Laure Varlet

L’incohérence de la version des policiers

 
Les vidéos qui ont circulé dès le soir du 26 mai nous font revivre la scène. Romain, photographe de 28 ans, est présent en fin de manifestation contre la loi Travail lorsque plusieurs manifestants réclament la libération d’un lycéen interpellé dans la cour d’un immeuble par des policiers. Tout à coup, on aperçoit un policier lancer une grenade de désencerclement au milieu des manifestants. Dans la même vidéo, on voit Romain s’écrouler par terre, la tête en sang, et les manifestants autour de lui qui s’affolent pour appeler les secours. Mais même à ce moment-là, alors que plusieurs manifestants criaient qu’il y avait un blessé, les policiers continuent de charger et l’atmosphère se remplit de gaz lacrymogène.

À l’époque, une enquête pénale pour « violence volontaire par dépositaire de l’autorité publique » avait été ouverte par le parquet. Selon les informations qui avaient été données, le policier responsable du jet de cette grenade avait été simplement réaffecté dans un service « moins exposé » et la version des faits donnée par la police tentait de justifier cette brutale répression en disant qu’ils auraient été face à une situation d’émeute qui justifierait une telle réponse violente de leur part. Avant même de connaître les premiers résultats de l’enquête rendus publics ces derniers jours, plusieurs témoins avaient déclaré, déjà à l’époque, que les policiers avaient brutalisé Romain, même une fois qu’il était blessé et dans le camion des pompiers. Aujourd’hui, l’enquête va dans le sens de contredire la version donnée par les policiers car aucune émeute n’était en cours au moment où la grenade a été lancée.

Lutter contre la répression, une tâche de l’ensemble du mouvement social

 
Comme on peut le voir dans plusieurs cas de répression lors du mouvement contre la loi Travail, les policiers cherchent à justifier leur violence et la répression, à l’origine de plusieurs blessés dont quelques-uns très graves, lors des manifestations du printemps dernier. Les policiers se reposent sur le fait que leur parole est sensée être plus écoutée par l’opinion publique que celle des manifestants, parole qui en plus est relayée et crédibilisée par le travail des médias dominants. Du côté de la « justice », il n’y a rien de mieux à espérer : les nombreux procès et condamnations contre des manifestants ces derniers mois montrent, sans équivoque, de quel côté de la barricade elle se situe.

Mais malheureusement pour le gouvernement et l’État, quelque chose commence à changer. Depuis que l’expérience des forces de répression a été faite par de nombreux manifestants au printemps, les cas de violences policières dans les quartiers ne peuvent plus être passés sous silence, comme en témoigne le grand meeting contre les violences policières, le racisme et l’islamophobie, organisé ce jeudi 6 octobre à l’Université de Paris 1 – Tolbiac . Un premier pas pour unifier nos forces contre la répression et les violences policières, un premier pas qui doit en augurer d’autres, à commencer par la manifestation contre les violences policières et en soutien aux inculpés prévue le 15 octobre prochain , et surtout la mobilisation nationale à Amiens du 19 et 20 octobre, en soutien aux salariés de Goodyear qui risquent la prison pour avoir défendu leurs emplois.