En 2008, trois policiers de la brigade anti criminalité de nuit (la BAC N) de Paris ont été jugés pour l’interpellation violente d’un chauffard en février 2004. Rattrapé à l’issue d’une folle course-poursuite de Paris à Créteil, durant laquelle il avait renversé deux policiers et blessé un troisième, le fuyard avait été frappé, dénudé puis humilié par certains fonctionnaires... sous les yeux de dizaines de collègues. L’incroyable interpellation avait, à l’époque, entraîné une polémique nationale sur les « dérapages » policiers.

L’affaire, surnommée "l’affaire de l’enjoliveur", date de 2004. A l’époque, les policiers qui engagent une course-poursuite pour stopper un homme qui conduisait tout en tabassant sa passagère, passent celui-ci à tabac. Pantalon et slip baissé, l’un d’entre eux va même jusqu’à lui glisser un enjoliveur entre les fesses. Les images de l’interpellation ont étrangement disparu.

La Procureur réclame de la prison ferme pour les policiers, sans succès…

Le tribunal correctionnel de Paris s’est montré un peu moins sévère. Jugé pour « violences volontaires », un policier a reconnu durant l’enquête de l’IGS (la police des polices) puis au tribunal qu’il avait bien placé « un cerceau d’enjoliveur » entre les fesses du chauffard. A l’audience, il avait expliqué son geste par l’énervement et le stress de la course-poursuite. Il a été condamné à un an avec sursis et trois ans d’interdiction professionnelle. Un capitaine, jugé pour violences et destruction de preuve (la disparition de la vidéo de l’intervention policière), a été condamné à dix-huit mois avec sursis et trois ans d’interdiction d’exercer. Le commissaire Vincent Lafon, qui dirigeait l’opération et qui est resté passif face aux agissements de ses hommes, sera condamné à un an de prison avec sursis et un an d’interdiction professionnelle pour « abstention volontaire d’empêcher un crime ou un délit ».

Le même commissaire… douze ans après

Le commissaire Lafonest est arrivé à Aulnay-sous-Bois en début d’année 2014. Et c’est sous son commandement que les quatre policiers impliqués dans l’affaire Théo ont agi, puisqu’ils appartiennent à une brigade de sécurité de terrain (BST), rattachée au même commissariat.

Mais ce cas n’est pas isolé.Il ne s’agit pas de "bavures" ni de des dérapages individuels, comme le démontrent une longue liste de cas de diffèrent gravité, de la violente interpellation d’un enseignant de la Sorbonne agressé et menacé de viol à l’assassinat du jeune Adama Traoré, et, bien sur, l’affaire Théo, pour ne citer qu’une partie des cas les plus récent. C’est pour cela que « purger dès maintenant les éléments malsains » de la police, comme le réclamé Jean-Luc Mélenchon,ne saurait être qu’un pansement face à une police raciste et sexistequi hérite de techniques de répression de l’époque coloniale.

Aujourd’hui, les affaires Adama et Théo ramènent la question des violences policières sur le devant de la scène. Pourtant, les quartiers populaires sont quotidiennement soumis à cette répression barbare, et ce depuis des décennies. Si, comme on a pu le voir dans les manifestations et sur les réseaux sociaux, Adama et Théo rappellent pourquoi Zyed et Bouna courraient, la révolte actuelle dans les quartiers populaires brise l’omerta. L’un des enjeux, et ce après la répression violente du mouvement social lors de la mobilisation contre la loi travail ou bien encore l’assassinat de Rémi Fraisse en octobre 2014 sur la ZAD de Sivens, sera de faire émerger un front de résistance contre les violences policières. Pour cela, il est important que l’ensemble des forces progressistes réclament Justice pour Théo, Adama et tout les autres.

Photo : Jean Segura