Une fouille au bulldozer

« Pour des archéologues, effectuer des fouilles revient à détruire une grande partie des découvertes », c’est ce qu’on peut lire inscrit sur le panneau installé devant le chantier de la basilique Saint Sernin du centre-ville de Toulouse. La Mairie se permet de vouloir se passer de la recherche archéologique, pourtant obligatoire dans ce type de cas, sur le chantier entourant la cathédrale de Toulouse en mettant en avant le potentiel destructeur de ces recherches. Si on ne peut pas nier que l’archéologie moderne est responsable de la destruction et de la perte de certains objets précieux par manque de considération ou par souci de rendement, il est un peu fort de chercher à faire croire que des bulldozers balayant le site "à l’aveugle" auront un rendement moins destructeur. En effet, la mairie avance qu’elle continuera de faire ses travaux en postant des « agents spécialisés dans le suivi archéologique » pour empêcher la destruction d’objets ou biens archéologiques pendant que les bulldozers des concessionnaires feront bien attention de ne pas détruire des objets sous leurs grosses roues. Un argumentaire pour le moins ridicule.

« Une rayonnement mondial »

La mairie de Toulouse s’expose donc à des poursuites judiciaires pour avoir enfreint les codes de préservation du patrimoine, pour faire avancer plus rapidement les fouilles lui permettant de faire concourir la ville pour inscrire le site au patrimoine mondial de l’UNESCO le plus vite possible. On touche là au réel objectif de la mise en route rapide du chantier. Celui de l’obtention d’un label valorisant la ville, dans la perspective d’une hausse de la fréquentation touristique. Peu importe donc qu’une grande partie du dit patrimoine soit détruite. A ce titre, les fouilles n’ont même pas été prévues dans le plan d’aménagement de la place Sain Sernin présenté en septembre 2016 aux habitants de la ville.


Par soucis de rendre le site attractif (et donc lucratif) le plus rapidement possible, la mairie de Toulouse entend donc sacrifier un patrimoine à la valeur culturelle inestimable. Mais ne nous y trompons pas, l’archéologie moderne est aussi traversée de logiques économiques visant la rentabilité maximisée. C’est pourquoi il est indispensable d’affirmer que les vestiges font partie du patrimoine commun, et que les fouilles archéologiques doivent dépendre d’un service public débarrassé des contraintes économiques pour éviter la destruction de pans entiers de l’Histoire. Dans la même logique, le fruit de ces recherches doit être disponible à toutes et tous, et donc être exposé gratuitement dans les Musées.