C’est une victime de plus d’un État qui n’en finit pas de mener ses politiques racistes et islamophobes. Une victime qui, bien que lavée de tout soupçon, n’a toujours pas reçu la moindre excuse de la préfecture qui a cherché à harceler, jusqu’au bout, ce présumé coupable. Il s’appelle Abdel Hajji, a 31 ans, est de nationalité marocaine et vit en France depuis l’âge de deux ans. Ouvrier dans l’usine du coin, il rencontre un collègue qui lui donne le goût de la chasse et se met à pratiquer le tir sportif. Jusque-là aussi, rien de bien répréhensible. Sauf qu’il est musulman, et que par les temps qui courent, une pratique religieuse combinée à une pratique sportive des armes à feux et ont vite fait de vous faire assimiler à un terroriste...

Heureusement, le « pays des droits de l’homme » n’en est plus à brûler les indésirables, mais d’autres méthodes existent. Elles s’appellent racisme d’État, assignation à domicile, poursuite judiciaire et humiliation sociale. Le tout, sans preuve, pour un individu sans casier. Sur quel élément s’appuie l’institution judiciaire ? Sur une supposée « instabilité psychologique » qu’il faudrait plutôt appeler traumatisme : celui d’avoir vu son collègue mourir le visage arraché dans un accident de travail... 

Une semaine après les attentats du Bataclan, le 20 novembre 2015, le GIGN fait exploser la porte de la maison d’Abdel. Selon le préfet et son ordre de perquisition, « il existe des raisons sérieuses de penser que se trouvent des personnes, armes ou objets liés à des activités à caractère terroriste. » S’ensuit la descente aux enfers. Après une arrestation immonde et humiliante, durant laquelle les agents de l’unité « d’élite » l’insultent en le traitant de « fils de pute de terroriste », de « sale arabe de merde » tout en le frappant, l’étranglant et lui mettant un doigt dans l’oeil, l’electromécanicien est assigné à résidence et doit pointer trois fois par jour à la gendarmerie. 

Le plus dur est peut-être le poids de la suspicion, le fait d’être « présumé coupable » lorsque la justice saisit, outre ses armes de sport pour lesquelles il a une licence en règle, un drapeau du Tawhid énonçant un des piliers de l’Islam, symbole pourtant très courant, et que la fausse rumeur se répand qu’il avait un drapeau de Daech. Plus personne ne lui dit bonjour dans le village où il a longtemps vécu et où il avait monté un club de football. Une présomption de culpabilité qui est aujourd’hui le corollaire de la présomption de légitime défense que le gouvernement veut donner aux policiers.

Cette présomption de culpabilité n’est jamais remise en cause, alors que pourtant, toutes les charges s’effondrent : la perquisition est annulée par le tribunal administratif ; son assignation est levée en janvier ; sa licence de tir est toujours là. Pour justifier tout ce qu’elle lui a fait subir, la préfecture lui a finalement découvert une « relation indirecte avec un malfaiteur belge d’origine marocaine ». De là, Il n’y a qu’un pas pour le soupçonner de fomenter un attentat terroriste... telle est l’actuelle logique du ministère de l’intérieur. Bien que n’ayant rien contre Abdel, le ministère public s’acharne à vouloir le poursuivre, cette fois pour des t-shirts de contrefaçon. L’État, finalement condamné à lui verser 1170€ d’amende, très loin de compenser les préjudices subis, s’en tire cependant à bon compte, libre de continuer ses attaques et son injustice dirigées contre les musulmans.