La question de la violence dans le football a déjà fait couler beaucoup d’encre, entrainant la plupart du temps des amalgames douteuses. En Egypte, la question des « Ultras », au vu de leur implication dans la chute de Moubarak, est un enjeu politique important. Les supporters rivaux ont su, afin de faire tomber le régime et prêter main forte aux manifestants, mettre de côté leurs différends afin de participer activemment, dans la rue, à la résistance contre la police et l’armée. Dès lors, la tragédie de Port-Saïd compromet cette « union ».

Une affaire trouble

A la suite du drame, les supporters Caïrotes d’Al-Ahly, particulièrement sur le devant de la scène lors de la Révolution, ont accusés les supporters de Al-Masri de complicité avec les forces de l’ordre. Ces dernières ont réfuté ces accusations en affirmant que « les violences de Port-Saïd étaient le travail d’agents infiltrés et non celui des Ultras ». A l’annonce du premier verdict, en avril 2012, de nombreuses voix de contestation se sont élevées à Port-Saïd, affirmant que ces violences avaient été orchestrées par la police et/ou les partisans de Moubarak. De leur côté, les Ultras d’Al-Ahly ont réclamés des sanctions, sous peine de lourdes représailles, comme en témoigne le slogan « Justice ou chaos ».

C’est dans ce contexte explosif que la justice egyptienne a confirmé le verdict d’avril 2012 pour 11 des supporters jugés. Par ailleurs, les agents de police et leurs dirigeants incriminés ont tous échappés à la peine capitale, en étant soit condamnés à quelques années de prison, soit disculpés. Pourtant une enquête parlementaire a établi la responsabilité de la police égyptienne. Selon le quotidien gouvernemental Al-Ahram, les forces policières ont sous-estimé la possibilité d’affrontements dans le stade de Port-Saïd.

Un déchirement qui profite au pouvoir en place

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Au delà du verdict, nous assistons à un véritable déchirement entre supporters Ultras qui, quelques mois seulement plus tôt, avaient réussi à outrepasser leurs rivalités pour s’unir jusqu’à faire tomber le règime dictatorial de Moubarak. Persécutés sous le règne de ce dernier, puis sous Morsi, aujourd’hui sous le régime du maréchal Al-Sissi, en condamnant les Ultras, en les montant les uns contre les autres, en validant des décisions de justice prises sous le gouvernement précédent, c’est l’une des ailes marchantes du processus révolutionnaire de 2011 que les militaires égyptiens aujourd’hui visent, s’acharnant à baillonner toute opposition.