« Comment est-ce possible ? Nous sommes ici Place de l’Insurrection. Les monuments de Lénine ne sont pas détruits en Russie comme ils le sont en Ukraine. Et vous me dites que le régime est anti-communiste ? », disait-elle.

J’espère qu’après les remarques de Poutine selon lesquelles Lénine aurait « planté une bombe atomique sous la Russie » et serait responsable de l’effondrement de l’Union soviétique, elle puisse voir la lumière. Je n’ai plus de tels espoirs vis-à-vis des libéraux russes qui considèrent que sous Poutine nous vivons une réédition de l’Union soviétique.

En effet, Poutine a été très cohérent dans son ignorance historique. Pour lui la Révolution de 1917 est aussi détestable que l’effondrement de l’Union soviétique, aussi odieuse que toute autre subversion du Pouvoir avec un grand « P ». Pour Poutine, le Pouvoir doit rester sacré aux yeux du peuple, juste parce qu’il est le Pouvoir, et parce que tout Pouvoir vient de Dieu. Du point de vue des légitimistes comme Poutine, la destruction des monuments de Lénine ou le changement de nom des rues est une rupture avec la continuité mystique du Pouvoir et donc presque un geste révolutionnaire.

Aux yeux de Poutine, Lénine et les bolcheviks étaient vraiment des démons incarnés, car ils affirmaient radicalement le droit des masses à la révolte et abolissaient la continuité avec le passé, démolissant ainsi la mystique autour de la notion de l’État.

Cependant, durant la période stalinienne, la révolution bolchevique elle-même était incorporée dans le mythe national. C’est sur cette forme mythifiée que des tentatives ont été faites pour adapter toutes les choses soviétiques aux besoins de la nouvelle oligarchie, qui se prend pour la succession des Rurikids, des Romanov, Staline, Eltsine, et toutes sortes de sauveurs de la Patrie et gardiens de la stabilité. Heureusement, cette mascarade ne marche pas avec Lénine et ne marchera jamais.

Traduit par Thabitha Kali à partir de la version en anglais publiée par The Russian Reader.