La grève « a été observée dans un climat empreint de conscience et de responsabilité de manière globale dans toutes les régions, provinces et villes du Maroc et dans l’ensemble des secteurs professionnels et des administrations et services publics », ont déclarés les centrales syndicales au travers d’un communiqué. Il faut dire qu’avec plus de 84 % de participation, un chiffre qui dépasse les prévisions les plus optimistes, la grève générale de ce 24 février est une réussite, trois mois après une initiative du même ordre mais qui avait connu un succès plus relatif. Le mouvement réclame la mise en place d’une réelle justice sociale, dénonçant l’indifférence du gouvernement sur ce sujet.

Pour éviter la paralysie totale, l’État en appelle à l’armée

Si à Casablanca le trafic des transports publics était perturbé, le trafic ferroviaire est quant à lui resté normal. En effet, le gouvernement marocain a réquisitionné l’armée pour cette besogne anti-grève - une pratique déjà employée dans les années 70-80 - avec l’aval complice... des centrales syndicales ! Ce recours a en effet été validé par l’UMT et la CDT pour éviter une paralysie de l’économie du pays, fortement dépendante du trafic ferroviaire. Une trahison totale, d’autant plus que les militants de cette organisation ont été appelés à aider les militaires sur les questions de contrôle du trafic, des installations de sécurité, du maintien des machines et dans la vente des billets. Une stratégie de canalisation de la colère qui se traduit aussi dans l’appel lui-même à une seule et unique journée de grève générale, alors que le taux de participation à lui seul témoigne de la colère qui s’exprime dans les masses marocaines.

Il est certain qu’un tel mouvement de masse fait trembler les classes dominantes marocaines, qui maintiennent l’activité économique par tous les moyens possibles, jusqu’à mobiliser des pans entiers de ses forces de répression. Pour l’instant, leur salut tient à la coopération totale des bureaucraties syndicales, qui parviennent à canaliser la colère en attendant des jours meilleurs pour l’ordre établi. Cependant, le contexte social tendu, dans une région qui a dépoussiéré le mot « Révolution » il y a cinq ans à peine, laisse la situation ouverte. En effet, il ne manque que l’étincelle d’un dépassement des centrales syndicales, et que la lutte prenne le chemin de l’auto-organisation, pour que la poudrière explose.