Le Sénat, à droite toute… 

Après le 2ème recours au 49.3 décidé par Valls et Macron et l’échec de la motion de censure déposée par Les Républicains et l’UDI, le texte de loi devait repasser devant le Sénat avant la dernière lecture qui a eu lieu hier, jeudi 9 juillet, à l’Assemblée Nationale. En majorité de droite, les sénateurs avaient, mercredi soir, donné un coup de barre supplémentaire dans le sens d’un libéralisme triomphant, en introduisant dans le texte des propositions d’amendements aggravant encore les dispositions en défaveur des travailleurs : dispense de contrepartie à donner aux salariés en cas de travail du dimanche, en faveur des entreprises du commerce de détail de moins de 11 salariés ; passage de 5 à 12 du nombre de dimanches ouvrables qu’un maire peut autoriser dans sa commune ; passage de 21 à 24 heures du nombre d’heures travaillées autorisées dans le commerce de détail de certaines zones particulièrement touristiques…

Au total, le Sénat a voté la conformité de deux tiers des articles. Ce n’est donc pas de ce côté-là que la bonne surprise pouvait arriver.

Valls et Macron, le 49.3 à répétition

Pas de surprise non plus du côté du gouvernement et des représentants inflexibles des intérêts du patronat que sont Valls et Macron. Comme on pouvait s’y attendre, ils sont restés fidèles à leur tactique d’utilisation du 49.3 qui, bien que largement scandaleuse et décriée, leur a, dans les faits, parfaitement réussi. Grâce à cet outil de passage en force, ils ont évité, tout au long du parcours épineux de discussion de la loi, la moindre atténuation de cette machine de guerre contre les conditions de travail et le droit des travailleurs.

Le texte de loi issu de ce coup de force regroupe désormais plus de 400 articles contre une centaine à l’origine. Il comporte de nombreuses dispositions allant de la réforme des professions juridiques réglementées à la libéralisation des transports en autocar, en passant par l’extension du travail dominical, ou le plafonnement des indemnités pour licenciement abusif.

De quoi réjouir le patronat et une Angela Merkel, chef d’orchestre européen du « faire rendre gorge aux travailleurs », qui a ainsi pu déclarer que « la France [n’avait] pas besoin de [ses] encouragements et de [ses] félicitations, mais (…) c’est une bonne chose que cette loi ait été adoptée ». L’ombre de la Grèce plane, bien entendu, sur ses propos.

Les députés, une motion de censure ? A quoi bon…

Pourtant on se rappelle que la Loi comptait de nombreux critiques aussi bien dans les rangs de la droite et du centre que du côté du Front de Gauche, d’une partie des écologistes ou même de certains « frondeurs », appartenant au groupe parlementaire socialiste. C’est cette opposition qui risquait de mettre le projet de loi en minorité et qui a amené Valls à utiliser le 49.3 à trois reprises, engageant ainsi par trois fois sa responsabilité.

La constitution de la Vème République stipule que dans ce cas, seul le vote majoritaire d’une motion de censure serait en mesure de stopper l’adoption de la loi. Rappelons qu’après la deuxième utilisation du 49.3, le Front de Gauche n’avait pas été en mesure de recueillir sur sa proposition le nombre de signatures requis et la motion de censure présentée conjointement par Les Républicains et l’UDI (centriste) avait été rejetée.

Cette fois-ci, la dernière, le groupe Les Républicains n’a pas voulu déposer de motion de censure mais annonce qu’il saisira le Conseil Constitutionnel après l’adoption de la Loi, non pas tant qu’il s’y oppose, mais pour mettre en difficulté le gouvernement à propos de cette utilisation répétée du 49.3. Quant aux dix députés Front de Gauche, ils ont annoncé, par la voix de leur chef de file André Chassaigne, qu’ils tenteront, le cas échéant de déposer une motion de censure. Mais il s’agit-là d’une clause de style car ils n’ont pas plus de chances cette fois-ci que la précédente de recueillir les 58 signatures nécessaires.

Il nous restera la rue

Le sort en est donc jeté. Plusieurs informations ont déjà été données dans les rangs des travailleurs et des populations sur les coups que la loi va leur faire subir. Mais tant que le projet de loi se concocte dans les cuisines du Parlement, il n’est encore qu’une sourde menace. Le contexte d’ultralibéralisme et d’austérité dans lequel nous nous trouvons ne va pas tarder, dès ses premières applications, à faire la démonstration de son extrême nocivité. Il appartiendra alors à notre camp de s’organiser pour lutter contre cette loi inique et obtenir son « retrait ».

9/7/15