Après le passage en force, mardi, d’un Manuel Valls dégainant pour la deuxième fois l’article 49.3 pour faire passer au plus vite la très contestée et très détestable loi Macron, chacun, dans les rangs de l’Assemblée, y était allé de son interpellation, indignation, exhortation. La droite « Républicains et UDI » confondus, avaient claqué la porte et déposé une motion de censure présentée hier, jeudi, au vote des députés. Le front de gauche, après avoir dûment interpellé les socialistes par la bouche d’une Marie-George Buffet vent-debout, n’a pas été en mesure de déposer une motion de censure « de gauche », faute d’avoir recueilli les 58 voix nécessaires. Quant aux « frondeurs », renaudeurs mais pas téméraires, ils avaient annoncé qu’ils ne voteraient pas la censure. Seule était donc en lice aujourd’hui la motion de la droite.

Après tout ce ramdam, on aurait malgré tout pu s’attendre à un jeudi animé à l’assemblée. Il n’en a rien été. Beaucoup de députés ne se sont même pas déplacés, privilégiant les cérémonies du 18 juin, évènement nettement plus visible et où il était sans doute plus utile de se montrer.

Une motion de censure de droite soutenue par le front de gauche

Comme un calcul purement mathématique pouvait déjà le prévoir mardi, la motion de censure a été rejetée. Mais les chiffres méritent malgré tout qu’on s’y attarde. Seuls 198 députés ont voté pour la censure alors qu’il fallait 289 voix pour qu’elle soit adoptée. Lors de la première lecture, en février dernier, une motion de censure avait également été déposée mais avait recueilli 234 voix.

Fort logiquement la quasi-totalité des députés « Républicains » et UDI ont voté « pour » la motion, mais, acte d’autant plus significatif qu’il n’y avait aucune chance que la censure soit adoptée, 6 députés sur 10 du front de gauche ont voté « pour », s’associant ainsi à la droite et même à 2 députés FN. Ce choix a été longuement défendu à la tribune par André Chassaigne du Front de Gauche, et a évidemment servi sur un plateau à Valls l’occasion de répliquer ; « Vous vous trompez donc de camp ! Aujourd’hui vous êtes du côté des conservateurs ! ». Une seule écologiste a voté la censure.

Les conséquences de l’échec de la motion de censure

Premier effet du scénario, 49.3 / dépôt de motion / échec de la censure, c’est que le projet de loi « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques » est adopté par l’assemblée. Il va désormais poursuivre son cours, passer devant le Sénat et revenir enfin à l’Assemblée où très probablement, le 49.3 sera brandi pour la 3ème fois. Ironie historique que cet usage répété d’un article de la constitution de la Ve République que François Mitterrand qualifiait en son temps de « coup d’état permanent ».

Manuel Valls, droit dans ses bottes, aura par sa manœuvre, donné au Medef toute satisfaction. Comme on s’y attendait, la loi Macron et son cortège de méfaits n’aura pas été stoppée par le parlement, malgré tous les effets de manche des uns et des autres. C’est désormais aux travailleurs qu’il appartient de lui faire barrage.

19/06/15

Politique