« Je ferais presque n’importe quoi pour dissuader les gens d’Amérique centrale... »

C’est le 6 mars au soir que John Kelly a déclaré cet objectif sur la chaîne télévisée américaine CNN. Il précise lors de l’interview qu’il s’agit de mettre en place la séparation des familles à la frontière mexicaine. En effet, on voit à quel point John Kelly tient son travail à cœur : penser à séparer des familles vivant déjà dans des conditions précaires, pour isoler plus encore les personnes immigrées.

Oui, le secrétaire à la Sécurité intérieure fait bien son travail ; il est aussi un des premiers soutiens de Donald Trump dans ses décrets anti-immigration. C’est donc sans surprise que ses propositions rentrent tout à fait dans la logique raciste, austéritaire de la politique de Donald Trump. Ce dernier a signé, ce même lundi 6 mars, un nouveau décret qui interdit pendant 90 jours l’entrée aux États-Unis de ressortissants de six pays musulmans. Si John Kelly veut jouer sur l’affect pour dissuader, ce n’est pas pour autant que les familles immigrées pourront réellement choisir de continuer leur route sur le territoire états-unien ou ailleurs. Ainsi, combien de familles se verront obligées d’être séparées, ne pouvant prendre d’autres chemins ? John Kelly pense-t-il vraiment que les immigrants clandestins ont choisi de l’être ?
« Que deviendraient les enfants arrachés à leurs parents ? » demande le présentateur. Si la réponse de Kelly a le mérite d’être claire pour les enfants, elle reste très vague quant aux parents : « On les traiterait bien... », dit-il en expliquant qu’ils seraient placés dans des foyers spécialisés ou dans des familles d’accueil, « ...pendant qu’on s’occupe de leurs parents ». En plus de devoir se séparer de leurs enfants, le sort réservé aux parents reste on ne peut plus flou.

Cette mesure « dissuasive » revient dans les faits à nier tout sentiment, tout affect chez les parents et enfants immigrés : oui les immigrés clandestins sont humains et non des marionnettes que les grands dirigeants peuvent déplacer à leur bon vouloir. Toute personne doit pouvoir vivre une vie non seulement décente, mais aussi sans contrôle sur sa vie privée.

« ...de se lancer dans ces réseaux très dangereux qui les amènent [...] jusqu’aux États-Unis. »

Pour justifier une telle mesure, le secrétaire à la Sécurité nationale énonce un discours très paternaliste, s’érigeant comme celui qui pense au « bien » des immigrés, qui pense les « protéger » en mettant en place cette proposition. Le chargé du contrôle de l’immigration et de la construction d’un mur à la frontière avec le Mexique ajoute que le Mexique serait, selon ses propos, « tout aussi déterminé à détruire ces réseaux de passeurs très dangereux dans lesquels une immense majorité de femmes y subissent des violences sexuelles ».

Tout d’abord, les réseaux clandestins qu’empruntent les migrants sont, en effet, dangereux… parce que clandestins. La faute à qui ? Si ces derniers organisent des réseaux d’immigration clandestine, qui deviennent des lieux dangereux, d’abus et de viols, c’est d’abord parce que les frontières existent, enclavant les populations opprimées là où elles subissent l’oppression, qu’elle soit raciste, islamophobe, ou conséquences de guerres.

Encore une fois, les immigrés choisissent-ils la clandestinité ? Faire appel à de tels réseaux de passeurs n’est en réalité plus un choix, mais une nécessité pour la plupart des populations immigrées qui quittent misère ou guerre dans leur pays d’origine. Pour en finir avec ces politiques xénophobes et répressives, nous devons imposer la liberté de circulation pour toutes et tous, la régularisation de tous les sans-papiers et la suppression des frontières qui ont déjà causé bien trop de morts.