La crise latente d’EELV aura fini par exploser. Depuis la parenthèse de la participation au gouvernement Ayrault, le parti de Cécile Duflot est divisé, principalement sur la question de son rapport au gouvernement et au PS. Une majorité, autour de Duflot, fait mine d’en tirer un bilan négatif. Au contraire, une minorité d’environ un cinquième des membres, autour de de Rugy et Placé, prône un retour au gouvernement, pour y défendre de l’intérieur la question écologique. Traduction : électoralement, est-ce un calcul judicieux que d’apparaître comme plutôt dans l’opposition à un parti socialiste en crise profonde, et de se rapprocher du Front de Gauche, ou vaut-il mieux au contraire maintenir des élus aux régionales par une alliance avec le PS, et surtout viser l’Elysée avec eux en 2017 ? Autrement dit, veut-on taper sur les classes populaires avec Hollande ou avec Mélenchon ? Mais précisons…

Chez les droitiers, par opposition aux « gauchistes » de la ligne Duflot, de Rugy est assurément celui qui a le plus de constance. Défendant depuis longtemps une alliance large, jusqu’au Modem, il apparaît comme moins opportuniste qu’un Placé, longtemps n°2 du parti, plus récemment rangé à cette ligne. Tous deux présidents du groupe, respectivement au Parlement et au Sénat, leur démission d’EELV provoque une crise des groupes parlementaires. Au Sénat par exemple, le groupe écologiste rassemblant les EELV et les nouveaux ex-EELV est forcé de s’entendre s’il ne veut pas disparaître. En effet, le groupe de 10 atteint à peine le minimum, et en cas de défection d’un seul, c’est tout le groupe qui disparaît. C’est cette crise qui a provoqué l’annulation de la journée de rentrée des parlementaires verts ; reste à savoir comment ils s’entendront d’ici à la séance parlementaire du 15 septembre, qui doit statuer sur le survol de la Syrie.

Les deux compères lancent donc leur rassemblement, qui s’appellera « Écologistes ! » et finalement pas « Union des Démocrates Écologistes », et qui cherche à dialoguer avec le PS tout en ralliant des petits mouvements comme le Front Démocrate ou Génération Écologie. Avec un bon sens du timing, c’est le jour de sa démission que de Rugy a sorti son livre intitulé Écologie et gauchisme : il faut choisir, combattant la ligne dite « gauchiste » de son ancien parti et défendant un « écologisme réformiste ».

De son côté, Duflot a beau jeu d’incarner une figure plus oppositionnelle, plus jeune aussi, cherchant à dialoguer avec un potentiel électorat jeune, touché par les questions écologiques, mais souvent anti-productiviste et anti-parti. C’est notamment l’objet de son livre Le Grand Virage, où elle réalise son auto-promotion en vue de 2017. Elle y prétend incarner un débouché politique des anticapitalistes aux tenants d’une croissance verte, en passant par les décroissants et les zadistes. Et cela tout en se singularisant de Hollande, mais aussi de Mélenchon et son souverainisme de gauche, par un européisme affligeant… Un difficile numéro d’équilibrisme qui, en cas de victoire électorale, se termine toujours comme à Grenoble (où la mairie EELV-PG vend l’éclairage public à Bouygues par exemple, ou encore où la gratuité des transports promise n’arrivera jamais…) ou en Grèce avec le mémorandum de Tsipras.

A quelques semaines de la COP21, il est nécessaire de faire entendre un discours de classe sur cette question centrale qu’est l’écologie, car c’est seulement en s’organisant pour récupérer des mains de la classe dominante les moyens de production, que nous pourrons planifier une production différente, respectueuse de la nature et des besoins humains.