Tout comme lors du dernier round des négociations entre Damas et l’opposition, qui avait eu lieu en avril dernier, la première difficulté est de faire asseoir les deux parties autour d’une même table. En avril, et lors des sessions de négociations précédentes, cela n’avait pas eu lieu, et l’émissaire de l’ONU devait faire la navette d’une salle à l’autre. Le scénario est en train de se répéter actuellement. Et de nouvelles difficultés s’ajoutent à ce bras de fer qui a pour but apparent de ramener la paix en Syrie, mais qui a pour réel enjeu de déterminer qui aura le contrôle sur la région dévastée par une terrible contre-révolution depuis maintenant six ans.

En premier lieu, cette illusoire session de négociation a été violemment perturbée samedi par une série d’attentats-suicides revendiqués par le Front Fateh al-Cham, ex-branche d’Al-Qaïda en Syrie. Les estimations varient entre 40 et 80 personnes tuées, dont une bonne partie de civile et le chef des renseignements militaires de l’armée syrienne à Homs. En représailles, l’armée syrienne a mené une série de raid sur une banlieue de Homs qui n’est pas contrôlée par le régime.

Et la réponse ne s’est pas non plus fait attendre à Genève, en la personne de Bachar Jaafari, chef de la délégation gouvernementale syrienne. Ce dernier a déclaré que « les attentats terroristes à Homs sont un message à Genève de sponsors du terrorisme, c’est un crime qui ne peut pas rester sans réponse ». Il a également exigé que Staffan de Mistura, émissaire de l’ONU, rédige une déclaration spéciale qui condamne les attentats de Homs et que les groupes d’opposition fassent de même. Il a déclaré que la condamnation de ces attentats était un préalable à la poursuite de négociations : « Si tous les groupes d’opposition et M. de Mistura condamnent l’attaque à Homs, la délégation de Damas sera prête à poursuivre les négociations de Genève ». De son côté, Staffan de Mistura a exprimé son souhait, bien que peu convaincu, de ne pas voir cette série d’attentats entacher les pourparlers.

Dans le même temps, l’opposition, qui devait arriver unie, s’est scindée en trois groupes, dont deux, plus modérés dans leur opposition à Bachar el-Assad, sont soutenus par le gouvernement russe. Et au sein même du HCN, principale composante de l’opposition, il existe d’importante divisions entre les politiciens et les combattants : « On a dû bluffer jeudi pour l’ouverture des pourparlers. On n’avait pas dit aux rebelles que les politiques seraient également présents face à de Mistura, sinon les combattants qui méprisent les politiques en les appelant les opposants des hôtels ne seraient pas venus à la séance inaugurale », explique un diplomate de l’ONU.

En clair, rien n’a avancé dans ce quatrième round de Genève, et c’est presque même le contraire. L’émissaire de l’ONU reçoit jusqu’à maintenant chaque partie séparément, et les discussions restent focalisées sur des problèmes de procédure. Il paraît bien peu probable que des échanges directs aient lieu entre le régime et les opposants. Et après cinq jours, les négociations qui devaient porter sur la résolution 2254 votée en décembre à l’ONU – qui planifiait un cessez-le-feu, un gouvernement de transition dans les six mois et des élections dans les 18 mois – n’ont pas débuté.

Mais l’échec de ces tentatives de réinstaurer la paix, après des années de contre-révolution féroce, était à prévoir. D’autant plus qu’elles se déroulent à des milliers de kilomètres et bien à l’abri des premiers concernés : celles et ceux qui subissent au quotidien, depuis six ans, les massacres, les attentats et les bombardements, perpétrés par le régime syrien et ses alliés, Daesh et la coalition internationale.