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Au milieu des années 1950, la France a fait le choix politique de développer le nucléaire pour s’assurer une autonomie énergétique. Avec ses 58 réacteurs et ses 1100 sites renfermant des déchets nucléaires, l’hexagone est aujourd’hui le pays le plus nucléarisé du monde en proportion du nombre d’habitants. 17% de la consommation d’énergie française est d’origine nucléaire, tandis que ce chiffre s’envole à 78% pour la consommation de l’électricité. Cependant, cette politique se retrouve aujourd’hui dans une impasse. En effet, le vieillissement du parc électronucléaire exige la mise à niveau de la sécurité des installations. C’est ainsi que la moitié des 58 réacteurs français, dont celui de Flamanville, auront atteint les 40 ans d’âge entre 2019 et 2025, soit la durée pour laquelle ils ont été conçus.

Flamanville : Un chantier au coeur de la polémique

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Outre les retards qui s’enchainent depuis 2007, le chantier de l’EPR de Flamanville est au coeur de la tourmente. Le surcoût actuel du projet a d’ores et déjà atteint les 9 milliards d’euros. Mais ce n’est pas tout. En janvier 2011 la passerelle sur laquelle se trouvait un intériméraire avait été heurtée par une grue, causant la mort de l’ouvrier. Bouygues Travaux Publics, responsable de la coordination de la sécurité sur le site, sera condamné à 70 000 euros d’amende en avril 2014 tandis qu’un grutier subira une peine de 3 mois de prison ferme. Parallèlement, une enquête a été ouverte sur le travail dissimulé de 460 travailleurs roumains et polonais sur le chantier du réacteur. Mardi 7 Juillet, Bouygues TP a été condamné, une fois de plus, à 25 000 euros d’amende pour avoir eu recours aux services de sociétés pratiquant le travail dissimulé et le prêt de main-d’œuvre illicite sur le chantier de l’EPR de Flamanville. Loin, très loin, des 150 000 euros requis par le procureur en 2011.

Et maintenant, Areva !

C’est dans ce concert de casseroles qu’arrive ce qui pourrait rapidement devenir "l’affaire Areva". Le Canard Enchainé a ainsi publié la "fiche technique" de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Or, si les informations concernant les malfaçons dans la cuve du réacteur EPR de troisième génération en chantier à Flamanville ont été transmises à l’ASN en Février 2015, Areva semble être au courant depuis 2006 ... soit un an avant le début des travaux ! Pour une remise à niveau de la sécurité du site, cela ne pouvait pas plus mal commencer. La note de l’IRSN nous informe que les « analyses chimiques effectuées au cours de la fabrication » du couvercle de la cuve, en septembre 2006 « avaient montré d’importantes ségrégations majeures positives au centre de la calotte de couvercle du réacteur ». C’est-à-dire une teneur excessive en carbone qui réduit la résistance de l’acier à la propagation de fissures et ce au centre même de la cuve, là ou se produit la réaction nucléaire ...

Malgré tout, Areva aura donc attendu 9 ans pour avertir l’ASN de ce défaut. Face à la tourmente, la multinationale a déclaré, via son porte parole, que les tests de 2006 avaient pour seul et unique but de « vérifier l’orientation de la pièce dans le lingot d’acier » et qu’il ne s’agissait absolument pas d’une "dissimulation". Cette pirouette masque mal l’ingérence d’Areva dans cette affaire, alors que le marché ouvert par la vétusteté des parcs électronucléaires promet à des entreprises telle qu’Areva, Bouygues et autres de beaux pactoles. Une fois de plus, l’appétit jamais rassasié des grands groupes capitalistes relégue le simple bon sens aux oubliettes, quitte à mettre en péril l’ensemble des travailleurs et des habitants vivant aux alentours.

Il y a à peine plus d’un mois les salariés d’Areva étaient fortement mobilisés contre les menaces de démantèlement de l’entreprise et les risques de licenciement en masse. Salariés et usagers sont à l’évidence des victimes des tractations de dirigeants qui n’ont pour préoccupation que leurs propres bénéfices. Une raison pour penser que des secteurs stratégiques et impliquant des risques considérables comme celui de l’énergie devraient être réquisitionnés, nationalisés et mis sous contrôle des salariés et de la population, de façon à réduire les dangers et opérer un tournant vers la production d’énergies renouvelables.