« Pas de Justice, pas de Paix » : le syndicat de cheminots Sud Rail a le mérite d’être clair et sans ambigüité sur son soutien au mouvement en cours dans divers quartiers populaires de grandes villes. Alors que les réactions des fédérations syndicales sur les évènements en cours restent limitées, le syndicat, qui appelle à la marche en blanche appelé par la famille, montre la voie à suivre : celle d’une union entre le mouvement ouvrier traditionnel et ce qui pourrait être le début d’un mouvement d’ampleur contre les violences d’Etat.

« Depuis plusieurs années, il y a une prise de conscience dans les mouvements sociaux des violences policières, qui s’abattent sur ceux qui relève la tête, qu’ils soient Gilets Jaunes, écologistes, ou syndicalistes. C’est indispensable qu’on essaye d’unifier nos colères pour obtenir justice pour Nahel, et tous les blessés et réprimés » explique Laura Varlet, cheminote au Bourget et militante Sud Rail.

Pour elle, la prise de position était nécessaire et évidente : « Si Sud Rail a pris position, c’est qu’on refuse la logique selon laquelle les syndicats ne devraient se préoccuper que des retraites et des salaires, et pas de ce qui arrive à notre jeunesse dans les quartiers où on habite. Pour exiger la justice, on doit peser de toutes nos forces avec nos moyens d’actions, notamment la grève, et il faudrait que les confédérations prennent clairement position en soutenant la révolte des quartiers et proposer une perspective d’unité pour en finir avec le cours autoritaire et sécuritaire » explique la cheminote, avant de conclure : « La grève, c’est le rapport de force le plus important dans cette société, et face à un gouvernement radicalisé, la seule manière d’en finir avec les violences policières ».

Jusqu’ici, les réactions syndicales ont été plutôt discrètes : Marylise Léon a simplement fait part de sa « vive émotion face à des images insoutenables », tandis que la CGT a publié un communiqué dénonçant le meurtre de Nahel, mais sans parler une seconde des mouvements en cours dans différentes villes, présentant la police comme « un service public au service de la garantie des libertés et des droits fondamentaux » et appelant à un « débat » à ce sujet. Seule la fédération Solidaires a pris clairement position contre le racisme d’État, les violences structurelles de la police en appelant aussi à la marche de la famille.

Pour lutter contre les violences policières, les exécutions sommaires lors de contrôles de polices, contre les humiliations racistes, il faut que les syndicats entrent dans la bataille pour la Justice et la Vérité pour Nahel. Ces alliances avaient déjà commencé à se former, notamment autour de l’Intergares, regroupement de cheminots issu de la bataille du rail de 2018, qui avait organisé, aux côtés du Comité Adama, des manifestations conjointes lors des Gilets Jaunes. C’est ce type de convergences qu’il va falloir mettre en place dès maintenant, en mettant au centre l’outil central qu’ont les ouvriers à leur disposition pour mettre à mal l’État : la grève.