Un projet de loi pourtant déjà insuffisant

 
Quel triste temps pour les personnes et associations Trans qui jugeaient déjà que la version de l’article 18 quater du projet de loi de « Justice du XXIème siècle » était insuffisante. Malgré le fait que celui-ci permettait de démédicaliser le processus de changement d’état civil, restait encore obligatoire le fait de passer par un tribunal de grande instance pour y parvenir et d’être représenté par un avocat. Autrement dit, il était encore inenvisageable d’avoir la possibilité de se dire homme, femme, ou non-binaire, que ce soit après avoir effectué une opération de réassignation de genre ou non, ou un traitement hormonal ou non, avant d’avoir prouvé avoir « subi des traitement médicaux et chirurgicaux de sorte qu’il ne possède plus les caractéristique de son sexe d’origine ». Cette mesure, déjà plus qu’aberrante, posait pourtant déjà ‘problème’ à savoir la lassitude laissée au juge sur l’ampleur des changements requis. Le gouvernement voulant, de son côté, que les requérants prouvent que leur sexe à l’état civil ne correspond pas à celui auquel ils appartiennent « de manière sincère et continu »..

Le retour du « critère médical »

 
Si la majorité des personnes Trans ne se satisfaisait pas des avancées que ces amendements originels proposent, elles redoutaient encore plus les amendements des sénateurs de la droite et du centre qui veulent réinstaurer la médicalisation dans le processus de changement d’état civil. Il y a de quoi. Réunie mercredi dernier, sous la présidence de Philippe Bas, membre du parti Les Républicains, la commission des lois, favorable à « une procédure mieux encadrée » souhaite que le juge chargé de statuer sur le changement d’état civil puisse se prononcer sur des « critères objectifs, y compris de nature médicale », cela « sans exiger une intervention chirurgicale irréversible  » mais « pas uniquement au vu de la volonté exprimée par la personne  ». Autrement dit, le texte est reparti à l’Assemblée dans une version encore moins conforme aux revendications qu’à l’arrivée.
C’est notamment au sénateur centriste Yves Détraigne, rapporteur du texte au Sénat, que l’on doit cette modification. Il affirme s’être inspiré d’un arrêt de la cour de cassation de 1992 pour présenter un amendement établissant que la personne requérante présente bien des documents d’ordre médical « dans un souci d’objectivation de la procédure, et pour s’assurer que la demande de changement de sexe à l’état civil ne repose pas sur un trouble temporaire ». Lui qui avait déjà montré sa désapprobation face à la démédicalisation du changement d’état civil lors de la commission mixte parlementaire.

Nous ne pouvons que souhaiter, à l’instar d’autres pays dont l’Irlande, la Norvège, Malte, le Danemark ou l’Argentine qui ont supprimés l’obligation de produire des certificats médicaux pour obtenir la modification de son genre à l’état civil au profit du principe de l’autodétermination des personnes, que la France, s’obstinant à trainer des pieds, octroie le droit à des personnes de pouvoir disposer librement de leur corps. Leur octroie la possibilité de vivre en accord avec leur genre. Autrement dit, d’exister et d’être reconnue simplement comme elles se sentent.