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La grève reconductible des cheminots face à une semaine décisive

Valls, Hollande, Les Républicains : la touchante unanimité contre les grévistes de la SNCF

Les cheminots ont bon dos. « Irresponsables » alors même que les inondations touchent l’hexagone. Ils ne seraient pas « solidaires », ou encore prendraient en « otage » les usagers. La propagande médiatique va bon train. Et c’est en pleine négociation entre la direction de la SNCF et les syndicats pour définir un « nouvel accord d'entreprise » que François Hollande y est allé de son « Il faut savoir arrêter une grève », emprunté à Maurice Thorez. L’euro approche, c’est donc la pression gouvernementale, patronale et médiatique visant à briser la grève des cheminots contre le décret socle et la loi travail qui s’accentue. Damien Bernard

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Pourtant, la propagande gouvernementale a bien du mal à s’ancrer chez les cheminots en lutte. Bien que ce soit le 7ème jour de reconductible, la grève des cheminots reste populaire au sein des ouvriers et des employés, qui représentent la majorité de la population active. Cela est d’autant plus important que le triplet décret socle, convention collective de branche et accord d’entreprise entend donner une estocade de premier ordre au statut de cheminot, déjà fortement détricoté par le processus de privatisation rampant de la SNCF, entrepris depuis plusieurs dizaines d’années par les différents gouvernements. Il est la déclinaison des plans visant à remettre en cause une partie des 35h comme dans les hôpitaux de l’APHP ou à la RATP.

Une « réforme » qui vise à aligner par le bas les conditions de travail

Cette « réforme » vise à niveler par le bas les conditions de travail des salariés du rail, du secteur privé et du secteur public, dans l’objectif d’atteindre l’ouverture totale du trafic voyageurs à la concurrence d’ici 2020-2022. Cela a déjà été le cas pour le FRET, mais aussi dans de nombreux pays d’Europe, par exemple en début d’année en Belgique, où les cheminots avaient répondu par une grève massive. Avec ce plan d’austérité, la SNCF table sur 11.000 à 13.000 suppressions de postes d’ici 2020, sur un total de 149.000 employés, soit 9% des postes.

A y voir de plus près, si elle emprunte son « architecture » au projet de loi travail, la réforme du décret socle n’instaurera pas d’inversion de la hiérarchie des normes. C’est le projet de loi travail qui, s’il n’est pas retiré totalement, fera en sorte de donner le coup final à l’ensemble de la branche du ferroviaire, dont les cheminots de la SNCF. La lutte contre le « décret socle » est ainsi indissociable de la lutte contre le projet de loi travail. Mais c’est aussi la jonction avec les secteurs en grève reconductibles, comme les raffineurs ou les pilotes d’Air France, à l’entrée de l’euro, qui est la condition nécessaire à la construction du rapport de force, indispensable pour battre en brèche Hollande et Pépy.

Une semaine qui s’annonce décisive !

Pour la septième journée consécutive, avec l’impulsion de la CGT et Sud, les assemblée générales organisées partout en France ont reconduit le mouvement de grève pour mardi. Depuis mars, le gouvernement n’a eu cesse de manœuvrer pour désamorcer le mouvement de grève en ralliant à travers des « concessions » la CFDT, puis l’UNSA. L’objectif du gouvernement est bien de désamorcer le front cheminot qui, à la veille de l’euro, pourrait être une épine dans le pied, outre la mobilisation contre la loi travail qui se maintient encore malgré la propagande gouvernementale.

Pourtant, si le gouvernement est prêt à lâcher du lest, y compris au détriment de Pepy, président du directoire de la SNCF, c’est bien que le front de bataille contre les cheminot est stratégique. C’est notamment ce qu’ils ont démontré en 1995, de par leur capacité à entraîner l’ensemble du mouvement ouvrier dans la bataille, en lien avec les étudiants qui, historiquement, ont joué un rôle moteur en alliance avec les cheminots.

Ainsi ces « concessions » sont en réalité des leurres, que la loi Travail, même, détricotera le moment venu. Avec la concurrence du privé, et y compris de ses propres filiales, ce sont à termes les « accords d’entreprise » version loi travail qui s’imposeront dans le privé comme dans le public, que ce soit par les licenciements ou des négociations ultérieures qui viseront au nivellement à la baisse des conditions de travail et des salaires.

Un calendrier favorable à la lutte

A 4 jours de l’euro, un mouvement de reconductible dur chez les cheminots, alliés avec les raffineurs qui en sont à leur troisième semaine de grève reconductible, pourrait bien enflammer le brasier de la lutte contre la loi travail. Le gouvernement en est bien conscient. Il serait même prêt, selon Le Monde, à financer une indemnité de départ à la retraite pour les cheminots qui n’en disposent pas, contrairement à leurs homologues du privé. Il serait prêt à débourser entre 700 à 900 millions d’euros. L’objectif serait de rallier la CGT et Sud, les deux syndicats contestataires. C’est certes une démonstration que la lutte paie, mais c’est aussi une preuve que le rapport de force pourrait bien basculer pour obtenir bien plus que des maigres « concessions ».

Une Assemblée Interprofessionnelle pour coordonner les secteurs en lutte !

Dans ce cadre, la lutte des cheminots s’ancre, notamment en Île-de-France, avec l’émergence d’une avant-garde cheminote déterminée et prête à en découdre. La gare d’Austerlitz se place ainsi résolument comme la pointe avancée de la lutte, portant une plateforme de revendication qui place clairement la nécessité du retrait de la loi travail et pour un décret socle au minimum égal au statut actuel, tout en abordant la question du maintien dans le giron de l’État de la SNCF sous contrôle des cheminots et de la population. C’est aussi en s’adressant aux usagers à travers des tracts que les cheminots popularisent une lutte qui n’est pas seulement la leur, contre ce décret et cette loi qui impacteront non seulement les cheminots, mais aussi les usagers, la sécurité étant la variable d’ajustement de cette privatisation du secteur du rail.

A la gare d’Austerlitz, le développement de comités de grève, auxquels étudiants solidaires se joignent parfois, et la formation de piquets - nécessaires à l’auto-défense contre les tentatives de la SNCF de briser les grèves - sont en quelque sorte les conditions nécessaires au maintien de la grève dans la durée. La caisse de grève, comme celle initiée par les grévistes du Technicentre du Landy est aussi l’une des expressions avancées de l’auto-organisation pour lutter dans la durée contre le chantage au bulletin de paie à zéro imposé par la direction de la SNCF.

Depuis trois semaines s’est aussi mis en place une assemblée générale intergare qui réunit les grévistes de certaines des gares les plus importantes d’Île-de-France - Gare du Nord, Saint-Lazare, Austerlitz. Mais pour gagner, coordonner les différents secteurs en lutte est une tâche cruciale. En ce sens, ces d’embryons de coordination Intergare pourraient se joindre à d’autres secteurs en lutte, à travers notamment des organisations comme les assemblées générales interprofessionnelles. La montée nationale à Paris que les cheminots organisent le 14 juin prochain, dans le cadre de la journée interprofessionnelle de grève contre la loi travail, pourrait en être l’occasion.


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