"Le BHV ouvrira le dimanche dans les mois qui viennent" assurait Philippe Houzé, président du directoire du groupe Galeries Lafayette le 15 décembre. Pourtant le mercredi 16, la CFDT a annoncé qu’elle ne signerait pas le texte, bloquant ainsi l’accord de branche. La CFE-CGC et la CFTC étant de probables signataires, bien que ne s’étant pas encore prononcées, la signature de la CFDT aurait suffi pour atteindre les 30% de représentativité exigés. La CGT et FO de leur côté auraient pu ensuite faire valoir leur droit d’opposition, puisqu’elles représentent à elles deux un peu plus des 50% nécessaires. L’accord étant d’ores et déjà rejeté, la question ne se pose plus.
L’absence d’un accord de branche bloque-t-il cependant l’extension du travail le dimanche prévue par la loi Macron ? Certainement pas. « Pour appliquer l’ouverture dominicale permise par la loi Macron, dont les décrets ont été publiés fin septembre, un accord entre partenaires sociaux est un passage obligé. Accord qui peut intervenir dans des accords de branche, d’entreprise ou d’établissement, ou encore un accord territorial. […]Certains grands magasins ne se feraient plus d’illusions quant à un accord de branche, et auraient initié le travail aux niveaux entreprises et établissements. Certains grands magasins parisiens s’opposeraient même aux propositions d’accords de branche, trop éloignées des ententes décrochées en leur sein. » écrivait Fashionmag le 15 décembre.

Voilà pourquoi en dernière instance, l’UCV (Union du grand commerce de Centre-Ville. Autrement dit, le patronat des grands magasins tels que les Galeries Lafayette, le Printemps, Le Bon Marché…) n’a que faire d’un accord de branche, même si elle a adopté la posture du dialogue, en disant avoir fait beaucoup de concessions sur les compensations au travail dominical (majoration de salaire, prime d’aide à la garde d’enfants, prise en charge de 60% des frais de transports, jours de repos compensateur...). Dans les entreprises où le rapport de force est en faveur du patron, un accord à l’échelle de l’entreprise est souvent plus rentable qu’un accord collectif de la branche.

Aucun doute sur la ligne communicationnelle à venir de la part du patronat : les syndicats « bloquent l’économie », l’accord aurait permis la création de « près de 3000 emplois », et les français « sont en majorité pour le travail le dimanche » (en tout cas le petit millier ayant répondu au sondage bidon d’Odoxa).

La réalité, c’est que si les salariés du secteur n’organisent pas la riposte, les accords passeront, par branche, entreprises ou zones. Les soi-disant emplois créés, s’ils existent, seront surtout des jobs précaires pour étudiants, qui seront « volontaires » quand on leur fera la proposition de travailler le dimanche… le jour de leur entretien d’embauche. Les personnels extérieurs aux grands magasins, des sous-traitants aux « démonstrateurs » des marques, subiront par la suite la même pression pour « suivre » les accords passés dans le magasin dans lequel ils travaillent.