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Balkans

Bosnie. Des criminels de guerre élus, bagarres et renforcement des nationalistes aux municipales

Une semaine après le référendum nationaliste en Republika Srpska sur la « fête nationale » de l’entité serbe de Bosnie-Herzégovine, les élections municipales dans le pays confirment la poussé des partis nationalistes et leur rhétorique. Une tactique que les classes dominantes du pays sont en train d’utiliser pour cacher les vrais problèmes des masses : la pauvreté, le chômage.

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Elvis Kusljugić, depuis Tuzla, Bosnie-Herzégovine.

Rares sont les pays où les élections locales sont aussi importantes qu’en Bosnie-Herzégovine. Cela se comprend si on prend en compte que depuis les accords de paix de Dayton (1995) le pays a été largement décentralisé, divisé en deux entités la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la Republika Srpska, en plus du district de Brčko. A son tour la Fédération est divisée en 10 cantons, chacun ayant son propre gouvernement et constitution. Enfin, les municipalités et les villes ont leurs propres administrations faisant d’elles le plus bas des quatre niveaux de pouvoir qui constituent le pouvoir dans le pays.

A cause des imprécisions et de la complexité d’un tel système, les gouvernements locaux sont la chose la plus proche d’un gouvernement réel en Bosnie-Herzégovine. C’est à ce niveau qui se décide comment et où l’argent du budget va être dépensée. Il est intéressant de noter ici qu’au moment où cet argent arrive aux municipalités et les villes, il est déjà passé par trois filtres, trois niveaux de gouvernement (l’Etat, l’entité et le canton), chacun d’eux restant avec une part significative.

Cependant, tout fonds qui arrive au gouvernement local est suffisant pour susciter l’intérêt aussi bien de la classe politique au pouvoir que des masses dont la survie dépend de l’administration locale. En Republika Srpska les élections locales sont si importantes que le leader du parti nationaliste serbe au pouvoir, Milorad Dodik, était prêt à mettre en avant une menace de guerre en tant qu’argument électoral.

Depuis la vague de mobilisations de 2014 et les dernières élections générales, la Bosnie a connu une sorte de resurgissement du nationalisme. Les principaux partis nationalistes des trois peuples constitutifs (Bosniaques, Serbes et Croates) sont devenus plus forts et importants pour la première fois depuis la fin de la guerre (1992-1995). Ce changement a été accompagné d’une plus forte présence de la rhétorique nationaliste dans la plupart des médias dominants. Les efforts des dirigeants nationalistes et leurs partis de raviver de vieilles flammes et blessures de la guerre à donné lieu à des débats sur des crimes de guerre et sur génocides qui prenaient plus de place dans les campagnes et les médias que les vrais problèmes comme la pauvreté, le bas niveau de vie, le chômage, etc.

Le cas de Tuzla, au nord-est du pays, est particulier car Tuzla c’est la seule ville de l’Etat où les partis nationalistes n’ont jamais gagné les élections et la ville a une très longue et forte tradition antinationaliste et de gauche. C’est de Tuzla qui est parti l’explosion sociale de 2014 et la ville est devenue son épicentre. Tuzla a eu le même maire depuis 12 ans et un gouvernement local composé majoritairement de membres du SDP – un parti bosniaque social-démocrate de centre-gauche.

Une coalition nationaliste à Tuzla a décidé cette année de porter un candidat à maire qui déclare ouvertement être fier du fait que son grand-père ait été exécuté par les partisans, dirigés par le Parti Communiste, pendant la Seconde Guerre Mondiale car il était un officier fasciste et collaborationniste avec le régime fasciste croate. Ils ont décidé de mener une campagne révisionniste sur l’histoire de la Bosnie et de la Seconde Guerre Mondiale où les Partisans apparaissaient comme les « méchants » et les collaborationnistes comme des « victimes des circonstances » qui, au fond, ne voulaient que le mieux pour leur peuple.

Mener une telle campagne dans une ville qui se vante de son glorieux passé antifasciste était un geste osé. Et comme on pourrait l’imaginer, cela n’a pas été un choix très intelligent. Cela a permis au SDP de remporter aussi bien la mairie que la plupart des sièges du conseil municipal. La ville se conserve sa réputation de place forte de l’antinationalisme et de la social-démocratie. Les nationalistes bosniaques ont gagné toutes les autres grandes villes de la Fédération et le SNSD de Dodik a fait de même en Republika Srpska.

La situation en général est sombre. Mais il y a des exemples où la situation est juste complètement noire. Dans la ville de Stolac, dans le sud du pays, les élections ont été annulées quand Salmir Kaplan, un dirigeant bosniaque de droite, a assommé le président croate de la commission électorale avec un coup de pied circulaire à la tête. Dans certains endroits des personnes condamnées pour corruption, kidnapping et abuse d’autorité ont été élus maires. Mais le champion de l’absurdité cette année est pour la ville de Velika Kladuša qui a élu comme maire le criminel de guerre Fikret Abdić.


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