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#BoycottZoneInterditeM6

Zone Interdite à Roubaix : un énième reportage islamophobe au service de la politique raciste de Darmanin

Dimanche, Zone Interdite diffusait, à trois mois des élections présidentielle, un énième reportage à charge contre les musulmans et la ville de Roubaix. Passant sous silence toutes les problématiques liées à la misère, au chômage et à la désaffection des services publics, le reportage entretient la peur de « l'islamisation » des quartiers populaires et flatte les discours réactionnaires de l'extrême-droite.

Boris Lefebvre

24 janvier 2022

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Crédits photo : Premières lignes

Dimanche soir dernier, M6 diffusait dans Zone Interdite un reportage à charge contre les musulmans intitulé « face au danger de l’Islam radical, les réponses de l’État ». À trois mois des présidentielles, la ficelle est grosse et joue sur la peur de l’Islam et des musulmans. Mais comme Thomas Deltombe l’a montré dans son ouvrage L’islam imaginaire, la construction médiatique de l’islamophobie en France, 1975-2005 les recettes télévisuelles pour stigmatiser les musulmans fonctionnent à plein régime depuis des décennies. Rien de fondamentalement nouveau donc dans cette énième déclinaison de reportage islamophobe visant avant tout à provoquer la peur et à entretenir les amalgames.

Car si au début du reportage, la voix-off affirme que « sur les quatre millions de musulmans que compte la France, une minorité pousse par tous les moyens la communauté à se replier sur elle-même », le reportage ne fait qu’entretenir l’idée agitée par le gouvernement d’une population musulmane en proie au « séparatisme ». La communauté musulmane est ainsi tour à tour présentée comme opposée au communautarisme et comme inéluctablement entraînée dans cette voie par les fondamentalistes.

Le dispositif du reportage est rôdé et bien connu. Tournée en caméra cachée afin de créer une ambiance d’illégalité et instaurer un climat de peur, la visite de certains magasins de la rue commerçante de Lannoy à Roubaix cherche à donner l’impression qu’une réalité parallèle existe à nos portes. Quelques exemples sont ainsi montés en épingle et généralisés pour stigmatiser toute une ville et toute une population. Roubaix, ville la plus pauvre de France rappelons-le, serait donc le théâtre d’un séparatisme ambiant particulièrement représenté dans la rue de Lannoy, pointée du doigt pour ses boucheries Hallal, son hammam, ses boulangeries avec des pâtisseries arabes. D’autres exemples sont convoqués pour effrayer, comme cette boutique où l’on vend des ouvrages « islamistes », ou cette autre où l’on trouve des poupées sans visage.

La parole de l’expert vient appuyer ce que les images viennent de montrer. Bernard Rougier, spécialiste de « l’islam radical », mais surtout militant ultra-réactionnaire, connu pour fustiger les « indigénistes » et les « antiracistes » dans les colonnes des journaux de droite, déplore « l’introduction d’un principe idéologique dans le monde de l’enfance ». Comme si les jouets en étaient habituellement dépourvus…
Toujours est-il que le reportage est au service du discours du gouvernement. Tout le programme décliné autour de la Loi sur le séparatisme est ainsi validé. En ce sens, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et maire de Tourcoing situé à quelques encablures de Roubaix, conclue le reportage par une apologie de son texte, dénonçant le « djihadisme d’atmosphère » et se félicitant de donner « les moyens à l’Etat de se défendre face au séparatisme islamiste et à ceux qui veulent renverser les valeurs de la République. » L’extrême-droite, de Eric Zemmour à Marine Le Pen en passant par Eric Ciotti et Gilbert Collard, a également fait ses choux gras de ce reportage, surenchérissant au passage..

Sur les réseaux sociaux, avant même la diffusion du reportage, le #BoycottZoneInterditeM6 dénonçait un reportage ordurier aux relents bien connus, et appelait tout simplement à ne pas regarder M6 ce soir-là. Dès le lundi matin, les habitants de Roubaix ont réagi au reportage de M6. Comme le rapporte BFM Lille les habitants dénoncent « la stigmatisation d’une communauté toujours pointée du doigt » et récusent toute « radicalisation de masse visible » dans leur ville.

Sur France 3 Haut-de-France, Fatiha Touimi, directrice de l’association roubaisienne Servir, qui agit depuis 1992 contre toutes les formes de discrimination craint « qu’il y ait un amalgame entre islamisme et musulman ». Selon elle, « ce qui a été montré n’est pas représentatif de Roubaix ». Un rassemblement est normalement prévu mardi soir à Roubaix pour dénoncer l’orientation clairement islamophobe du reportage de Zone Interdite et la stigmatisation qu’il entraîne de toute la ville, de sa population et des musulmans.


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