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Laboratoires pharmaceutiques

Mediator, 2100 décès potentiels. Un scandale ordinaire ?

Christian Grosz Depuis 1998, le MEDIATOR, médicament commercialisé depuis 1976 par les laboratoires SERVIER pour le traitement du diabète de type II des sujets en surpoids, a été retiré de la vente en Suisse, puis en Espagne (2003) et en Italie (2004). Il ne sera retiré du marché français qu’en 2009 ! Depuis 1993, Jacques SERVIER savait, sur la base d’études internes, que son médicament contenait de la norfenfluramine, substance provoquant de graves lésions, notamment des valves cardiaques. L’un des plaignants, âgé de 72 ans, après 6 ans de Mediator, vit aujourd’hui avec une valve artificielle. De plus, ce médicament toxique a été illégalement promu auprès des médecins comme « coupe faim », ce qui ouvrait un marché beaucoup plus vaste, mais ne correspondait nullement à l’AMM (autorisation de mise sur le marché délivrée par l’Agence du médicament).

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Une première audience au TGI de Nanterre, le 10 septembre, a vu 2 victimes réclamer des indemnisations conséquentes, et la caisse d’assurance maladie se porter partie civile contre les laboratoires SERVIER. En effet, actuellement, c’est elle qui prend en charge les soins des victimes. La tactique odieuse du patron voyou, Jacques SERVIER, a consisté à tout faire pour repousser la décision au procès pénal, qui n’aura pas lieu avant 2 ou 3 ans. Pourquoi ? Irène Frachon, pneumologue, l’explique en ces termes : « Ce que SERVIER attend, c’est que, pour les victimes les plus graves, il vaut mieux que la victime décède avant l’indemnisation pour les ayant-droit, car celle-ci est inférieure au coût d’une personne très handicapée »… décision du tribunal rendue le 22 octobre. Mais Jacques SERVIER, mis en examen pour tromperie aggravée, homicides et blessures involontaires, n’aura cependant pas le loisir de constater le résultat de ses manœuvres : il est décédé en avril 2014, à l’âge de 92 ans… il n’avait jamais consommé de MEDIATOR !
Jacques SERVIER était, à coup sûr, un prédateur (*) : les patients potentiels étaient pour lui des proies et le profit, extorqué par tous les moyens, sa seule motivation. Il rejoint en cela un Jean Claude MAS, patron des prothèses PIP, qui faisait implanter, chez des centaines de femmes, des prothèses mammaires en silicone industriel. Mais au-delà du caractère abject de quelques patrons voyous rejoints par les scandales et par une justice qui les a protégés tant que c’était possible, ce qu’il faut comprendre c’est que le mépris total de la santé des patients, au nom du profit maximum, constitue le fonctionnement « normal » du système capitaliste en matière de santé. Tout au long de la chaîne qui part de l’élaboration des normes médicales, en passant par la « recherche et développement », la fabrication, les contrôles qualité, la politique marketing, la communication avec le corps médical, mais aussi la gestion capitaliste des hôpitaux publics et des cliniques privées (**), le profit est omniprésent. Les scandales ne sont que la partie visible de l’iceberg.
L’excellent ouvrage de Quentin RAVELLI (***) montre, en pénétrant à l’intérieur de l’empire SANOFI-AVENTIS et en suivant la vie d’un seul antibiotique, la PYOSTACINE, qu’à aucun moment, de la fabrication à la prescription, les pratiques du groupe ne prennent en compte ni les intérêts du patient, ni ceux des salariés qui la fabriquent (travail posté en cinq-huit détruisant les rythmes biologiques). C’est ainsi qu’après avoir commercialisé pendant des années un antibiotique prescrit pour les infections de la peau, le service marketing a réorienté les prescriptions massivement vers les infections respiratoires qui représentent un marché beaucoup plus large. Falsification des résultats cliniques, briefings harcelants des visiteurs médicaux, corruption, flicage des médecins de ville avec l’aide des pharmaciens de proximité, tous les moyens sont bons pour amener les médecins à « modifier leur profil » en prescrivant massivement de la PYOSTACINE aux patients. Et ce, pour la moindre infection, quitte à induire des résistances sur la réalité desquelles la politique de SANOFI est simple : le déni.
Quelles solutions pour construire un système de santé qui soit réellement au service de la population et basé sur le respect des travailleurs quel que soit leur poste ? Il convient de démanteler le système actuel basé sur la propriété capitaliste : il faut procéder à l’expropriation sans indemnités ni rachat des laboratoires pharmaceutiques, et les faire fonctionner sous le contrôle des travailleurs. Ce sont aussi les personnels de santé qui doivent diriger les hôpitaux, exclusivement publics.

(*) Il l’était aussi en profitant de l’étranglement financier de la recherche publique (INSERM) pour faire travailler à vil prix des chercheurs hors statut qu’il payait le temps d’une étude, ce qui était beaucoup plus rentable que d’embaucher des chercheurs en CDI au sein des laboratoires SERVIER.
(**) Capital Santé – Quand le patient devient client - Philippe BATIFOULIER (Enseignant en économie politique à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense) – Editions La découverte.
(***) La stratégie de la bactérie – Une enquête au cœur de l’industrie pharmaceutique –Quentin RAVELLI – Editions du SEUIL.


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