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Palestine

Blocus à Gaza : « La famine est utilisée comme arme de guerre »

Alors que trois maigres convois humanitaires sont entrés à Gaza depuis ce weekend, ceux-ci restent insuffisants face au blocus total imposé depuis le 9 octobre. Selon Oxfam, « la famine est en train d’être utilisé comme arme de guerre contre les gazaouis ». L’arrêt des bombardements et la cessation des sanctions économiques sur Gaza doivent être mis en place maintenant !

Raji Samuthiram

25 octobre 2023

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Blocus à Gaza : « La famine est utilisée comme arme de guerre »

Crédits photo : Batoul84 - Creative Commons Attribution-ShareAlike 3.0

Depuis ce weekend, trois convois humanitaires sont entrés à Gaza depuis l’Égypte, les premiers depuis le début du blocus colonial imposé par Israël le 9 octobre, privant les gazaouis des besoins les plus élémentaires. 62 camions sont entrés depuis samedi—alors qu’au moins 100 camions par jour seraient nécessaire selon l’ONU.

Comme le dénonce la porte-parole de la Croix Rouge, il s’agit «  d’une goutte d’eau dans un océan de besoins  », à l’heure où les autorités alertent de l’effondrement total du système hospitalier, que les bombardements par l’Israel des hôpitaux, des centres religieux, et des écoles font des milliers de victimes, et que les gens boivent de l’eau salée et manquent de nourriture. Retour sur les conséquences désastreuses du blocus imposé par Israël qui accélère la misère et la mort des palestiniens.

Manque de carburant, d’eau, de nourriture, de médicaments… le blocage meurtrier s’intensifie

«  Je ne sais pas quand je pourrai envoyer et partager ce poste, ni jusqu’à quand je serai en vie.  » Le 23 octobre, la journaliste gazaouie Plestia Alaqad postait une photo sur Instagram avec cette description. Elle avait pris la photo alors qu’elle cueillait des fruits d’un arbre pour se nourrir. «  C’est comme ça qu’on essaie de se débrouiller.  »

Au-delà des bombardements, l’offensive israélienne contre la bande de Gaza prend la forme d’un blocus total des 360 km2 du territoire. Manque de carburant, de nourritures, de médicaments : tout s’empire et est exacerbé par les bombardements qui visent les appartements comme les structures critiques, à l’instar de mosquées ou d’églises qui abritaient des réfugiés. Le lundi 9 octobre, deux jours après l’attaque surprise de la résistance palestinienne sur Israël, le ministre de la défense Yoav Galant annonçait le siège en revendiquant déjà un futur massacre, dans le sillage d’un véritable nettoyage ethnique : «  J’ai ordonné un siège complet de la bande de Gaza. Il n’y aura pas d’électricité, pas de nourriture, pas de carburant, tout est fermé. Nous combattons des animaux humains et nous agissons en conséquence.  » Aujourd’hui, les conséquences de cette annonce s’empirent d’heure en heure alors que Gaza, déjà sous un siège depuis 2007, est en train de s’effondrer, autant sous les bombardements que sous l’effet du blocus total imposé par Israël. 

Alors que l’armée israélienne continue d’ordonner aux palestiniens d’évacuer vers le sud, au risque d’être assimilés à des sympathisants terroristes, l’ONU estime que plus de 1,4 million de gazaouis ont dû quitter leurs maisons depuis le 7 octobre—soit plus de la moitié des habitants. Dans des campements temporaires surchargés au sud, qui l’armée israelienne n’épargne pas des bombardements, la situation est particulièrement dramatique.

Une mère de 36 ans, Sherine Al-Dabaa, témoignait des conditions auprès du média palestinien 972 Mag : « On fait des feus pour avoir de la lumière la nuit et pour cuisiner le jour. Le soir, il fait très froid et les enfants n’en peuvent plus—ils ont besoin de couvertures. On a quitté notre maison sans rien. On a besoin d’eau pour se laver les mains. On ne s’est même pas douché depuis le début de la guerre. »

En effet, entre de fréquentes coupures d’eau et d’électricité, la situation s’empire au quotidien. Le 16 octobre, l’agence de l’ONU UNRWA alertait au risque de déshydratation et d’apparition de maladies alors que la dernière station d’épuration d’eau avait été fermée. Désormais, les gens sont contraint de boire de l’eau salée ou de prendre des risques pour trouver de quoi s’hydrater en visitant des puits ou des mosquées. L’ONU estime que chaque personne consomme au minimum 50 litres d’eau jour—aujourd’hui, à Gaza, la consommation par personne est tombée à trois litres.

Le manque de nourriture est criant également : aujourd’hui, Oxfam a déclaré que la famine est en train d’être utilisée comme arme de guerre contre les civils gazaouis. Selon ses calculs, depuis le début du blocus de maintenant, seulement 2% de l’alimentation qui aurait été importée habituellement est rentrée à Gaza. Une stratégie de privation totale qui s’ajoute aux bombardements, qui ont détruit déjà plus de dix boulangeries dans la bande de Gaza. 

La privation sévère d’eau et de nourritures s’inscrivent dans la situation coloniale que vit Gaza depuis 2007, lorsque Israël impose un sévère blocus suite à l’arrivée au pouvoir du Hamas. A l’époque, le gouvernement israélien limitait l’importation de nourriture et d’autres biens de première nécessité, et avait dressé une « ligne rouge » à ne pas franchir pour éviter d’affamer la population, ainsi qu’un plafond de nourriture importée, très proche de cette ligne. Aujourd’hui 97% d’eau dans les nappes phréatiques à Gaza n’est pas potable, un résultat des politiques coloniales d’Israël qui ont empêché l’entretien des canalisations depuis des années.

Des hôpitaux dévastés alors que les bombardements s’intensifient

Surtout, le système hospitalier est totalement dévasté par la crise. Le 18 octobre, la coordinatrice médicale de Médecins sans Frontières pour la Palestine, Guillemette Thomas, prévenait déjà que «  tous les blessés sont en danger de mort dans les heures à venir, car il est désormais pratiquement impossible de les soigner  », citant la pénurie d’essence et le flux ingérable de blessés dans les hôpitaux.

Les médecins décrivent des scènes d’une atrocité terrible, tels que ce chirurgien décrivant l’amputation d’un garçon de neuf ans au milieu d’un couloir, «  sous légère sédation  », faute de fournitures médicales. «  Vous ne pouvez pas imaginez cela… mais en fait, c’est ce qui se passe. C’est le mieux que nous puissions faire.  »

Ce lundi, le ministère de la santé de Gaza annonçait que 32 centres de santé avaient fermé dont plusieurs hôpitaux. Mardi matin, il alertait que sans carburant, les générateurs dans les hôpitaux ne pourraient plus fonctionner dans les 48 heures.

Alors qu’Israël intensifie les bombardements, le nombre d’ambulances est réduite en raison du manque de carburants. «  La mort est partout  », a déclaré le médecin Ghassan Abu Sitta sur X le matin du 25 octobre. Aujourd’hui, selon le ministère de la santé, plus de 6 500 sont morts à Gaza, dont 2 700 enfants, en plus de 17 400 blessés. 

Pendant que les attaques de l’État d’Israël s’intensifient, la classe politique impérialiste refuse de dénoncer le massacre en cours et s’aligne sur le discours israélien. Si Macron, lors de sa visite récente, a déploré les morts palestiniennes comme israéliennes, il reste ferme dans son soutien quasi-total à la politique israélienne, se contentant à quelques appels vides au « respect du droit humanitaire » dans le cadre de la « lutte contre le terrorisme ]. Il a également annoncé qu’un navire français apporterait du matériel médical à Gaza. Des annonces superficielles alors que la France s’obstine dans son alignement avec Israël, qui continue de tuer lentement Gaza par la famine, la soif, et la privation d’aide médicale et de carburant. 

Dans un même temps, les manifestations de solidarité avec le peuple palestinien battent encore leur plein partout dans le monde. Il s’agit de démonstrations importantes qui témoignent d’une contestation massive et internationale face au siège meurtrier en cours, et qui pointe également les racines coloniales de la situation que subissent le peuple palestinien depuis des décennies.

La misère et la faim générées par la politique d’apartheid israélien ne peuvent être résolues par l’envoi de quelques convois humanitaires qui ne répondront pas aux besoins de la population palestinienne. Depuis la France, les organisations politiques et syndicales doivent faire preuve d’une solidarité active à la lutte du peuple palestinien et revendiquer l’arrêt de l’intervention militaire israélienne ainsi que la cessation des sanctions économiques et des mesures de punition collective qui plongent encore davantage le peuple palestinien dans la misère !


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