Une nécessité écologique

Le Parlement européen, le Conseil des ministres et la Commission européenne ont donc conclu un accord le 30 juin 2016 concernant la réglementation du chalutage en eau profonde. L’utilisation des chaluts, ces grands filets que l’on traîne sur les fonds marins, est en effet désastreuse pour la préservation et la reproduction des espèces : elle détruit les écosystèmes (notamment les coraux profonds et les éponges) et les zones de fraie (lieux de reproduction des espèces) et entraîne un taux élevé de captures non désirées. Le texte prévoit l’interdiction du chalutage profond à plus de 800 mètres et à plus de 400 mètres pour les zones comportant des environnements marins vulnérables. L’opinion publique européenne avait bien compris les nécessités d’un tel accord : une pétition lancée par l’association Bloom, qui se bat contre la pêche en eaux profondes, avait récolté 900 000 signatures.

Un accord au rabais

Si cet accord est une avancée, il est largement insuffisant : le chalutage profond ne concerne qu’1,5 % des débarquements (c’est-à-dire la quantité de poissons débarquée dans les ports) et le chalutage côtier, beaucoup plus généralisé, est aussi particulièrement néfaste pour des zones moins profondes. L’association Bloom, réclamait d’ailleurs 600 mètres plutôt que 800 mètres.

De plus, l’accord ne s’appliquera qu’aux zones économiques exclusives (ZEE), alors que de très nombreux bateaux, notamment espagnols, ont l’essentiel de leurs activités dans les eaux internationales. Le saccage pourra continuer dans ces endroits-là !

Les lobbys européens de l’industrie capitaliste ont eu la peau du texte

La surpêche et la mise en danger des stocks halieutiques est évidemment à lier avec une activité industrielle toujours plus intense, qui se fait au détriment du respect de l’environnement. L’industrie capitaliste cherche à avoir la peau de l’environnement pour ses profits, quitte à se placer dans une contradiction fondamentale : détruirela source de ses profits. Mais les géants de la pêche, comme Intermarché en France, assument cette contradiction et font tout pour limiter les mesures qui saperaient leurs profits. Le lobbying est particulièrement actif et efficace à Bruxelles : la rapporteuse française du texte, Isabelle Thomas, est marraine du lobby le plus actif en France, Blue Fish, un conflit d’intérêt pro-patronal sur lequel le Parlement européen a fermé les yeux. S’imagine-t-on Serge Dassault rapporteur d’un texte sur le financement de l’armement ?