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20.000 brochures envoyées secrètement par les parents d’élèves aux écoles publiques et privées

Le livret anti-genre : 50 pages d’erreurs et de mensonges

En plein retour dans le paysage médiatique de la polémique autour de la fameuse « Théorie du genre » à l’école, notamment impulsé par le souverain pontifie François et le comeback de La Manif pour Tous, l’association Vigi-gender tente de se frayer une place. Xavier Dolan Z

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Quelle société voulons nous pour nos enfants ?

Voici l’interrogative servant de titre afin d’illustrer la brochure. Après avoir feuilleté les 50 pages qui composent celle-ci, la réponse est évidente : Une société qui trouve normale la discrimination et le sexisme.
Depuis maintenant quelques semaines, les organisations de parents d’élèves anti genre et anti égalité femmes/hommes envoient par la Poste des brochures aux directrices et directeurs d’écoles, proviseurs et principales/principaux des collèges et des lycées de France afin de « prouver » à quel point le genre serait néfaste pour les enfants. Selon eux, celle-ci serait une idéologie propagée dans les écoles afin de rendre chaque petit écolier homosexuel ou transgenre. Ce délire provient lui-même de la mise en place en 2013 de timides avancées pédagogiques sur l’identité de genre et contre le sexisme en milieu scolaire. Idéologie fondée sur un présupposé très grave à savoir que les enfants seraient « naturellement » hétérosexuels et cisgenres.

Pourtant, comme le rappelle l’article d’Adrien Naselli dans Têtu à très juste titre, il est nécessaire de revenir sur un détail : il n’existe pas « une théorie du genre » mais mille théories sur le genre. Le genre, c’est la manière dont sont perçus et dont se comportent les hommes et les femmes dans une société, à une époque et dans un lieu donné. Ce champ d’études qui n’a jamais voulu de mal à personne a été utilisé en 2012-2013 par la fachosphère. Ils l’ont soigneusement transformé en « théorie du genre » pour faire croire à un complot visant à « annuler les différences entre les sexes ». Ils ont tout mélangé : l’homosexualité, la transidentité, le genre.
De ce point de vue la, il semble donc évident que l’éducation des enfants doit permettre de déconstruire les stéréotypes et la binarité de genre, et ce, pour leur propre épanouissement ainsi que le bien d’autrui.
Ce n’est assurément pas la ligne sur laquelle surfent les membres de vigi-gender profondément essentialistes qui cantonnent les personnes assignées femmes à leur rôle et caractéristiques « naturelles » : « [...] Se parer, plaire, séduire, aimer, donner la vie continuent de faire sens pour la condition féminine » (Page 3).
Les affirmations pages suivantes prétendent elles que les études de genres consistent à nier le rôle biologique (illustration ci dessous). Or, le genre désigne la construction sociale de la différence des sexes et les rapports sociaux qui en découlent.
 Le genre ne se réduit donc pas à la variable sexe – c’est-à-dire à une catégorie descriptive qui distingue les hommes et les femmes en fonction de leur sexe biologique - mais désigne la manière dont les humains tendent à diviser et à catégoriser la réalité qu’ils perçoivent dans un système binaire, hiérarchisé et inégalitaire. Il ne s’agit pas, comme voudrait nous le faire croire vigi-gender, de nier la matérialité du corps et les différences qui en découlent mais de montrer que celui-ci n’existe pas dans un état de nature qui pourrait être saisi en dehors de ses significations sociales.

Pour ne donner que quelques exemples en plus, les membres de l’association assimilent la GPA (Gestation pour Autrui) à une « préparation des esprits à la marchandisation des êtres humains et à un esclavagisme moderne ». Ou encore dénoncent les catalogues La Redoute qui promeut des mannequins endrogynes ou s’offusquent de la demande « d’égalité entre personnes hétérosexuelles et homosexuelles et bisexuelles » (Page 45).

Pour le reste, nous vous laissons découvrir par vous-même les trésors naturalisant, discriminatoires, sexistes, homophobes et transphobes dont regorge la brochure. Vous pouvez également vous laissez aller regarder la vidéo intitulée « Théorie du genre ; j’ai lu la brochure envoyé secrètement par les anti-genres aux chefs des établissements » réalisée par une mère de famille nous fait par de ses ressentis à la brochure dont elle qualifie la teneur des propos de « vaste blague ».

La brochure Vigi-genre, deuxième bible du Vatican ?

Dans l’avion qui le ramenait à Rome, le Pape a affirmé avoir évoqué « la théorie du genre » avec un père de famille français. Ce fut l’occasion pour lui de remettre une couche sur ce qu’il qualifie autrement de « colonisation idéologique » après avoir échangé avec un père pratiquant dont le fils aurait déclaré vouloir être une fille lorsqu’il lui a demandé ce qu’il voulait faire plus tard dans la vie. Dans un précédent article, nous faisions alors l’analyse que le pape se fondait sur le témoignage d’une qui aurait la preuve que « la théorie du genre » serait enseignée dans les manuels de collège en France. Et nous nous demandions à quel manuel faisait référence le Pape François, sachant qu’aucun ouvrage ne fait mention de cette fameuse « théorie du genre », ou sinon seulement dans la tête de ceux qui s’opposent aux droits des homosexuels, des personnes intersex ou trans. Cela parait maintenant plus clair. Même si a priori il est difficile d’affirmer que la position du Pape découle directement de la petite brochure vigi-gender, la correspondance avec des éléments de celle-ci sème le doute. En effet, une anecdote très ressemblante apparaît dans le petit livret page 34 : « Propos d’un garçon de retour de l’école : ’Quand je serai grand, on me fera une opération. On enlèvera mon zizi, on me fera un trou, et je deviendrai une fille.’ Interrogé par ses parents, il a répondu que c’était la maîtresse qui expliquait qu’on pouvait faire ça. »

Le doute prête à confusion. Sans prétendre pour autant que le Pape ai lu la brochure, l’histoire du « petit garçon qui veut devenir un fille » doit certainement faire partie de la longue liste des petites anecdotes transphobes qui tournent dans le milieu catho.
Pape ou père de famille, qui êtes vous pour exiger qu’un petit « garçon », comme il en nait chaque jour des milliers dans le monde, devrait se reconnaître dans le genre qui lui a été assigné à la naissance ?


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