Nicole Goueta, la maire de Colombes, a annoncé mardi dernier qu’un couvre-feu serait mis en place dans certains quartiers de la ville, celui de Petit-Colombes et celui des Fossés-Saint-Jean. Pour justifier ce choix, la maire met en avant la délinquance et les trafics de drogues : « les gens sont tellement excédés de voir tous ces trafics de drogue, les enfants qui traînent ». La mesure intervient à la veille des vacances scolaires et vise clairement les enfants des milieux les plus défavorisés de la ville, celles et ceux qui n’ont pas la chance d’avoir une famille qui puisse les emmener deux semaines à la Baule ou au Touquet. Il s’agit donc d’empêcher tous ceux que ces politiques désignent comme « de la racaille » de profiter un tant soit peu de la période de repos scolaire.

Il s’agit en outre de donner encore plus de moyens légaux à la police pour qu’elle puisse harceler en toute tranquillité les gamins, souvent racisés, qui traînent dans la rue. En d’autres termes, il s’agit de donner un outil pour renforcer les contrôles au faciès. Quand un policier explique que « les policiers sont toujours en difficulté face à des mineurs parce que les bases légales pour une prise de contact ne sont pas forcément évidentes  » on comprend bien que les situations auxquelles il fait référence ne sont ni des flagrants délits d’infraction ou de délit, mais bien des situations où des adolescents sont bien en train de parler, discuter, rire dans la rue. Une rue qu’on veut leur refuser visiblement.

Interrogée par le Parisien, la maire explique pourquoi cette mesure intervient à cette date. Nicole Gouéta indique ainsi « qu’il faut rétablir la sécurité dans ce quartier où nous avons dépensé des millions pour la rénovation urbaine. Quand on entend les gens qui ont acheté dans la ZAC de la Marine (NDLR : la partie la plus neuve du quartier construite ces cinq dernières années) dire qu’ils ne veulent plus sortir de chez eux, ce n’est pas possible ». Le fond du problème n’est donc pas la « sécurité » des jeunes ou la « lutte contre les trafics » ; il s’agit bien d’interdire à une population racisée et plus précaire, que les nouveaux riches qui ont récemment emménagé dans le quartier ne veulent plus voir, l’accès à leur espace de vie.

Ce type de mesure rappelle les couvre-feux mis en place par Robert Ménard à Béziers en 2014 ou à Sens en 2015, avec toujours les mêmes objectifs : renforcer un peu plus l’oppression étatique sur les quartiers les plus pauvres. Et encore une fois à Colombes, le harcèlement des populations est justifié par la « lutte contre la radicalisation ». La maire de la ville a en effet estimé que rester dans le rue la nuit pouvait engendrer des risques terroristes : les jeunes « peuvent se laisser entraîner par ceux qui font des lavages de cerveau  ». Quand la droite – comme la gauche – disait que comprendre le terrorisme, c’est déjà l’excuser, on comprend mieux ses échecs dans la lutte anti-terroriste, quand on les voit confondre trafic de drogue, « fraude » dans les transports, et djihad réactionnaire.