Une mesure toujours discriminatoire et raciste


Face au tollé qu’a provoqué le premier décret et la nécessité de passer l’épreuve du tribunal, Donald Trump a apporté quelques modifications dans cette deuxième version. Le gouvernement a en effet reculé partiellement sur certains points. Ainsi, contrairement au premier décret, l’interdiction d’entrée sur le territoire états-unien ne s’applique cette fois-ci pas aux titulaires d’un permis de séjour permanent, aux binationaux, ni aux personnes qui seront détentrices d’un visa à la veille du 16 mars. De plus, l’Irak, qui entretient des relations diplomatiques avec les États-Unis, ne figure plus dans la listes des pays concernés, restant de ce fait l’Iran, la Syrie, le Soudan, la Libye, la Somalie et le Yémen. Enfin, le décret ne mentionne plus de dispositions particulières concernant le sort de minorités religieuses, notamment les chrétiens d’Orient, et ce dans le but de présenter le décret comme une mesure non discriminatoire d’un point de vue religieux. Cependant il n’aura échappé à personne que cette mesure vise toujours six pays dont la population est à grande majorité musulmane. Cette mesure, qui bloque toujours l’entrée aux réfugiés, conserve toujours sa nature xénophobe, raciste, islamophobe, et constitue de ce fait une violation à la convention de Genève, dont les États-Unis sont signataires, ainsi qu’à la loi sur l’immigration et la nationalité (« Immigration and Nationality Act »), qui interdisent toute discrimination d’entrée sur le territoire en fonction de son origine, son sexe, sa « race »...

Ainsi, en dépit de ces quelques modifications, les États d’Hawaï et de Washington ont contesté en justice cette nouvelle version, qui, dans la large mesure reste une copie de la précédente, continuant à « violer des principes constitutionnels en visant des pays musulmans ».

Une bataille judiciaire qui reflète les difficultés de Trump à gouverner


Devant ces obstacles légaux et politiques, qui témoignent des difficultés de Trump à gouverner et à créer un véritable rapport de force pour imposer ses mesures, ce dernier ne semble pas prêt à céder et n’hésite pas à remettre ouvertement en cause la justice américaine, qu’il accuse « d’abus de pouvoir sans précédent », de « pire excès de pouvoir judiciaire jamais commis », promettant d’aller jusqu’à la Cour Suprême pour essayer de faire passer non pas le deuxième décret mais le premier : « Je pense que nous devrions revenir au premier et aller jusqu’au bout, c’est ce que je voulais faire dès le début ».

Ce dernier souhaite ainsi démontrer qu’il tient ses promesses électorales afin de renforcer sa popularité parmi son électorat conservateur et xénophobe et d’avoir une certaine légitimité pour obtenir le soutien de son parti, qu’il n’a pas entièrement aujourd’hui. Pour ce faire, lui et son gouvernement ne cessent de scander la nécessité et la « vitalité » de cette mesure pour le maintien de la sécurité nationale et pour la lutte antiterroriste. Ainsi ce dernier ne fait que pousser jusqu’à l’extrême la logique hypocrite dont certains États impérialistes s’arguent ces derniers temps : stigmatisation voire criminalisation des migrants et/ou des personnes musulmanes ou assignées comme telles afin de lutter contre « le terrorisme », pourtant largement provoqué par la misère et les désastres des interventions impérialistes .

Les opposants à ce décret ne semblent cependant pas céder à cette pression gouvernementale : « Nous n’allons pas nous laisser intimider par les menaces ni les actions du gouvernement fédéral », déclare un juge fédéral.

Parmi eux, des membres de l’institution judiciaire, de l’establishment politique, qu’ils soient démocrates mais également républicains, ainsi qu’une grande partie du patronat, qui, pour des intérêts économiques, a exprimé son opposition à cette mesure. Toute cette hostilité à l’égard du gouvernement de Trump et de ses mesures racistes, réactionnaires et protectionnistes témoignent des contradictions profondes qui traversent aujourd’hui les classes dominantes et de leurs difficultés à gouverner et à faire face à la crise. Ainsi, malgré les discours, la posture et la démagogie, le gouvernement de Trump semble déjà être en train de montrer toutes les contradictions et les difficultés qu’il rencontre pour gouverner. En attendant un verdict final, qui pourrait ne pas advenir avant plusieurs mois, Donald Trump, loin de créer le consensus, va devoir faire face à cette contestation importante, qui surgit au sein des sphères institutionnelles et politiques mais également au sein de la population, qui s’est dernièrement fortement mobilisée contre ce décret anti-immigration et islamophobe.