Le problème (très) politique de la valeur

Les Éditions sociales rééditent les "Théories sur la plus-value" de K. Marx

Les Éditions sociales rééditent les "Théories sur la plus-value" de K. Marx

Pourquoi lire ou relire les Théories sur la plus-value de Karl Marx, qui devaient constituer le livre IV du Capital, et que les Éditions sociales s’apprêtent à rééditer en un volume au printemps prochain ?

[Ill. Erró (né en 1932), Foodscape, 1964, Walker Art Center]

Histoire critique des théories de la plus-value

Pourquoi lire (ou relire) les Théories sur la plus-value de Karl Marx, qui devaient constituer le livre IV du Capital, et que les Editions sociales s’apprêtent à rééditer en un volume au printemps prochain ?

Indispensable outil pour armer une stratégie socialiste de transformation du monde, elles s’avèrent, en dernière analyse, également indispensables à tout combat émancipateur, dans la mesure où les analyses que Marx propose constituent, aujourd’hui encore, l’une des pièces essentielles du système critique le plus abouti du procès de production capitaliste, et donc de ses injustices constitutives. Le mouvement historique trouve en effet son énergie dans le système de production et de répartition de la valeur. Mais, en retour, qu’est-ce qui fait la valeur ?

Quand on vit sous le règne universel de l’objet-marchandise, la question peut paraitre presque trop simple, relevant de ces évidences complexes qu’on rougit à la fois de questionner et qui intimident. Si la question parait simple, d’abord, c’est parce que le capitalisme a fait du marché un champ si général et universel qu’il a littéralement recouvert le monde de ses fétiches, saturé le moindre interstice, tant et si bien que dans chaque chose, nous voyons un prix. Voilà donc la question en apparence réglée : la valeur est faite sur ce grand marché universel et c’est lui qui donne, au capital, la faculté de s’augmenter d’une plus-value. Le capitaliste investit, puis vend, puis empoche un surplus de valeur, en bref un profit : le tour est joué, et la magie du marché semble avoir opérée. C’est la fameuse formule générale du capital : l’argent produit de l’argent. Formule que reprennent à l’envi (et surtout à l’aveugle) les chantres et autres thuriféraires du grand capital qui pensent que l’argent « travaille » et que le travail « coute ». Mais cette formule recèle en fait une évidente contradiction logique. Comme le marché est universel et que toute chose est marchandise, ce qu’un vendeur voudrait gagner d’une main, il le perdrait aussitôt de l’autre, et le monde entier ne serait au bout du compte, sous cette loi, qu’une vaste bulle spéculative marchande puisque toute la valeur ne serait que le produit d’un artifice comptable. Toutes choses égales par ailleurs, il faut donc admettre que, sur le marché, les choses s’achètent et se vendent généralement à leur prix.

Mais, alors, d’où peut venir la valeur si ni l’achat ni la vente ne permettent essentiellement de la réaliser ? De la terre, disaient les physiocrates ; de la division sociale et technique du travail, disait Adam Smith ; de la quantité de travail incorporé dans la marchandise, disait David Ricardo. Quoique toutes ces théories aient pris au sérieux le problème de la valeur, toutes ont échoué, selon Marx, à en expliquer véritablement l’origine. Smith et les physiocrates ont pris les moyens pour les causes, et Ricardo a fondé l’étalon de la valeur sur un phénomène essentiellement hétérogène : le travail. Marx va donc réaliser un pas supplémentaire dans l’élucidation de l’épais mystère qui entoure la production de la valeur.

L’erreur de Ricardo, c’est de n’avoir pas compris que le travail se dédoublait, dans l’opération de son embauche capitaliste, en deux réalités. Sociale d’un côté, marchande de l’autre. Comme réalité sociale, c’est-à-dire comme activité réelle ou encore valeur d’utilité, le travail est fondamentalement hétérogène dans ses formes, et il est impossible de faire de lui l’étalon universel de la valeur, comme le voulait Ricardo. Cependant, sous le régime du salariat, quand le capitaliste constitue les moyens de la production, il n’achète pas cette réalité sociale. Il ne paie pas le prix d’une valeur d’usage, il achète une force de travail, c’est-à-dire un travail anonyme, abstrait, non encore spécifié et, donc, réduit à son expression marchande dont le prix ne s’évalue pas par la valeur de ce qu’il va produire, mais par la valeur de ce qui est nécessaire pour l’entretenir. De la différence entre le prix de la force de travail et la valeur de ce qu’il peut produire résultera la plus-value, ou survaleur, produite dans le procès de travail et aussitôt accaparée par le capitaliste. On voit aussitôt quels enjeux politiques la bataille théorique recèle. Le profit, dans son essence historique, suppose l’existence d’une foule de travailleurs et de travailleuses dépouillés des moyens de production et forcés de vendre leur travail au seul prix de sa force abstraite. Derrière deux réalités en apparence disjointes, plus-value et exploitation, Marx découvre une copule logique indissociable : plus-value est exploitation. Dès lors, comprendre veut dire transformer, car comprendre la réalité de l’exploitation c’est déjà lutter contre ses conditions de possibilités : le capitalisme et le régime de marché.

Une campagne de souscription exceptionnelle

La nouvelle édition reprendra la traduction française établie et dirigée par Gilbert Badia et sera enrichie d’une préface inédite de Riccardo Bellafiore. RPDimanche fait le choix de relayer l’appel à participation à la souscription organisée par les Editions sociales pour mener à bien ce projet :

Précommandez l’ouvrage avant le 4 avril et recevez chez vous les trois tomes des Théories sur la plus-value, réédités en un seul volume, pour 60 euros (au lieu de 70), frais de livraison offerts avec le code theories2024. Le tirage est limité à 500 exemplaires.

Pour cela, vous pouvez passer par notre boutique en ligne et renseigner le code theories2024 pour activer les frais de port gratuit via ce lien :

https://boutique.editionssociales.fr/produit/theories-sur-la-plus-value/

Vous pouvez aussi nous écrire un courrier en précisant vos informations (nom, prénom, adresse, adresse mail) et joindre un chèque à l’ordre des Editions sociales, 21 rue Mélingue 75019 Paris.

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