Au Royaume-Uni, décidément, il y a des choses qui ne changent pas. Les classes populaires, de l’autre côté de la Manche, ont à peine fini d’éponger les colossales sommes engagées pour enterrer le précédent monarque, qu’il faut à nouveau mettre la main à la poche pour « sacrer » le nouveau.

L’addition, qui donne lieu à une bataille d’évaluations, sera en effet très salée : de 50 à 100 millions de livres selon la BBC, plus de 250 millions de livres selon The Mirror qui intègre les coûts du dispositif de sécurité évalué à 150 millions selon sur une source interne au Bureau de l’Intérieur. Un coût bien supérieur au précédent couronnement de Elizabeth II en 1953, estimé à l’équivalent de 47 millions de livres actuelles.

Pas de quoi empêcher la classe politique britannique, et du monde entier, de se féliciter avec une belle unanimité d’une cérémonie qui s’annonce « historique ». Grand prince, le gouvernement britannique a octroyé un jour férié aux travailleurs et aux travailleuses. Ces derniers, pourtant, ont un certain nombre de raisons de ne pas trouver ce cérémonial très réjouissant puisque l’essentiel du financement incombe aux finances publiques, non à la famille royale.

Dans le même temps, l’inflation continue de grimper pendant que les grèves historiques pour des augmentations de salaires trouvent porte close. Justement, l’objectif de cette grande messe prétendument populaire, et du battage médiatique incessant qui l’accompagne, est avant tout de renforcer l’illusion d’une « nation » unie derrière la monarchie, supposée être au-dessus de la lutte des classes, et plus encore de la crise, de ses licenciements et de la montée de la pauvreté. Mais la population s’y trompe moins que ne voudrait nous le faire croire les reportages enjoués de BFM sur l’amour de la population anglaise pour la couronne. 51% des personnes interrogées par YouGov pensent que les finances publiques ne devraient pas financer le couronnement, et seuls 32% pensent le contraire.

De l’autre côté de la Manche, plus près de nous, celui qui se rêve en roi de France, ou plus exactement en Bonaparte, ne pouvait pas manquer pareille occasion d’être parmi les siens. Le monarque présidentiel et le monarque ne s’étaient pas vu à Paris, ils se verront donc à Londres. Comme un symbole, aristocrates d’hier et d’aujourd’hui, avec ou sans couronne, sont toujours unis pour faire payer la classe ouvrière.

Que ces derniers prennent garde, la dernière fois qu’ils avaient voulu se rencontrer, les pauvres avaient empêché les grands de festoyer. Et alors que la lutte des classes connaît un nouvel essor en Europe occidentale avec des grèves historiques, la colère pourrait continuer à s’étendre et ébranler les fondements des institutions pourries que chapeautent nos monarques.