de la guerre entre gouvernements en guerre entre les classes. Ainsi, défaite de son gouvernement et guerre civile sont les deux aspects inséparables du « défaitisme révolutionnaire » tel que le formule Lénine dans les années 1914-1915.

La partie II de l’article reviendra sur l’internationalisme tel qu’il se reformule avec la conférence de Zimmerwarld, et sur le débat entre Rosa Luxembourg et Lénine sur le défaitisme révolutionnaire.

NOTES

[1] Luxembourg Rosa, « Réponse au camarade E. Vandervelde », mai 1902.

[2] Dans Rosmer Alfred, Le mouvement ouvrier et la Première Guerre mondiale, t. 1, De l’Union sacrée à Zimmerwald, Librairie du travail, 1936, p. 50.

[3] Op. cit., p. 41.

[4] Op. cit., p. 95.

[5] Journal du parti social-démocrate allemand.

[6] Lénine donne tout de même un début de réponse dans la brochure « Le socialisme et la guerre », où il affirme que « les conditions objectives de la fin du XIX° siècle renforçaient tout particulièrement l’opportunisme, l’utilisation de la légalité bourgeoise étant transformée de ce fait en servilité à son égard ; elles créaient une mince couche bureaucratique et aristocratique de la classe ouvrière, et attiraient dans les rangs des partis social démocrates nombre de compagnons de route” petits bourgeois.

La guerre a accéléré ce développement, transformé l’opportunisme en social chauvinisme, et l’alliance tacite des opportunistes avec la bourgeoisie, en une alliance ouverte. »

[7] Lénine, « Le socialisme et la guerre », 1915.

[8] Ibid.

[9] « Si l’on devait définir l’impérialisme aussi brièvement que possible, il faudrait dire qu’il est le stade monopoliste du capitalisme. Cette définition embrasserait l’essentiel, car, d’une part, le capital financier est le résultat de la fusion du capital de quelques grandes banques monopolistes avec le capital de groupements monopolistes d’industriels ; et, d’autre part, le partage du monde est la transition de la politique coloniale, s’étendant sans obstacle aux régions que ne s’est encore appropriée aucune puissance capitaliste, à la politique coloniale de la possession monopolisée de territoires d’un globe entièrement partagé. », Lénine, L’impérialisme stade suprême du capitalisme, 1916.

[10] Ibid.

[11] Ibid.

[12] Signées par « Un groupe de social-démocrates, membres du P.O.S.D.R. », elles sont rédigées par Lénine : « Les tâches de la social-démocratie révolutionnaire dans la guerre européenne », 6 septembre 1914.

[13] Ibid.

[14] Rosmer Alfred, Le mouvement ouvrier pendant la Première Guerre mondiale, t. 2, De Zimmerwald à la Révolution Russe, Mouton Co, 1959, p. 104.

[15] Lénine, « La défaite de son propre gouvernement dans la guerre impérialiste », 1915.

[16] « Il est hors de doute que l’important travail d’agitation contre la guerre effectué par une partie des socialistes anglais, allemands et russes “affaiblissait la puissance militaire” de leurs gouvernements respectifs, mais cette agitation faisait honneur aux socialistes. Ceux-ci doivent expliquer aux masses qu’il n’est point de salut pour elles hors du renversement révolutionnaire de “leurs” gouvernements respectifs, et que les difficultés rencontrées par ces gouvernements dans la guerre actuelle doivent être exploitées précisément à cette fin. », Lénine, « Le socialisme et la guerre ».

[17] « La guerre a, sans conteste, engendré une crise extraordinairement violente et aggravé, à l’extrême la misère des masses. Le caractère réactionnaire de cette guerre, le mensonge éhonté de la bourgeoisie de tous les pays, qui dissimule ses visées de brigandage sous le manteau de l’idéologie “nationale”, suscitent nécessairement, dans la situation révolutionnaire qui existe objectivement, des tendances révolutionnaires au sein des masses. Notre devoir est d’aider à prendre conscience de ces tendances, de les approfondir et de leur donner corps. Seul le mot d’ordre de la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile exprime correctement cette tâche, et toute lutte de classe conséquente pendant la guerre, toute tactique sérieusement appliquée d’“actions de masse” y mène inévitablement. », Lénine, Ibid.

 
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