Palestine vaincra !

Lod, un symbole de la résistance palestinienne en plein cœur d’Israël

Youri Merad

Lod, un symbole de la résistance palestinienne en plein cœur d’Israël

Youri Merad

Un état d’urgence déclaré et des centaines de garde-frontières déployés à Lod, une ville « mixte » d’Israël, où parmi la minorité palestinienne, une nouvelle génération de jeunes s’affrontent de manière frontale à la colonisation sioniste.

L’État d’Israël poursuit son offensive coloniale sanglante à Jérusalem et à Gaza, et a déjà tué plus de 120 palestiniens depuis lundi. Mais le gouvernement réactionnaire de Netanyahu se heurte à une réponse inédite sur son territoire : dans de nombreuses villes israéliennes, la révolte des minorités palestiniennes. C’est le cas de Lod, une ville « mixte » à mi-chemin entre Jérusalem et Tel-Aviv, dont 30% des 70 000 habitants sont arabes, descendants des palestiniens restés sur leur terre après l’occupation de 1948.

Depuis plusieurs jours, les rues de Lod sont le théâtre de scènes de violences inouïes entre les palestiniens, qui protestent contre les attaques du gouvernement israélien, et des bandes sionistes d’extrême-droite venues de tout le pays, appuyées par les forces de répressions étatiques.

Tandis que la Mosquée d’Al-Aqsa était prise d’assaut par la police israélienne ce lundi et que les bombardements incendiaient la bande de Gaza, des centaines de palestiniens ont manifesté à Lod et dans d’autres villes israéliennes, en soutien à leurs frères opprimés et aux familles expulsées par Israël à Sheikh Jarrah :

Des manifestations inédites dans ces territoires colonisés et qui ont fait l’objet d’une forte répression. Une habitante raconte l’intervention des policiers israéliens : « Ils [des Israéliens arabes] voulaient manifester en soutien à Gaza et à la mosquée Al-Aqsa. Mais très vite, les forces de l’ordre sont arrivées et ils ont commencé à tirer des grenades assourdissantes et des gaz lacrymogènes pour mettre un terme à notre rassemblement », rapporte France Info.

Les policiers ont été rejoints par des colons armés pour mener une véritable traque aux manifestants dispersés qui ont tenté de riposter tant bien que mal aux attaques, dans des affrontements incendiaires qui ont duré toute la nuit. Un jeune palestinien de 25 ans, Moussa Hassouna, a été tué d’une balle de fusil dans la poitrine, tirée par des militants israëliens d’extrême-droite. « Je suis vraiment en colère contre les juifs, et la police qui prend leur parti et qui détourne le regard quand ils s’en prennent à nous. Mais nous n’allons pas nous taire » déclarait la manifestante à propos du meurtre.

Depuis, la ville de Lod est le théâtre d’une répression sanglante. Lors des funérailles de Moussa le lendemain, les palestiniens ont manifesté leur colère face aux colons qui sont eux aussi venus, armés, pour tenter d’intimider la foule, déclenchant une nouvelle séquence d’affrontements entre israëliens et arabes israëliens. Face à la colère palestinienne, le premier ministre Netanyahu a aussitôt déclaré un état d’urgence militaire : « Nous avons immédiatement déclaré un état d’urgence spécial à Lod. Les bataillons de garde-frontières viendront de Judée et de Samarie (Cisjordanie) vers des villes mixtes ce soir. »

Ainsi, ce sont des centaines de militaires qui sont intervenus à Lod, Haïfa et Akka, les « villes mixtes » d’Israël, pour défendre les quartiers de colons israëliens et traquer les manifestants palestiniens. Dans les premières 24h de leur arrivée sur place, au moins 26 palestiniens ont été arrêtés sur ces trois villes, et des dizaines de blessés ont été admis à l’hôpital.

Mais la révolte palestinienne dans ces villes s’est accentuée face à la répression, les symboles de l’occupation sionistes sont désormais visés par la jeunesse palestinienne, des dizaines de voitures de colons et une synagogue du quartier juif ont été incendiées, les drapeaux israéliens sont remplacés par le drapeau de la Palestine. La population arabe s’organise et s’arme pour défendre les mosquées prises pour cible par les colons isaraëliens soutenues par les forces militaires du gouvernement.

Ahmad Yousri, interviewé par Le Monde, est un de ces militants actif dans la révolte des palestiniens ces derniers jours en plein coeur d’Israël : « Je n’ai pas de futur dans ma propre ville ! Quand je voudrais me marier, je vais vivre où ? Chez mon père ? Je ne peux pas acheter une maison, c’est trop cher. Mais, eux, les colons, ils viennent de Jérusalem, des collines d’Hébron [en Cisjordanie occupée]. On leur construit des immeubles. Ils ne paient rien ! »

Dans cette ville, comme dans la totalité des villes où sont restés des Palestiniens après l’installation juive en 1948, les arabes sont persécutés et subissent la politique d’apartheid du gouvernement. L’État stigmatise les Palestiniens, les prive progressivement de leurs droits, de leur travail, et envoie des colons s’installer dans les habitations pour remplacer la population arabe.

Comme l’explique Samy Cohen au micro de France Inter, Ahmad fait partie d’une génération de jeunes palestiniens qui n’a connu que Netanyahu au gouvernement, un gouvernement qui depuis 2009 « n’a pas arrêté de fustiger la minorité arabe », en faisant « voter des lois discriminantes ». « La jeune génération arabe palestinienne a grandi sous l’ombre du gouvernement nationaliste », et déclare aujourd’hui « son ras-le-bol ».

Et c’est un ras-le-bol radical qu’exprime la jeunesse palestinienne d’Israël. Ils se révoltent contre des années d’oppressions de leur communauté au sein d’un État colonial, et se solidarisent avec leurs frères et sœurs bombardés à Gaza et dans la West Bank de Jérusalem. Des jeunes qui s’identifient aux mouvements radicaux et internationaux de ces dernières années contre le racisme, les violences policières et l’impérialisme occidental, qui manifestaient l’année dernière dans Jérusalem et les villes occupées d’Israël en reprenant le « I can’t breathe » et le « Palestinian Lives Matter » de BLM après le meurtre de Eyad Hallaq devant la mosquée d’Al-Aqsa par la police israélienne.

Dans cette offensive meurtrière du gouvernement de Netanyahu, soutenu activement par les gouvernements impérialistes européens et américains, une chose est sûre : les grandes puissances craignent la rébellion des Palestiniens et la solidarité internationale de classe qu’elle suscite. En témoignent la force de répression déployée à l’encontre de la jeunesse palestinienne, et la préoccupation du président français notamment, d’empêcher les manifestations de soutien, tandis qu’une première grève de dockers avait lieu en Italie ce samedi, pour bloquer l’acheminement d’armes à Israël en solidarité aux Palestiniens.

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