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La sélection devient la norme dans nos universités

Nouvelle attaque dans l’Enseignement supérieur. Le tirage au sort opéré par APB en passe d’être légalisé

Après la légalisation de la sélection en master, promulguée en décembre 2016, un projet d’arrêté du ministère de l’Enseignement supérieur, qui sera examiné ce mardi, tend à légaliser le tirage au sort utilisé actuellement par le logiciel APB pour départager les candidats à l’entrée de certaines licences universitaires « sous tensions ». Cette nouvelle attaque, qui est une violation importante au Code de l’éducation stipulant que « le premier cycle est ouvert à tous les titulaires du baccalauréat », renforce une sélection sociale officieuse déjà fortement présente au sein de l’université. Celle-ci s’inscrit dans la continuité des attaques contre l’Université publique, engendrées par la restructuration néolibérale de l’Université, entre sélectivité, désengagement financier de l’État et austérité. Lili B

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Le logiciel APB, véritable dispositif de gestion et de sélection des futurs étudiants, à travers lequel l’orientation n’est plus choisie mais imposée par un algorithme qui laisse sur le carreau de nombreux étudiants, a été maintes et maintes fois critiqué et contesté devant les tribunaux. En effet, face à la sélection opérée par ce logiciel à l’égard de licences officiellement non sélectives, au travers notamment du tirage au sort, un certain nombre de bacheliers recalés ont déposé plainte et demandé un recours, qu’ils ont obtenu avec succès. Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche tente de ce fait aujourd’hui de sécuriser cette situation juridique bancale, à travers la légalisation de ce tirage au sort, qui permettra de maintenir la sélection qui existe déjà aujourd’hui au sein de l’université.

D’après ce projet, trois critères seront déterminants dans l’attribution ou non des formations. Tout d’abord, la priorité sera toujours accordée aux candidats de l’académie d’obtention du bac et de résidence, reposant de ce fait sur un principe de ségrégation spatiale. L’ordre des vœux sera le deuxième critère déterminant. Pour finir, la situation familiale sera prise en compte : accordée à ceux qui sont mariés, pacsés, en concubinage ou ont une ou plusieurs personnes à charge. Enfin, si l’application de ces trois critères ne suffit pas à les départager : « il est recouru à un tirage au sort » !

Cette mesure, pas de plus vers une sélectivité de plus en plus accrue, aura des conséquences néfastes pour les étudiants, précarisant encore plus leur accès à l’Université, alors que ces derniers sont déjà frappés par une sélection sociale, officieuse ainsi qu’une sélection illégale, opérée dans un silence écrasant par les présidences d’université. Selon l’Unef, 76% des universités pratiquent la sélection illégale à l’entrée en licence, par le biais d’un tirage au sort à l’entrée ou par la mise en place de filières sélectives.

Alors qu’à la rentrée 2016, plus de 2300 étudiants n’ont pas obtenu la formation qu’ils souhaitaient, se retrouvant « sans fac », dans une filière par défaut, ou très éloignés géographiquement de chez eux, ce nombre risque de sensiblement augmenter avec cette légalisation du tirage au sort et avec les autres réformes et mesures qui frappent l’enseignement supérieur (fusion, contingentement…) qui promettent tous plus de sélectivité et d’austérité, précarisant considérablement les conditions d’études et de travail.

En effet, les cas de « sans fac » ne représentent pas de simples problèmes administratifs, d’inscription, à appréhender à l’échelle individuelle, mais reflètent la dynamique globale à l’œuvre dans l’Enseignementsupérieur et la recherche, marquée entre autre par une restructuration néolibérale et un désengagement financier de l’État, qui oblige les universités à trouver seules leurs investissements, dans une logique concurrentielle et compétitive. Entre désengagement de l’État et coupes budgétaires, le manque de moyens des universités renforce ces logiques de sélection. Face à une hausse des effectifs des étudiants, qui s’opère depuis quelques années et qui risque de se prolonger, les universités se retrouvent de plus en plus dans l’incapacité d’accueillir tous ces bacheliers, faute de moyens.

Ce projet de légalisation du tirage au sort du logiciel APB n’est que le reflet de ces politiques austéritaires, accompagnées de la restructuration de l’Université sous le modèle de l’entreprise, et des conséquences néfastes que celles-ci ont sur les étudiants. Cette sélection institutionnelle va renforcer les inégalités et injustices qui minent actuellement l’enseignement supérieur et de la recherche, renforçant de ce fait l’élitisme des universités françaises. C’est un nouveau saut dans la remise en cause du droit d’étudier en France, cette fois-ci sur le plan légal. Ce nouveau projet confirme le tournant que les Universités prennent ces dernières années, allant toujours vers davantage d’élitisme, de sélection, d’inégalités, de précarité… Face à cette mesure, et aux futures contre-réformes qui iront dans le même sens, il est nécessaire de commencer dès maintenant à s’organiser et lutter contre cette université qui s’impose à nous, en exigeant une université gratuite et accessible à toutes et à tous, qui ne serait plus soumise aux intérêts du marché, de la compétitivité et du patronat.

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