Comme tous les deux ans, organisations syndicales et patronales participent à la mascarade habituelle de « dialogue social » pour convenir d’un « accord » fixant les droits des demandeurs d’emploi à une indemnisation. Fer de lance de la méthode Hollande, cet accompagnement des contre-réformes par les syndicats, se déroule cette fois-ci sous le feu d’une ultime attaque du gouvernement au service du grand patronat, certainement la plus conséquente de son mandat. Alors que le gouvernement s’en donne à cœur joie sur le terrain du Code du travail, ravissant même la droite, la contradiction s’avère frappante lorsque les directions syndicales, dont la CGT, accompagnée par la CFDT, FO, CFE-CGC et CFTC, s’assoient pour « négocier » à la table du Medef.

Un système d’assurance-chômage en déficit ?

Quand on entend parler du régime d’assurance, gouvernement, patronat et médias dominants ne cessent d’expliquer qu’il faut réduire ce déficit de l’UNEDIC. Certains théorisent même ce déficit qui serait immuable du fait de « l’effet ciseaux ». En période de fort chômage, les recettes liées aux cotisations diminueraient, tandis que les dépenses d’allocation augmenteraient. Les déficits s’accumuleraient donc chaque année depuis le début du chômage de masse et 2009, l’Unedic enregistrant un trou compris entre 3 et 4 milliards d’euros. En 2016, l’UNEDIC serait en déficit de 3,6 milliards d’euros tandis que la dette cumulée s’établirait à plus de 29 milliards en 2016, soit presque le montant total des recettes de cotisations, environ 34 milliards d’euros.

A ce déficit, bien réel, bien que créé par les politiques de baisse continue des cotisations patronales et le chômage de masse dont gouvernement et patronat sont les premiers responsables, ces derniers répondent de concert, en proposant de résoudre le déséquilibre budgétaire par la coupe des dépenses de l’UNEDIC pour l’équilibrer avec les recettes. Les pistes de « solutions » seraient bien connues : instaurer des allocations dégressives dans le temps ; raccourcir la durée d’indemnisation ; rendre le cumul activité chômage moins avantageux ; autant dire faire payer les salariés pour un chômage de masses qui n’est pas de leur fait.

Une « négociation » pilotée par le gouvernement

D’un côté, gouvernement et patronat ne cessent de justifier leurs mesures de casse du système de chômage par un « déficit », qu’il faudrait résoudre quel qu’en soit les moyens, et si possible au moyen d’un « dialogue social » responsable entre syndicat et patronat, histoire de se mouiller le moins possible. Si cela n’aboutit pas, ce sera par la voix de la loi que le gouvernement fixera les conditions au plus proche des besoins du Medef, comme l’explique la ministre du Travail Myriam El Khomri : l’État étudie déjà « toutes les pistes » et il « fixera lui-même les nouveaux paramètres de l’assurance-chômage », si la négociation échouait.

Plaçons le débat sur le terrain de la lutte de classes !

Les directions syndicales, participant sur le terrain de la « négociation » à la même table que le Medef, expliquent en raison inverse, qu’il faut augmenter les recettes pour équilibrer avec les dépenses. La CGT, de son côté, plaide pour une surcotisation sur les contrats courts : « les deux principales causes sont la précarité, qui coûte 9,3 milliards d’euros, selon les chiffres de l’Unedic, et les ruptures conventionnelles dont les employeurs usent et abusent, qui représentent 5 milliards pour l’assurance chômage. Nous proposons donc de surcotiser sur l’ensemble des contrats courts et de mettre une contribution sur les ruptures conventionnelles ». La CFDT propose quant à elle une variante : faire baisser progressivement la cotisation patronale au fur et à mesure que le contrat de travail se prolonge dans le temps pour éviter la multiplication des contrat courts.

Non seulement les directions syndicales font en sorte de dissocier cette « négociation » de tout rapport de force, imposé par le mouvement ouvrier combatif, mais en plus de cela, celles-ci valident le terrain de jeux du patronat et du gouvernement. Elles font ainsi planer l’illusion que le patronat peut prendre une part de la note et serait capable de « négocier » d’égal à égal, avec les directions syndicales, le tout indépendamment de toute mobilisation des militants combatifs. Ce « dialogue social » tend à faire croire que le patronat pourrait être un interlocuteur capable de compromis, alors même que la crise économique qui le touche, ne donne aucune possibilité objective pour un tel accord ou une conciliation.

Loi du travail, Assurance-chômage. On ne peut discuter ni avec le Medef, ni avec le gouvernement !

Alors même que le gouvernement décline sur le plan social son escalade liberticide et autoritaire, avec la loi Travail il formule une attaque en règle contre la durée légale du travail et les conditions de licenciement et, moyennant un 49-3 si nécessaire, les directions syndicales et au premier titre la CGT, se retrouvent, ce lundi, à la table des négociations avec le Medef. Une contradiction dans les termes, alors même que la CGT annonçait pourtant la nécessité d’un « tous ensemble » dans la rue, confirmé par son appel ce lundi à la constitution d’une « intersyndicale » pour s’opposer à la loi Travail.

Pourtant les attaques, aussi préventives qu’annonciatrices, avec la condamnation des 8 de Goodyear pour viser celles et ceux qui déchirent des chemises, qui séquestrent des patrons, démontrent qu’il n’est pas possible de négocier avec quelconque patrons ou gouvernement. Pour s’opposer réellement à la loi Travail et à la baisse de notre salaire socialisé, à travers le détricotage du régime de chômage, acquis du mouvement ouvrier, fruit de nos luttes, il faut que la routine du « dialogue social » cesse.

Pour exiger cela, les travailleurs n’ont pas d’autre choix que de prendre les affaires en main et imposer aux organisations syndicales de quitter tout cadre de « négociation » avec le Medef et le gouvernement. Seul le terrain de la lutte et un appel à la grève générale reconductible, sera à même de les faire reculer, en exigeant, pour éradiquer le chômage de masse et la précarité, de baisser le temps de travail, de le partager et de le répartir entre les travailleurs en capacité d’exercer, tout en maintenant les salaires, et en les indexant sur les prix.