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Le président nous prend pour des…

L’allocution, les salades et François Hollande

Depuis le début de la semaine, les Français attendaient – soi-disant avec beaucoup d’impatience – l’allocution de François Hollande dans une émission spéciale intitulée « dialogues citoyens », émission organisée par France 2 pour la soirée du jeudi 14 avril. À Paris, place de la République, Nuit Debout avait installé un grand écran afin de visionner tous et toutes ensemble le One Man Show du président, alors même que la mobilisation contre la loi travail, et plus largement contre les politiques du gouvernement, continue depuis plus d’un mois. Après une journée de mobilisation durement réprimée, cette mascarade médiatique a fini de nous convaincre qu’il n’y aura pas de relâchement de notre part : nous ferons reculer le gouvernement et les CRS. Cécile Manchette

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Pendant près de quatre-vingt-dix minutes, le
Président, trois journalistes (David Pujadas, Léa Salamé, Karim Rissouli) et quatre invité.es, des Français déçus et en colère, ont « dialogué » sur la situation économique et politique française en direct du Musée de l’Homme. Un an avant la fin de son quinquennat, largement critiqué et contesté, Hollande a pourtant affiché un visage serein, avec un discours en positif annonçant que tout irait très bientôt pour le mieux dans le meilleur des mondes...

Sauf que « le meilleur des mondes » proposé par Hollande et sa clique ne correspond pas au « nouveau monde » qu’imaginent avec détermination les gens qui se mobilisent depuis plusieurs semaines : dans la rue, dans les facs, dans les entreprises contre la loi travail, sur les places avec le mouvement « Nuit Debout », depuis une quinzaine de jours avec la grève générale qui ébranle Mayotte.

Le Président de la République ne s’est pas fait attendre pour balayer d’un revers de main les voix qui s’élèvent depuis plus d’un mois pour exiger le retrait de la loi travail. Alors même que des actions et des manifestations avaient mobilisé encore des milliers de jeunes le jour même et quelques jours avant, François Hollande a choisi la politique de l’autruche et a fait mine que rien, absolument rien de politique et de radical n’était en train de naître dans le pays. D’une voix calme, « normale », qu’on lui connaît bien, et après s’être étonné au détour d’un ton très paternaliste (« mais où est-on ? ») de la vigueur des manifestations de rue, il a réaffirmé que non, « la loi travail ne sera[it] pas retirée ».

Selon Hollande, les personnes opposées à la loi travail, et plus particulièrement les jeunes, se trompent sur toute la ligne, passent à côté du sens de la loi. Parce qu’en fait la loi El Khomri « doit » permettre de « clarifier les règles » et d’« embaucher en CDI » ! D’ailleurs, notre Président est très fier de sa politique économique : « en 2015, nous avons créé 100 000 emplois nets de plus. Pour la première fois en cinq ans, l’économie française a créé plus d’emplois qu’elle en a supprimé. » Il ajoute : « En 2016, nous pensons que nous pourrons créer 160 000 emplois supplémentaires. » Il a omis la hausse des chiffres du chômage, soit 700 000 chômeurs de plus en 2016 qu’au début de son quinquennat. Il nous promet la création d’emplois, mais nous connaissons bien, entre autres, les artifices auxquels a recours le gouvernement pour diminuer les chiffres du chômage. Pour mémoire, rappelons que le gouvernement a pour fâcheuse habitude de « maquiller le chômage », faisant ainsi « baisser » les chiffres de l’INSEE via notamment les « plans formation » qui visent en réalité à mettre des milliers de gens en formation, les sortant de fait du statut de « chômeurs ».

Ainsi, avant même que les débats ne s’ouvrent entre Hollande et les citoyens invités, le mépris du gouvernement s’est exprimé une nouvelle fois ouvertement. Très rapidement s’est vérifié le fait qu’au cœur de cet événement médiatique, il n’y aurait pas la place pour le retrait de la « loi travail », ni pour le rejet de l’état d’urgence, ni la condamnation des violences policières, ou de cet État raciste et sexiste. Non, ce qui allait être avancé dans les prochaines longues minutes de débat est le bras sécuritaire et autoritaire de notre État français : le terrorisme, le port du voile, la sécurité.

Pour ce faire, quatre invités ont été sélectionnés et triés sur le volet pour venir participer à cette mise en scène. Quatre Français.es, dont une cheffe d’entreprise, la mère d’un djihadiste, un étudiant blogueur de gauche mobilisé à la Nuit Debout parisienne, et un conducteur d’autocar, électeur du FN. Il était évidemment couru d’avance de ne retrouver, parmi les invités, nul étudiant mobilisé sur sa fac depuis début mars, ni de salarié de Goodyear condamné, ni de gréviste en lutte de l’hôtel Campanile... D’ailleurs, un syndicaliste de Force ouvrière (FO) et un agriculteur étaient invités à l’origine, avant d’être finalement décommandés. En effet, leurs discours risquaient fortement de déranger Hollande, en exprimant l’état de ras-le-bol général de toute une partie de la population, ce qui n’était pas au goût du président, du gouvernement et des médias dominants. Pourquoi donc risquer d’ouvrir un vrai débat, de faire entendre la colère, les revendications de millions de gens, alors même que l’on peut une nouvelle fois manipuler et détourner aisément sans remous la colère de certain.es ?

Toutefois, l’audience de l’émission n’a pas dépassé les 3,5 millions de spectateurs, ce qui est assez faible et montre que son discours reste majoritairement inaudible. L’impression que nous laisse ce débat est principalement le sentiment d’avoir regardé un homme se parler à lui même, mais surtout à celles et ceux dont le gouvernement défend les intérêts. En somme, un gouvernement aveugle à la colère qui monte.

Alors que l’État nous a répondu quelques heures auparavant par une présence policière décuplée, par des coups, des arrestations, par la stigmatisation des « casseurs », Hollande, lorsqu’il occupe l’espace médiatique, répond quant à lui de manière assurée et confiante qu’il veut « moderniser le pays », « protéger le modèle social », avant de rajouter que « ça va mieux ». Et que ça ira mieux, certainement pour lui, pour le gouvernement et pour les (grands) patrons...

Nous appelons étudiants, chômeurs, et salariés à lui donner tort en bloquant les lieux d’études et de travail, en descendant dans la rue, en s’organisant pour lui montrer que nous aussi nous allons bien, que nous voulons améliorer la vie et les conditions de vie de tous les travailleurs.es, et que pour se faire nous continuerons la lutte. Si Hollande est prêt, comme il le dit, à « poursuivre jusqu’au bout », nous aussi !


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