Depuis 2012, on ne compte plus les attaques qui ont été portées contre les fonctionnaires, le plus souvent avec la complicité et l’assentiment de directions syndicales ayant accompagné voire coécrit les réformes. A peine à son poste, sous le gouvernement Ayrault, Lebranchu n’avait pas hésité à prévenir les fonctionnaires, il y a quasiment trois ans jour pour jour : « ce n’est pas une cure d’austérité mais c’est un grand moment de rigueur. Les fonctionnaires sont conscients de l’importance de leur fonction et ont envie que leur pays se redresse, donc ils savent que s’ils y participent, ils peuvent générer aussi leur part de croissance », invoquant la « situation très dure » traversée par la France.

C’est un tout autre ton qu’elle a adopté, le 16 juin, en présentant son projet de revalorisation des débuts et fins de carrière des fonctionnaires. Aucune mention, bien entendu, au point d’indice, gelé depuis Sarkozy, en 2010, et auquel les socialistes n’ont pas touché. Grâce à cette mesure, l’Etat a réalisé, en cinq ans, une économie de 7 milliards d’euros sur le dos des fonctionnaires. En se rendant compte, en revanche, que le salaire de départ d’un enseignant commençait de plus en plus à ressembler à celui d’un smicard, l’Elysée semble avoir pris conscience du danger qu’à leur tour, les enseignants, les catégories B et C réagissent, électoralement, comme les smicards, à savoir en sanctionnant lourdement les socialistes, soit en boudant les urnes, soit en votant pour l’opposition.

Car c’est bien dans la perspective du scrutin présidentiel que l’annonce est faite : le plan prendra effet en 2017. Le calendrier électoral n’y est sans doute pour rien, tout comme dans le cas du prélèvement d’impôt à la source… Par-delà cette annonce de hausse de la rémunération de base, rien n’est vraiment défini, à l’heure actuelle, quant au déroulement interne des grilles indiciaires, et il ne s’agit que d’un projet qui devrait être mis en œuvre sur deux ans. On voit toutes les limites de l’annonce.

Cependant, il n’en a pas fallu plus aux directions syndicales pour se féliciter. Venant de la CFDT, on pouvait s’y attendre, mais même la CGT Fonctionnaires, par la voix de Jean-Marc Canon, a donné un bon point à la ministre. En ces temps de pression sociale au niveau de l’AP-HP et de crise profonde dans les sondages, ce petit coup de pouce syndical n’est pas mal venu pour Hollande. Côté syndicats, en revanche, une chose est d’accueillir positivement une possible augmentation des traitements. C’est une autre paire de manche que de s’en féliciter, sans même aborder les autres sujets et la façon dont c’est par la lutte qu’il faudra imposer le dégel du point indiciaire.

16/06/15