« La cible était des chrétiens. Nous envoyons ce message au premier ministre Nawaz Sharif pour lui dire que nous sommes entrés dans Lahore. » a déclaré la faction Jamaat-ul-Ahrar, une nébuleuse talibane pakistanaise qui a revendiqué l’attentat. Un kamikaze portant une ceinture d’explosif s’est fait sauter dans un parc pour enfant, en plein cœur de Lahore - fief du premier ministre pakistanais - lors des fêtes de pâques.

Selon l’inspecteur de police adjoint Haider Ashraf, la majorité des victimes sont musulmanes. Simple paradoxe au vu des dires du groupe terroriste ? Rien n’est moins sur tant l’objectif politique semble avoir été atteint. En effet, le porte parole de l’organisation a déclaré à l’AFP que de nouveaux attentats étaient en cours de préparation, visant notamment des établissements scolaires. Les puissances occidentales ont quant à elles immédiatement condamné ces attentats, la France réaffirmant sa volonté de « continuer à combattre partout le terrorisme  ».

Guerre des « civilisations » et renforcement de la « zone grise ».

Ces déclarations vont-elles déboucher, sur le terrain, par une nouvelle intervention militaire, comme celles déjà en cours en Syrie et en Irak ? Ou, pour poser la question autrement, l’impérialisme français et ses alliés vont-ils, comme en Syrie et en Irak, nourrir de nouveau les conditions du chaos nécessaire au renforcement - voire à l’émergence - de groupuscules terroristes ultra-réactionnaires ? Au centre de l’attention dans les années 2000, et plus particulièrement après les attentats du 11 septembre 2001, le Pakistan est en effet un « terrain en recul » pour les mouvances terroristes réactionnaires, dont l’aura est bien moindre qu’à l’époque de la toute-puissance d’Al Qaïda. L’émergence de l’État Islamique dans la région moyen orientale rebat les cartes, et il est certain qu’à l’instar des pays limitrophes, une situation de guerre avec bombardements pourrait donner du grain à moudre pour l’expansion de ces groupes et leurs influences.

Mais ces actes ont d’autres conséquences, à savoir le renforcement d’une « zone grise » au sein des sociétés qu’ils touchent. En effet, ils créent des conditions favorables à la mise en place de politiques de fracture entre musulmans, ou assimilés comme tel, et le reste de la population - et ce au Pakistan comme dans les sociétés occidentales. Bien entendu, l’orientation religieuse n’est pas au centre des préoccupations des terroristes, qui visent avant tout à propager son idéologie et à conquérir un territoire, tandis que les gouvernants en place, et notamment occidentaux, cherchent avant tout à protéger les intérêts particuliers des classes dominantes. Face à la barbarie terroriste d’un côté et à l’ingérence impérialiste dévastatrice de l’autre, c’est bel et bien la population elle-même - toutes ethnies confondues - qui compte ses morts. Tout comme pour les victimes de Bruxelles il y a quelques jours, c’est un hommage et un soutien internationaliste, condamnant radicalement la barbarie qui s’est abattue sur Lahore et la politique interventionniste des puissances occidentales à venir, qui est nécessaire.