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Menace sur le flirt May / Trump

Theresa May accueillie par Donald Trump à Washington. Pourra-t-elle lui rendre la pareille en terre britannique ?

Claire Manor Theresa May, première ministre de Grande Bretagne, est la première dirigeante étrangère que Trump ait reçue depuis son intronisation à la Maison Blanche, le 20 janvier. Le nouveau président, dont l’activité diplomatique est pourtant intense, a tenu à faire la part belle à la championne du « brexit », prédisant « une relation fantastique » entre Washington et Londres.

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C’était sans compter avec le tollé que suscite la perspective de la visite de Trump à Londres, après les dispositions discriminatoires et xénophobes prises à l’encontre des voyageurs venant des pays arabes.

Pourquoi se font-ils les yeux doux ?

Lors du voyage diplomatique de Theresa May à Donald Trump le 27 janvier dernier, ils ont tenu une brève conférence de presse conjointe. Ils se sont l’un et l’autre engagés à renforcer les liens entre Washington et Londres après les changements de cap majeurs intervenus dans leurs pays respectifs, le « Brexit » pour l’une et l’« America first » pour l’autre.

Au-delà de cette convergence de vues, ils ont été peu diserts sur l’accord commercial que Trump prétendait vouloir conclure rapidement avec le Royaume-Uni, en cours de négociation de sa sortie de l’Union européenne. Il est vrai que tant que le divorce avec l’Union européenne n’est pas acté, le gouvernement britannique ne dispose que d’une très faible marge de manœuvre pour discuter d’un nouvel accord commercial avec Washington. La commission européenne ne s’est d’ailleurs pas privée de lui rappeler que, tant qu’il est encore membre de l’UE, le Royaume-Uni peut discuter, mais en aucun cas négocier, un éventuel accord de libre-échange avec les Etats-Unis ou tout autre pays tiers. Aucun calendrier précis n’a d’ailleurs été avancé pour ce mirifique accord commercial.

Mais pour Trump, le sens de la rencontre va bien au-delà des relations avec Londres. Le « Brexit » exerce sur lui une véritable fascination en tant qu’image symbole de sa politique, simple version outre-Atlantique de sa formule « America first ». Bien plus, au-delà du symbole, le « Brexit » constitue le mot d’ordre essentiel de sa stratégie vis-à-vis de l’UE, une tentative directe de la faire éclater.

Le carton d’invitation à Trump, plus qu’un faux pas…

De retour à Londres, fière de son statut de première visiteuse reçue par Trump, la première ministre s’est immédiatement mise en devoir de rendre la politesse en conviant le Président des Etats-Unis à une visite d’Etat dans le courant de l’année 2017. Très encadrée par le protocole, une visite d’État s’entoure d’un faste particulier qui comprend un défilé en carrosse, un discours sous les ors du Parlement de Westminster et surtout un banquet officiel au palais de Buckingham avec la reine Elizabeth II. 

Certains ont très vite trouvé qu’un Trump brutal, vulgaire et mysogine collerait mal avec la distinguée reine aux multiples chapeaux. Mais l’opposition à la venue de Trump a très vite pris un tour plus politique au fur et à mesure que le président milliardaire et insolent enchaînait les décrets, tous plus réactionnaire et attentatoires aux droits de l’homme les uns que les autres.

Le décret sur l’immigration aux Etats-Unis signé vendredi dernier a mis le feu aux poudres et descendu en plein vol une Theresa May qui se croyait aux nues. Elle a, dans un premier temps, refusé de critiquer le décret. Un communiqué du 10 Downing Street a rectifié le tir dans la nuit de samedi à dimanche. Mais le discrédit était déjà tombé et l’accusation de sacrifier les droits de l’homme au profit de la « relation privilégiée » avec Washington se propage jusque dans son propre camp.

Le fait que Londres ait obtenu depuis une exemption pour ses ressortissants naturalisés détenteurs de passeports britanniques, y compris les binationaux syriens ou iraniens, n’a pas suffi à étouffer la polémique.

La visite d’Etat devenue enjeu d’un bras de fer

L’opposition à la relation engagée entre Londres et Washington la semaine dernière avec la visite de Theresa May s’est cristallisée autour de la visite d’Etat programmée en retour. Le parti travailliste, les libéraux-démocrates et le parti national écossais SNP ont réclamé l’annulation de la visite d’Etat. Quant au Daily Mirror, journal de « gauche », il titrait à la Une : « Vous n’êtes pas le bienvenu ».
Ces prises de positions sont confortées par un large mouvement d’opposition à la venue de Trump. Lundi, une pétition a été lancée pour demande l’annulation de la visite. Elle a recueilli plus d’1,5 million de signatures ce qui entraîne d’ores et déjà l’obligation d’examen de la question par le parlement.

Pourtant, en « dame de fer » bis la première ministre ne renonce pas. Lors d’une conférence de presse à Dublin, elle a déclaré : « J’ai envoyé une invitation (...) cette invitation est maintenue », tout en revendiquant une approche « différente » sur l’immigration.

Pendant qu’elle engageait ainsi le bras de fer depuis la capitale irlandaise, plusieurs dizaines de milliers de manifestants rassemblés devant le 10 Downing Street au cri de « Honte à vous Thérésa May ! », brandissaient des pancartes dénonçant en termes virulents cette alliance sans principe : « Non au racisme, non à Trump », « Ne donnons pas la main aux fascistes ». Simultanément, d’autres manifestations d’ampleur avaient lieu dans d’autres grandes villes notamment à Edimbourg et Manchester.

Sans faire l’objet d’un vote, la question sera donc au moins débattue au parlement. Ce sera un « deuxième passage » pour Trump. En janvier 2016, les députés britanniques avaient en effet examiné une première pétition réclamant d’interdire l’entrée sur le territoire britannique à celui qui n’était alors que candidat aux primaires républicaines. « Donald Trump est libre d’être un imbécile. Mais il n’est pas libre d’être un dangereux imbécile en Grande-Bretagne », avait lancé le député travailliste Jack Dromey au cours d’un débat de trois heures. Le prochain risque d’être très long et la rue ne manquera probablement pas de s’en mêler.


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