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Confinement national

Royaume-Uni. Sous pression, Johnson change de stratégie et décrète le confinement

Après deux semaines de discours contradictoires et d’inaction, le premier ministre britannique Boris Johnson a annoncé, lundi 23 mars au soir, le confinement pour trois semaines de la population du Royaume-Uni. Côté Européen, les presses et les pouvoirs tentent de faire oublier leurs propres manquements en fustigeant la stratégie britannique, pourtant un temps envisagée, de l’immunité collective. Mais le plan britannique, plus cynique dans le discours, est en réalité dans la continuité des politiques continentales.

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Crédit photo : Leon Neal / POOL / AFP

La stratégie de l’immunité collective

Boris Johnson avait déjà attiré sur lui les critiques en affirmant vouloir adopter la stratégie de l’immunité collective, c’est-à-dire celle consistant grosso modo à laisser passer la vague épidémique afin de constituer rapidement un rempart immunitaire suffisant pour ne pas voir revenir le virus à l’automne prochain. Le cynisme scandaleux de cette anti-mesure qui invitait à peine du bout des lèvres les personnes fragiles à « rester chez elles » et à se protéger par leurs propres moyens pendant plus de douze semaines n’a pas tenu face aux critiques. De plus, cette stratégie ouvertement sacrificielle devait se heurter violemment au délabrement du NHS britannique (le système national de santé), qui, rapidement submergé, aurait entrainé mécaniquement une surmortalité catastrophique.

Malgré le scandale des positions aventureuses du premier ministre britannique—qui sont très similaires à celles que Trump défend encore à l’heure actuelle— il serait bon de rappeler que Boris Johnson n’a fait que dire tout haut ce que la majorité des dirigeants européens pensaient d’abord tout bas. La « stratégie » de l’immunité collective, digne d’une gouvernance médiévale, est en réalité le nom ronflant que les pouvoirs politiques donnent à leur propre capitulation sur toute la ligne. Et peut-être serait-il à ce propos utile de rappeler qu’il y a une vingtaine de jours encore, Sibeth Ndiaye déclarait qu’« on ne va pas fermer toutes les écoles de France. Comme quand il y a une épidémie de grippe en France, on ne ferme pas toutes les écoles de France”, (…) il n’y a franchement pas de raison d’annuler ces élections municipales”, (…) on ne va pas arrêter la vie de la France ».

La position britannique révélatrice des faiblesses structurelles des états capitalistes européens

La majorité des grandes presses veulent donc faire de Johnson le mauvais élève, sur fond de dénonciation déguisée du Brexit et d’esprit de corps pro-UE. Cette même UE, pourtant, s’est révélée bien incapable de mettre en place un plan international de production du matériel nécessaire pour faire face (réellement) à l’épidémie ni de coopérer pleinement au niveau de la recherche. Alors que l’Italie se tourne en ces instants cruciaux vers la Chine, Cuba et la Russie, déboutée par ses voisins immédiats, la crise sanitaire révèle l’hypocrisie des prétendues solidarités internationales que vante le système capitaliste à la sauce vieux continent.

Ces trois semaines effroyables ont aussi révélé que les Etats, inféodés jusqu’à l’extrême aux pouvoirs économiques, n’avaient d’autres recours que de faire payer lourdement aux populations, aux travailleurs et aux soignants, le prix de leurs politiques austéritaires dont l’ignominie se révèle à présent au vu de tous. Le confinement décidé par Johnson, trop tard probablement, se révélera comme partout ailleurs en Europe, répressif, aveugle et durable. Partout donc les mêmes lenteurs à freiner l’activité économique non essentielle, partout la même outrecuidance alors que des dizaines de milliers de personnes vont trouver la mort dans cette épidémie et que les personnels soignants sont en grande souffrance, partout les mêmes fautes et partout, demain, les même solutions : remettre enfin tout à plat et construire une alternative historique à ce système qui est la calamité des calamités, car les épidémies passent mais les systèmes demeurent s’ils ne sont renversés.


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