800 euros de prime : le cache misère de la condition enseignante.

Avec un salaire moyen de 2 189 euros net contre 2 490 euros pour un professeur certifié et 3 483 pour un agrégé du secondaire, les professeurs des écoles font face à une inégalité de traitement que rien, ni en termes de diplôme, ni en termes de condition de travail, ne saurait justifier. Cette division des professeurs en différentes catégories maintient une hiérarchie qui n’a d’autre but que de diviser le corps enseignant. L’augmentation de 800 euros de la prime annuelle portant à une prime totale de 1200 euros, vise, selon les mots de langage du gouvernement, à rétablir une égalité entre enseignants du primaire et du secondaire. Mais de quelle égalité parle-t-il en vérité ? Si alignement de la prime il y a, il faut sans doute rappeler que cela ne vaut pas pour les salaires, et encore moins pour les retraites sur lesquelles la variation du montant de la prime n’a aucune incidence. Si le gouvernement veut être cohérent avec lui-même, c’est l’alignement réel de la rémunération salariale des professeurs du primaire sur ceux du secondaire qu’il faut mettre en place.

Stop au mythe de la « crise des vocations », haro sur les conditions de travail

Mal lotis, les professeurs des écoles ? Bien entendu, et pas seulement du point de vue du salaire. Chaque année, le nombre de candidats inscrits aux concours baisse, tandis que les postes non pourvus aux sortir des concours augmentent. Cela, alors même que dans certaines académies, comme à Créteil, le nombre de créations de postes reste largement insuffisant face à la croissance démographique. A la rentrée 2015, selon le Café pédagogique, l’afflux de 25 400 écoliers supplémentaires n’a donné lieu qu’à 464 ouvertures de classe. Les mesures prises par le gouvernement en terme de relance de la scolarisation et de lutte contre les inégalités sont bien en deçà des objectifs affichés : selon le SNUipp-FSU, entre la rentrée 2013 et celle de 2015, seuls 2 210 postes ont été créés par rapport à l’objectif des 7 000 du plan de refondation de l’éducation, visant notamment à compenser la pratique de non remplacement d’un fonctionnaire sur trois mise en place par Sarkozy. Cette pénurie – une « crise des vocations » qui tient autant du manque d’attractivité monétaire que de conditions de travail de plus en plus difficiles - conduit à l’engorgement des classes en sureffectif, à des non remplacements des professeurs absents... aggravant de fait la situation de pénurie et participant au phénomène de désertion voire d’abandon qui touche les jeunes enseignants. La boucle est bouclée.

La prudence du gouvernement alors que le fond de l’air est rouge

Face à cela, l’augmentation de 800 euros de la prime annuelle n’est qu’une miette, un cache misère destiné à faire taire une colère enseignante, qui s’est déjà exprimée ces dernières années par la contestation de la réforme du collège – une réforme qui fait l’objet d’un rejet large et doit entrer en application à la rentrée prochaine. Cette concession mineure et inattendue s’explique d’autant mieux qu’elle s’inscrit dans une temporalité où l’entrée des fonctionnaires dans la bataille contre la loi El-Khomri pourrait bien faire basculer la donne et offrir des perspectives de victoire à ses opposants dont bon nombre d’enseignants font partie.